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Le vrai coût de la gratuité

Écrit par David Vives, Epoch Times
19.04.2014
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  • (Justin Sullivan/Getty image)

«L’économie de demain, c’est l’économie du risque, c’est l’économie de l’innovation, c’est l’économie du numérique», clamait François Hollande, il y a quelques semaines alors que l’économie participative se dotait d’un cadre législatif encourageant sa pratique.

Aujourd’hui, la gratuité est omniprésente dans nos modes de fonctionnement: gratuité des médias, des médias sociaux, de la culture, des services, etc. Un phénomène qui connaît une très forte expansion et qui est fortement lié aux modes de communication entre individus. La technologie numérique et Internet permettent en effet d’agir comme support unique et se substituent progressivement aux supports papier – livre, presse – théâtre, cinéma, télévision.

Bon nombre d’études portant sur les modèles économiques développés sur Internet dans notre pays montrent qu’en économie, rien n’est sans conséquence et rien n’est jamais gratuit. Les coûts, d’un bout à l’autre de la chaîne, sont toujours assumés; avec, en filigrane, le risque de faire passer l’individu lui-même pour une valeur marchande, et de consolider certains monopoles et mode de fonctionnements sociaux.

Des modèles économiques complexes

D’après Olivier Bomsel, professeur d’économie et ingénieur civil des Mines, le développement des technologies et des médias sociaux est étroitement lié aux applications de communication entre individus, ainsi qu’aux mécanismes de subvention, les marchés bifaces: «Quand deux personnes déjeunent dans un restaurant, il y a toujours quelqu’un qui paie. La façon dont l’addition va se partager entre les deux convives se fait de façon très ouverte. [...] Bien sûr, les annonceurs nous invitent à déjeuner chez Google, ils nous invitent à regarder la télévision, à lire la presse. On est dans un domaine relevant de la convention».

L’idée n’est certes pas nouvelle: il s’agit de faire supporter le prix à celui qui peut l’assumer. Parfois, si le produit est gratuit, certains accessoires ou produits annexes sont payants. Par exemple, dans les sites de petites annonces, les utilisateurs seront peu disposés à payer pour l’utilisation des services, contrairement aux annonceurs, qui pourront en assumer le coût. Certains sites utilisent aussi le principe de rendre gratuit au très grand nombre d’utilisateurs une version «basique» de leur service, et de faire payer à un petit nombre d’utilisateurs une version «complète» répondant souvent au nom de Premium. Ces derniers assument le coût de la version «basique».

Plus étendu, le marché dit tripartite, dans lequel le coût est assumé par une tierce partie. C’est le cas de Google, qui loue des espaces publicitaires aux annonceurs. Les utilisateurs de Google utilisent les services de ce dernier sans rien payer pour cela; cependant, Google collecte et revend leurs données personnelles, qui sont précieuses aux entreprises désirant cibler efficacement leurs clients potentiels.

Les médias sociaux, de moins en moins «gratuits»

La grande abondance de produits gratuits pour un certain nombre d’usagers et leur surexposition pourraient bien avoir des effets inattendus sur le développement des sites et plateformes relevant des modes de fonctionnement dits «gratuit». D’après Frédéric Cavazza, consultant et conférencier dans les métiers de l’Internet, les «médias sociaux perdent leur aspect social et renforcent le côté médias», ceci en devenant de plus en plus payants. Premiers concernés: Facebook et Twitter. Selon l’analyste, ces derniers relèveraient «moins des conversations entre les personnes, et plus des communications descendantes», dont le principal impact serait de devoir payer pour toucher un large public.

Comme en témoigne une récente étude américaine, même si le nombre d’utilisateurs et de pages likées augmentent, la durée de temps qu’un utilisateur passe sur Facebook reste la même. Ainsi, la portée des contenus partagés se réduit progressivement, et les filtres mis en place pour juger de la pertinence des contenus peuvent être sujets à certaines controverses - auxquelles Google n’échappe pas non plus.

D’après une étude du Wall Sreet Journal, en 2012, 11% des nouveaux utilisateurs de Twitter ne twittent pas, mais se contentent d’utiliser le média comme un portail d’information. Selon Frédéric Cavazza, Twitter est ainsi «en train de devenir la plus grosse agence de presse du XXIe siècle». Une chose à retenir, ces médias, à travers de larges stratégies de diversifications (comprenant notamment l’usage de l’Open Source), conservent leur attractivité.

La création de «valeur»

D’après Étienne Hayem, fondateur du site Symba, la dématérialisation des supports crée une rupture conséquente: «Il existe une grande différence entre le monde physique et ce qu’on trouve sur Internet avec le numérique, qui devient dématérialisé, avec un coût marginal qui tend vers zéro.» D’après lui, il y a une énorme monétisation des données effectuée par ces sites, dont le partage reste opaque à l’utilisateur: «On contribue tous à créer de la valeur pour Facebook, sans qu’on en ait le choix.»

Sur un autre plan, on pourrait également s’interroger sur la teneur véritable d’un échange sans contrepartie. Le gratuit ne serait-il pas de nature à faire perdre aux objets leur propre valeur? D’après une réflexion du philosophe Jean Baudrillart en 1972, «une fois la valeur d’échange neutralisée dans un processus de don, de gratuité, de prodigalité, de dépense, la valeur d’usage elle-même devient insaisissable». Cette perte de l’usage et de la valeur va de pair avec la concession des données personnelles au prix d’un service gratuit transformant l’utilisateur en une simple somme de données marchandes, ce qui quand on y pense fait froid dans le dos.

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