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Alstom: un symbole français à vendre

Écrit par Charles Callewaert, Epoch Times
28.04.2014
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L’annonce ce 24 avril par l’agence Bloomberg de discussions très avancées avec General Electric en vue d’un rachat d’Alstom pour 13 milliards de dollars (9,4 milliards d’euros)  et la suspension ce vendredi de sa cotation ont accéléré l’action du gouvernement sur ce sujet à très forte connotation politique.

Afin de décider de l’avenir de ce champion industriel français «sauvé» une première fois en 2004 par Nicolas Sarkozy, une rencontre entre Arnaud Montebourg, le ministre de l’Économie, et Jeffrey Immelt, le patron de General Electric, devait se tenir dimanche après-midi à Paris, mais a finalement été reportée de quelques jours pour «disposer du temps nécessaire à un examen sérieux des propositions», selon le communiqué de Bercy. Par ailleurs, ce week-end, le géant allemand Siemens a transmis à Alstom une lettre d’intention avec une contre-proposition. Après les récentes annonces de fusion de Publicis avec Omnicom, puis de Lafarge avec Holcim, qui s’accompagneront d’un exil de leurs sièges sociaux vers des pays à la fiscalité plus douce, le rachat d’Alstom par GE apparaît comme un nouveau coup dur porté à la fierté nationale.

Une vitrine technologique française

Alstom a réalisé au 31 mai 2013 un chiffre d’affaires de 20,3 milliards d’euros, dont près de 90% à l’étranger, pour un résultat net de 818 millions. Ce groupe de 93.000 salariés dont 18.000 en France, est présidé par Patrick Kron et présent dans plus de 100 pays. Il figure parmi les leaders mondiaux d’infrastructures destinées aux secteurs de l’énergie et des transports, en particulier les équipements et services de production d’énergie (54,2 % du CA), ceux de transport ferroviaire comme le TGV (26,9% du CA), et ceux de transport et de distribution d’électricité (18,9% du CA).

Avec les transitions énergétiques en cours au niveau mondial, le groupe Alstom présente de nombreux points forts. Il est numéro 1 mondial dans l’hydroélectricité et leader de technologies clés comme le TGV, le système européen ERTMS de signalisation ferroviaire, le système CBTC d’automatisation des métros et navettes, ou encore ceux de pilotage des flux d’électricité à haute tension. Pour le gouvernement français, c’est donc une superbe vitrine du savoir faire industriel français ainsi qu’un contributeur important aux exportations.

Un champion aux pieds d’argile: une proie facile

Or, malgré ses nombreux atouts, Alstom n’a pas la taille critique nécessaire dans chacun de ses métiers pour résister seul. Ses résultats seront publiés le 7 mai prochain, mais son CA a baissé de 1% sur les 9 premiers mois de l’exercice et son carnet de commandes a reculé de 12%.

Les causes de ces difficultés sont symptomatiques de l’industrie française: produits trop chers, positionnement en milieu de gamme et endettement élevé. Par ailleurs, la conjoncture dégradée en Europe (40% de son CA) ne favorise pas la reprise des investissements et l’arrivée des Australiens, Chinois, Japonais et Indiens sur ses marchés accroît fortement la concurrence. Alstom est donc contraint de trouver rapidement un partenaire solide pour survivre, d’autant plus que son actionnaire principal, le groupe Bouygues avec 29,4% du capital, cherche activement à revendre ses parts.

GE, le mieux placé pour un rachat

Depuis plusieurs mois, le président d’Alstom Patrick Kron multiplie les rapprochements avec des partenaires potentiels. Avant de revenir subitement ce dimanche sur le devant de la scène, l’option Siemens avait vite été écartée par Alstom car les deux groupes sont concurrents directs dans le ferroviaire (TGV contre ICE) et l’énergie, et un rapprochement aurait des conséquences sociales néfastes de part et d’autre du Rhin. L’idée d’un partenariat avec un autre industriel français comme Areva ne dégage quasiment pas de synergie technologique et Areva connaît lui-même des difficultés dans le nucléaire. Enfin, l’option d’un retour de l’État au capital d’Alstom n’est guère envisageable alors que l’État français est surendetté.

Pour Patrick Kron, la revente partielle des branches énergie et réseaux d’Alstom (73% du CA) à l’américain General Electric semble donc la meilleure solution. General Electric, qui dispose de 89 milliards de dollars de cash, cherche à se renforcer dans le domaine industriel. GE est déjà très présent en France, où il emploie près de 11.000 personnes. Il est par ailleurs loin d’être un étranger pour Alstom, dont la création résulte de la fusion en 1928 de Thomson-Houston, la filiale française de GE, avec la SACM. Plus récemment, GE a racheté en 1999 l’usine de turbines à gaz d’Alstom à Belfort, puis son ancienne filiale Converteam en 2011.

L’absence éclatante de politique industrielle européenne

Quelle que soit l’issue des négociations, par le biais d’un rapprochement transatlantique ou continental, la manière dont elles sont menées illustre à nouveau la faiblesse des champions industriels français face à l’absence de politique industrielle et sociale européenne (Airbus excepté). À force de focaliser les opinions publiques sur les seules vertus de l’euro et de la concurrence entre les nations qui la composent, sans mettre en œuvre en parallèle de réelle intégration européenne au niveau industriel et social, l’Europe risque de saborder le rêve qui avait présidé à sa création.

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