Anglais | Chinois | Coréen | Français | Allemand | Espagnol | Japonais | Russe | Ukrainien | Hébreu | Roumain | Bulgare | Slovaque | Tchèque | Indonésien | Vietnamien
Faites un don

Les risques de s’opposer à la guerre 

Écrit par Ryan McMakken, Institut Ludwig von Mises
06.04.2014
| A-/A+
  • Drapeaux de l’Ukraine, de l’Union européenne et de la Russie (Shutterstock)

OPINION - Depuis le XVIIIe siècle, le libéralisme classique, et sa variante le libertarisme moderne, se sont opposés à la guerre, à part dans le cas de légitime défense. Nous voyons clairement cette position anti-guerre parmi les anti-fédéralistes de l’Amérique du XVIIIe siècle (qui s’opposaient à toutes les armées permanentes) et à travers le célèbre discours d’adieu de Georges Washington. Thomas Jefferson, souvent invectivé contre la guerre,  a agi contre sa propre idéologie à plusieurs reprises.

De l’autre côté de l’Atlantique, le libéralisme a finalement ramené des gains importants en Grande-Bretagne avec la montée de la Ligue pour l’abolition des lois sur le blé à la fin des années 1830. Le dirigeant de la ligue, un libéral radical du nom de Richard Cobden, s’est fait connaître à travers les années 1840 et est aujourd’hui connu pour sa défense active du capitalisme de laissez-faire en tant que membre de la Chambre des communes, et aussi pour son anti-interventionnisme inébranlable dans les affaires étrangères.

Pendant un temps, sa réputation politique augmentait rapidement, mais au moment où la guerre de Crimée s’est terminée, Cobden, a été mis de côté à la fois par une classe dirigeante et un public enthousiaste à la fois pour l’empire et la guerre.

Avant la guerre, Cobden a voyagé en Europe en tant qu’invité d’honneur lors de conférences internationales pour la paix, il préconisait les marchés libres, les libertés civiles et le libertarisme. Mais à la fin, comme cela a été souvent le cas, sa carrière politique a pris fin par son opposition à la guerre, et son refus de s’impliquer dans une propagande nationaliste.

Comme la crise de Crimée d’aujourd’hui, les crises de Crimée du début des années 1850 ont été causées par les efforts des différentes grandes puissances pour faire pencher la balance du pouvoir mondial en leur faveur. Parmi les premières puissances luttant pour le pouvoir mondial, on comptait l’Empire britannique.

Mais alors même que dès les années 1830, les Britanniques ont été victimes d’une hystérie nationale attisée par des experts anti-russes obsédés par l’augmentation des dépenses militaires britanniques et par la puissance au nom de la «défense» contre les Russes.

Comme c’est souvent le cas pour assurer une guerre, l’argument pro-militariste parmi les britanniques reposait sur la perpétuation et l’augmentation du sentiment nationaliste au sein de la population, et sur l’idée que les russes étaient agressifs et hostiles. Cobden, évidemment beaucoup mieux informé sur la question que le britannique moyen, a publié un pamphlet sur la Russie en 1836 considérant les faits de la politique étrangère de la Russie, qu’il a souvent comparé favorablement à la politique étrangère hyper-agressive employée par l’Empire britannique.

Cobden a commencé par comparer l’expansion russe à l’expansion britannique, et a remarqué que  «durant les cent dernières années, l’Angleterre, pour chaque morceau de territoire annexé à la Russie par la force, la violence ou la fraude; s’en est approprié à elle-même trois». Et que, parmi les adversaires auto-proclamés de la conquête, les Britanniques n’ont pas réussi à reconnaître que «si l’écrivain anglais s’indigne en parlant de vainqueurs de l’Ukraine, de la Finlande, et de la Crimée, les historiens russes ne peuvent-ils pas évoquer des souvenirs aussi douloureux sur les sujets de Gibraltar, du Cap, et de l’Hindoustan?»

Dans un parallèle intéressant avec la crise de Crimée moderne, l’opposition à la Russie parmi les militaristes britanniques était fondée sur l’affirmation que les Russes avaient annexé des parties de la Pologne par des mouvements agressifs qui ont été jugés par les Britanniques comme totalement injustifiés. Cobden, cependant, qui a bien compris que l’histoire de la région est beaucoup plus sombre que les petits scénarios inventés par les militaristes, a reconnu qu’aucun côté était angélique et innocent et que la plupart des territoires «annexés» étaient en effet peuplés de Russes qui avait auparavant été conquis et annexés par les Polonais.

Les Russes, qui n’étaient pas hostiles à leurs voisins, étaient entourés de voisins hostiles eux-mêmes, avec les origines des conflits remontant à des décennies, voire des siècles. Les arguments puérils et simplistes des militaristes britanniques, qui ont préconisé ce qui allait devenir un empire mondial, despotique, et raciste envers les Britanniques, ajoutent peu de valeur à la connaissance du public des réalités en Europe de l’Est.

À cause de ses efforts pour comprendre véritablement les conflits mondiaux, pour la recherche d’une politique de négociation et d’anti-nationalisme, Cobden a été déclaré non-patriotique et un ami du grand ennemi russe pendant la guerre de Crimée. Cobden, qui avait peut-être fait plus que quiconque en Europe en son temps pour faire progresser la cause de la liberté, a été déclaré être un ami des despotes.

Les similitudes avec la situation d’aujourd’hui sont bien sûr frappantes. La Crimée, une zone ethnique et d’allégeance nationale très ambiguë est déclarée par l’Occident être un territoire perpétuel des forces anti-russes tout comme les provinces polonaises de l’Est d’Old, en dépit de la présence d’une population très favorable à la domination russe.

En outre, le successeur de l’Empire britannique, les États-Unis, avec son système mondial d’États clients, les dictatures fantoches et les territoires occupés se déclarent aptes à se prononcer sur une «invasion» russe, très différente de l’invasion américaine de l’Irak. Elle a donné lieu à exactement une victime signalée.

Comme ce fut le cas avec Cobden au XIXe siècle, cependant, se borner à relever ces faits nous colle aujourd’hui une étiquette d’«anti-américain» ou «pro-russe», comme dans le cas évident de Ron Paul.

Comme Cobden, Paul a passé des décennies à dénoncer des régimes oppressifs nationaux et internationaux, pour maintenant être déclaré «pro-Poutine», «pacifiste», «antipatriotique» et «anti-américain» par une foule d’idéologues peu familiers avec le travail actuel de Paul, y compris ses dénonciations des régimes communistes et ses avertissements au sujet de la volonté de Poutine à étendre l’influence russe en Afghanistan.

Bien sûr, la Russie n’a pas été la seule cible. Pour ceux qui se souviennent de l’approche de la guerre en Irak en 2003, tout cela doit se sentir comme déjà vu puisque beaucoup à cette époque, y compris certains libertaires, ont affirmé que les adversaires de l’invasion étaient «pro-Saddam Hussein» car ils ont clairement montré que l’Irak n’avait pas d’armes de destruction massive, et que son régime laïque était probablement préférable à l’oligarchie islamiste meurtrière qui l’a remplacé.

Paul s’accorde bien avec les avis de Cobden, HL Mencken, William Graham Sumner, et pratiquement tous les membres de la Ligue anti-impérialiste américaine, y compris Edward Atkinson, qui a encouragé les soldats américains aux Philippines à la mutinerie. Ces opposants au principe radical du militarisme combattaient la violence du gouvernement. Certains libertaires américains modernes, d’autre part, hors de la portée de l’État russe, préfèrent passer leur temps en précisant ce que tout le monde sait déjà: la Russie n’est pas un paradis libertaire.

Ryan W. McMaken est le rédacteur en chef du Mises Daily et The Free Market. Article réédité de Ludwig von Mises Institute sous licence Creative Commons 3.0.

Version en anglais: The Risks of Opposing War

Epoch Times est publié en 21 langues et dans 35 pays.

Plus de 204 718 434 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.