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Les Français, champions du doute et du pessimisme?

Écrit par David Vives, Epoch Times
23.09.2014
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  • 48% des Français se disent pessimistes quant à leur avenir alors le pays possède un bon indice mondial de développement. (Miguel Medina/AFP/Getty Images)

Les Français seraient-ils «heureux d’être malheureux», ainsi que le suggère le New Yorker? Avec sa part de vérité et sa part de mystère, le «spleen» français surprend, fait réfléchir, amuse. D’après les dernières études, les Français ne défaillent pas à la réputation de râleurs invétérés, partisans du doute et du «non» qui l’accompagne. Certains experts, historiens ou sociologues avancent une incapacité à se projeter, et n’hésitent pas à évoquer un trait culturel. De quoi surprendre même les plus résignés d’entre nous.

Plus pessimistes que les Palestiniens

Le moral des Français serait-il gris comme le ciel de l’automne parisien? D’après une étude publiée la semaine dernière par l’institut américain Pew Research Center, 48% des sondés pensent que la situation économique du pays va se dégrader dans les douze mois à venir. Les Français seraient aussi plus moroses que les Libanais ou les Palestiniens. Seuls les Grecs font pire, avec 53% de pessimistes.

Un résultat qui contraste pourtant avec l’indice de développement national. Malgré l’accès à la gratuité des soins, l’épargne (43% des Français mettent de l’argent de côté), ou une qualité de vie plutôt bonne, les Français broient pourtant du noir ! D’après une autre étude menée par la cellule de FreeThinking, 85% d’entre eux pensent que les choses ne font qu’empirer. 47% craignent de ne pouvoir vieillir dans de dignes conditions, 72% estiment que leurs enfants vivront moins bien qu’eux.

L’éducation française, symptomatique de nos peurs

D’après nombre d’observateurs, notre système éducatif serait un bel exemple de la façon dont la crainte et le doute nous imprègnent. D’après les études menées par le Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA), contrairement aux autres pays européens,  les élèves français hésitent à poser des questions en cours, et s’abstiennent de répondre autant que possible.

«Cette réticence à prendre le risque de donner une réponse fausse est révélatrice de leur crainte de voir stigmatiser leurs erreurs» soutient Olivier Rey, chercheur l’Institut français de l’éducation. «On retrouve ici une caractéristique majeure de notre enseignement: au lieu de s’appuyer sur les erreurs des élèves, l’enseignant les considère comme des fautes et les sanctionne comme telles».

Notre système éducatif a conservé les bases culturelles des années 70, date à laquelle il fut réformé. Ce qui n’est pas du meilleur effet sur les élèves, d’après chercheurs et pédagogues de tous bords. Selon Olivier Galland, «L’objectif de l’école est de sélectionner les meilleurs au travers de la notation, du classement et de la compétition, ce qui crée un sentiment de peur: les élèves savent que leur futur statut social dépend de leur réussite scolaire. Du coup, ils ont l’impression de jouer leur vie à l’école et ils sont dans l’angoisse d’être éliminés, ce qui n’est pas du tout le cas dans les pays scandinaves.»

 «Civilisation du doute et de l’esprit critique»

Dans une perspective plus large, la théorie du déclin a toujours plus ou moins existé dans notre pays, auprès du Général de Gaulle d’abord, puis au temps de François Mitterrand. Mais c’est depuis 1970, époque des premiers sondages nationaux, qu’une tendance bien française à la morosité a été repérée. D’après l’historien Christophe Prochasson, on ne peut pas définir les propriétés «du» Français. Mais on peut selon lui repérer des communautés d’expérience, des traditions politiques ou des imaginaires historiques qui expliquent, à un moment donné, les représentations d’une collectivité.

Interrogée par le Nouvel Obs, Claudia Senik, professeure à l’École d’économie de Paris, attribue notre capacité à douter à notre belle culture. D’après elle, les Français expatriés répondent aussi négativement aux questionnaires sur le niveau de bien être que leurs cousins de métropole. Pour autant, les Canadiens ou Francophones ne témoignent pas ce trait de caractère. «On se moque beaucoup des Américains souriants et de leurs «That’s great! Wonderful!», parce que nous sommes la civilisation du doute et de l’esprit critique. Un Français ressent une certaine fierté à conserver de la distance vis-à-vis des choses – une manière de dire: «On ne me la fait pas», affirme t-elle.

En remontant le fil de l’histoire, on pourrait constater une tradition datant de l’époque de Descartes qui préférait douter absolument qu’affirmer et se tromper. Suivi par Jacques le Fataliste, le héros de Diderot qui entrevoyait que «tout ce qui nous arrive de bien et de mal ici-bas était écrit là-haut». Puis vînt, Baudelaire qui s’ouvrait à un spleen qui a par la suite imprégné les arts et leur perception. On trouve aussi des traces de ce «doute» dans les sciences humaines, littérature, sociologie, et dans la politique.

Mais s’il est difficile d’identifier avec précision les sources de ce trait culturel, celui-ci n’est pas pour autant absolu et ne saurait résumer entièrement une entière population. D’après les différents chercheurs, on ne saurait assimiler le Français à l’image d’un gaulois mécontent sans tomber dans un cliché au mépris d’une certaine réalité. Les évolutions économiques et sociales sont aussi à même de faire évoluer ces représentations. «L’identité n’est pas une donnée éternelle et incontournable, elle est dynamique et complexe», explique Christophe Prochasson.

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