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Unis pour la liberté

Hommage aux saltimbanques du crayon!

Écrit par David Vives, Epoch Times
12.01.2015
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  • «Nous sommes tous Charlie», place de la République à Paris lors de la manifestation du dimanche11 janvier 2015. (Joel Saget/AFP/Getty Images)

Ce dimanche, près de quatre millions de Charlies sont descendus dans les rues. A Paris, place de la Nation, les chants de la Marseillaise retentissent. Ici et là, les gendarmes sont applaudis à leur passage, les crayons géants défilent, les «Je suis Charlie» se comptent par milliers. A Paris, pas moins d’une soixantaine de chefs d’État et de personnalités mènent le cortège.

Sur le web, les témoignages se multiplient. «Je sais ce que c’est que d’avoir peur et d’être tué injustement par des terroristes criminels. Je partage votre peine. Je suis Syrienne. Je suis Charlie», avait tweeté mercredi Zaina Erhaim, journaliste syrienne de 29 ans, depuis la ville d’Alep. En Californie, Schwarzenegger vient de souscrire un abonnement à Charlie Hebdo en recommandant sur twitter de faire pareil. La France a ainsi été au centre d’une douloureuse commémoration internationale. Les manifestations ont été suivies un peu partout, comme à Londres, où 1.500 manifestants défilaient dans les rues adjacentes de Trafalgar Square.

L’acte terroriste aura pénétré les consciences du monde entier. Plus qu’un soutien de façade, ou qu’une émotion passagère, les commentaires laissent entendre une réflexion profonde sur la liberté de la presse, sur le courage face au terrorisme. Les journalistes étrangers soulignent la difficulté et le mal propre de notre société, dans laquelle la censure et les pressions oppriment en silence, à des échelles différentes, des populations qui se rêvent libres. En France, dans le monde, le phénomène d’identification est bien là, les enfants de Charlie sont nombreux.

Charlie l’irrévérencieux, expliqué à l’étranger

Mais «qui est Charlie?», s’interrogent de nombreux journaux étrangers. Dans la presse américaine, certains dessins de l’hebdomadaire sont floutés et leur contenu est expliqué littéralement. Comme dans le Washington Post, qui découvre une presse française plutôt libérée face aux questions religieuses. Charlie Hebdo ose, l’hebdomadaire met «un nez rouge à Mahomet», alors même que «la caricature du prophète est interdite dans la religion musulmane», note  le journal. Ne contestant pas pour autant la publication de ce numéro, qui a été suivie d’une première attaque au cocktail Molotov dans les bureaux en 2011, le Washington Post rapporte les propos de Jay Carney de la Maison Blanche: «Nous ne remettons pas en question le droit de publier quelque chose, nous nous interrogeons sur le jugement derrière cette décision de publication».

Même son de cloche au New York Times ou au Times magazine. Pourtant sensibilisés sur la question du terrorisme des islamistes radicaux, nos voisins Outre-atlantique peinent à comprendre l’humour français. Au Royaume-Uni, on est également moins enclin à rire des religions, même si l’on comprend la «tradition française». La patrie de Shakespeare a pourtant été bien inspirée par le premier journal satirique français publié en 1832, Le Charivari, au point de créer le Punch-The London Charivari une dizaine d’année après. Qui sait, le rire français est peut être contagieux.

Deux siècles et demi d’humour à la française

 «On ne porte pas de messages, on est des clowns, des saltimbanques», fredonnait le dessinateur Cabu à ceux qui voulaient (ou pouvaient) l’entendre. En France, on raille le roi, la cour, sa femme et son curé. Une tradition qui remonte aux Lumières, pour qui la satire était une arme incontournable. Celle-ci accompagnait les contes philosophiques qui portaient la réflexion sur les comportements humains observés à l’époque. Voltaire et ses pairs égratignaient la politique, la religion et l’organisation sociale par tous les bords possibles. «L’art de gouverner consiste à prendre le plus d’argent possible à une catégorie de citoyens afin de le donner à une autre», résumait par exemple le philosophe. A l’époque, ici et là, on voyait Louis XVI et Marie Antoinette caricaturés en cochon ou en serpent. Ça commençait bien…

La liberté d’expression, née dans les temps troublés de la Révolution, se développe malgré une forte censure et connaît un essor grandissant au XIXe siècle. «La Révolution et la déchristianisation qui a suivi font, aujourd’hui encore, la différence avec d’autres pays», précise Guillaume Doizy, spécialiste de l’histoire du dessin de presse. Dans le but d’interpeller sur les comportements négatifs, la satire force le trait, et les premiers dessinateurs satiriques emboitent le pas. C’est ainsi que sous les traits de Ch. Philipon, dessinateur et directeur de journaux satiriques, la tête du roi Louis-Philippe prend la forme d’une poire. Publié dans Le Charivari, le dessin devient rapidement célèbre dans l’Hexagone. Depuis, de nombreux journaux satiriques sont nés et ont fait leurs choux gras des affaires politiques et religieuses, mais peu d’entre eux ont survécu plus de quelques décennies dans notre pays.

Hors de France, «il y a des journaux d’humour mais la politique est toujours marginale. En France, elle est centrale», tranche l’historien Christian Delporte. Depuis 1980, la satire et la dérision se sont déclinées en émissions télévisées, comme le Bébête Show ou les Guignols. Mis à mal par le déclin de la presse écrite française, les dessins caricaturaux peinent à trouver leur place dans nos quotidiens. Qu’importe, à écouter les nombreux témoignages des dessinateurs de presse, la motivation à porter loin l’héritage de Charlie Hebdo est plus que jamais présente dans la profession.

Plus de 204 718 434 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.