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Comment des toilettes changeraient la vie des résidents d’un bidonville en Inde

Écrit par Venus Upadhayaya, Époque Times
04.02.2015
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  • Les habitants d’un bidonville dans la localité de Kanega à Gurgaon, en banlieue de Delhi, le 15 janvier 2015. Ils n’ont pas de toilettes et doivent faire leurs besoins sur les tas de déchets domestiques et de construction se trouvant tout près. (Venus Upadhayaya, Époque Times)

NEW DELHI – Parmi les gratte-ciel et les bureaux des entreprises dans la ville de Gurgaon, au sud-ouest de Delhi, un terrain vague rempli de déchets domestiques et de construction sert de toilettes à 70-80 familles vivant dans le bidonville voisin.

Des excréments séchés sont visibles tout autour et une odeur fétide habite les lieux. Des porcs fouinent partout, retournant et déterrant les déchets et la saleté. On aperçoit des enfants qui circulent sur les sentiers, quelques-uns sont même pieds nus.

Ce bidonville dans la localité de Kanega, dans la ville de Gurgaon, n’a pas encore vu passer la campagne «Inde propre» lancée par le premier ministre indien en octobre dernier. Cette campagne promet de fournir un accès à des toilettes d’ici 2019 pour tous les citoyens de l’Inde et de mettre fin à la défécation en plein air pour améliorer l’hygiène sanitaire partout au pays.

Au plan politique, ceci aiderait à prévenir la propagation de maladies comme la diarrhée, maladie à laquelle peuvent être attribués les décès de 334 000 enfants indiens chaque année selon l’Organisation mondiale de la santé.

En plus, sur le plan personnel, des toilettes pourraient changer drastiquement le mode de vie des gens vivant dans les bidonvilles.

«Aller aux toilettes est très problématique», explique Bajaru Mohammad, un habitant d’un bidonville dont le travail est de conduire un rickshaw.

N’ayant pas accès à des toilettes à l’intérieur ni même à des toilettes communautaires, les gens font leurs besoins en se cachant entre les tas de déchets et, souvent, en y allant lorsqu’il fait noir pour s’isoler un peu plus. Malgré tout, ils disent que cela ne leur assure pas vraiment plus d’intimité.

«Les gens nous voient de là et de là», avise Nazmul, un résident de bidonville, en désignant les points de vue aux alentours.

Pour les femmes, c’est encore plus difficile. En plus, elles font face au risque de harcèlement de la part des hommes qui n’hésitent pas à les huer, à les toucher et, dans les pires cas, à les violer lorsqu’elles font leurs besoins.

«Si nous venons ici le jour, les garçons nous suivent», se plaint Shehnaz, une résidente du bidonville qui travaille comme aide domestique dans l’immeuble à appartements voisin.

Shehnaz dit qu’elle va faire ses besoins entre 3-4 heures du matin pour profiter de l’intimité de l’obscurité.

Toutefois, cette obscurité pose aussi certains risques pour ces femmes qui essaient de se déplacer en groupe pour la sécurité. Avec moins de gens autour pouvant répondre à un appel à l’aide et l’obscurité comme couverture, les femmes sont des cibles faciles pour les violeurs.

Dans un cas horrible, même selon les standards indiens, deux adolescentes ont été piégées, violées et pendues à un arbre dans l’Uttar Pradesh, un État au nord de l’Inde, pendant qu’elles allaient faire leurs besoins, en mai dernier.

«Plus de 60 % des viols dans l’État sont perpétrés lorsque les victimes sortent pour faire leurs besoins, parce qu’il n’y a pas de toilettes dans leurs maisons», explique le chef de police de l’État, Ashish Gupta, selon AP.

Accès à des toilettes

En Inde, 594 millions de personnes doivent déféquer en plein air, selon l’UNICEF, la fondation pour les enfants de l’ONU.

La défécation en plein air est beaucoup plus répandue dans les campagnes où les terrains vagues abondent et où le niveau élevé de pauvreté fait des champs les toilettes les plus abordables pour plusieurs. Lorsque les gens partent de la campagne pour aller dans les villes, ils aboutissent souvent dans les bidonvilles où ils ne changent pas leurs habitudes.

  • Le terrain près d’un bidonville dans la localité de Kanega à Gurgaon, en banlieue de Delhi, le 15 janvier 2015. (Venus Upadhayaya, Époque Times)

 

Pour les femmes dans les bidonvilles qui travaillent comme aides domestiques, elles ont accès aux toilettes dans les complexes d’habitation où elles travaillent. Les hommes qui travaillent dans la ville comme journaliers ou comme conducteurs de rickshaw doivent souvent trouver des sites de construction ou des dépotoirs pour faire leurs besoins pendant le jour. Avoir davantage accès à des toilettes un peu partout leur serait très utile, particulièrement à la maison.

«Cela nous éviterait les problèmes liés à chercher, chaque jour dans le froid, une place sécuritaire pour faire nos besoins», dit Nazmul.

Fournir des toilettes dans les bidonvilles

Bindeshwar Pathak, fondateur d’une ONG appelée «Sulabh International» et qui travaille à fournir des toilettes partout au pays, explique tout le défi que représente le fait de travailler à avoir des toilettes dans les bidonvilles. Souvent, les bidonvilles sont établis illégalement et se déplacent, alors les toilettes pour ces endroits devraient être portatives.

L’entretien de toilettes publiques présente aussi des problèmes, car plusieurs habitants des bidonvilles sont les premières générations à utiliser ces toilettes, et les organismes travaillant à garder ces endroits propres rapportent qu’ils ont de la difficulté à les garder propres.

Sulabh International a construit, dans quelques bidonvilles, des toilettes publiques que les utilisateurs paient à l’utilisation et pour lesquelles l’organisme vend des cartes d’utilisation mensuelles aux familles pour environ 30 roupies (0,61 $ CA) par mois. Malgré le prix extrêmement bas pour des familles de 5-10 personnes, c’est encore trop dispendieux pour des familles qui ne priorisent pas cela.

«Dans certains cas, les gens ne sont pas prêts à acheter des billets mensuels», indique Pathak.

«Pour faire cesser la défécation en plein air en Inde, nous suggérons que l’entretien des toilettes publiques soit payé par les fonds publics ou par les autorités municipales», avance-t-il.

La campagne «Inde propre» du premier ministre en est encore à ses balbutiements et il reste encore à prouver si elle sera fructueuse. L’ancienne campagne gouvernementale Nirmal Bharat Abhiyan ou la campagne d’«assainissement total» qui avait des objectifs similaires à celle de «Inde propre» n’a pas rempli ses promesses à cause de la corruption, du manque de financement et de volonté politique.

Version originale: How a Bathroom in an Indian Slum Would Change Residents’ Lives

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