Attal : « L’école est la première victime de ce remaniement », déclare Arthur de Watrigant

Par Julian Herrero
11 janvier 2024 07:06 Mis à jour: 11 janvier 2024 07:41

ENTRETIEN – Arthur de Watrigant est directeur de la rédaction du magazine l’Incorrect. Pour le journaliste, la nomination de Gabriel Attal au poste de Premier ministre était la meilleure option pour le président de la République. Toutefois, il estime que l’Éducation nationale perd un potentiel bon ministre.

EPOCH TIMES – Gabriel Attal a été nommé ce mardi 9 janvier Premier ministre. Il succède à Elisabeth Borne. Que vous inspire l’arrivée du désormais ex-ministre de l’Éducation nationale à Matignon ?

ARTHUR DE WATRIGANT – Je pense que c’est le meilleur choix que pouvait faire Emmanuel Macron. Il est le seul ministre à bénéficier d’une cote de popularité élevée. Tout le monde a commencé à parler de son ascension fulgurante, ce qui est vrai.

Néanmoins, il ne faut pas oublier que Gabriel Attal reste un apparatchik au parcours classique, qui a fait ses classes au PS.
Il a fait une entrée fulgurante en début d’année, à tel point qu’il a coupé l’herbe sous le pied à Gérald Darmanin, qui lui aussi cherchait à devenir Premier ministre. D’ailleurs, Gabriel Attal lui était déjà passé devant dès la rentrée de septembre an adoptant des positions fortes, assez éloignées du « en même temps » macronien mais surtout à l’opposé total de Pap Ndiaye. Des positions conservatrices dignes des élus LR, que ce soit sur les questions de civilisation, l’abaya, mais aussi l’école.

Par exemple, quand il dit qu’il veut mettre fin au collège unique, il envoie un message fort. On ne s’attendait à ce qu’il aille aussi loin. Ce sont des annonces, mais à sa décharge, il n’a pas eu le temps de tout mettre en place. Il n’est resté que six mois au ministère de l’Éducation nationale. Et, nous savons qu’à notre époque, la communication est plus importante que les actes. Mais je ne vais pas lui faire de procès d’intention. L’Éducation Nationale est un mammouth très compliqué à faire bouger. Il y a des résistances partout. Peut-être qu’il n’aurait pas pu tout faire non plus s’il en avait eu la réelle volonté.

Son profil et son parcours diffèrent de ceux d’Élisabeth Borne. Faut-il s’attendre à un changement de style, mais aussi à un changement sur le fond ?

Un changement de style, de toute évidence. Avec Élisabeth Borne, on avait l’impression d’avoir affaire à une espèce de robot. Dans sa manière de parler, l’intonation et la sémantique utilisée, nous étions vraiment dans une parodie de la technocrate. Gabriel Attal a pour lui, son expérience de porte-parole avec laquelle il a pu faire ses armes. On voit qu’il est plus à l’aise que sa prédécesseure, il sait choisir les mots et l’intonation. Sur le fond, il y a également un changement avec des positions plus fermes sur l’école.

Toutefois, l’école est la première victime de ce remaniement. On enlève quelque chose qui pouvait peut-être marcher. Emmanuel Macron se prive et prive l’Éducation nationale d’un ministre populaire, qui avait l’air audacieux, pragmatique et prêt à bouleverser tous les dogmes progressistes qui existent depuis plus de 50 ans et qui ont détruit l’instruction publique.

Le mandat et demi d’Emmanuel Macron a montré que c’était un président hyper présidentiel qui a toujours raisonné et imaginé les choses d’un point de vue descendant. C’est lui qui décide et les autres appliquent le « en même temps ». C’est soit un coup de barre à droite, soit un coup de barre à gauche. On voit bien que ce sont les sondages qui ont fait la nomination de Gabriel Attal. C’est parce qu’il est haut et populaire qu’il a été nommé.

Gabriel Attal est âgé de 34 ans. Il est le plus jeune Premier ministre de l’histoire moderne. Selon vous, cela peut-il constituer sur le moyen ou long terme un obstacle ou au contraire un avantage pour lui ?

Ça va être compliqué à l’intérieur de son gouvernement. Nous le savons très bien avec les entreprises qui ont fait l’expérience. Quand un chef plus jeune arrive, il doit se montrer malin et délicat pour manager des personnes qui sont plus âgées, qui ont plus d’expérience. C’est la réalité dans n’importe quelle entreprise. Et si vous ajoutez à ça les egos qui sont énormes en politique, avec en ligne de mire l’élection présidentielle de 2027, c’est un véritable cadeau empoisonné pour lui.

Aucun Premier ministre, n’est sorti avec une cote de popularité plus importante que celle avec laquelle il est rentré. Ça n’existe pas. Souvenez-vous de Manuel Valls. Quand il a été nommé à Matignon, il était très populaire. Aujourd’hui, il n’est presque plus rien. La chute a été très rapide et très rude pour lui.

Selon un sondage Harris interactive pour LCI, 56 % de la population fait confiance à Gabriel Attal. Comment analysez-vous cette popularité ? Son passage au ministère de l’Éducation nationale a été bref. Certains l’expliquent par le fait qu’il n’est pas dans le « en même temps ».

C’est précisément parce que son passage au ministère de l’Éducation nationale a été bref et que nous en sommes restés uniquement sur des déclarations de bons sens, partagées par la majorité des gens que sa popularité est élevée. Il n’a pas eu le temps d’avoir un bilan à son actif. Et tout le monde sait très bien que le problème de l’école et les solutions à mettre en œuvre correspondent aux propos de Gabriel Attal. Il a, au moins, eu le courage de dire les choses, ce qui est assez rare en politique.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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