La Chine commence la guerre des monnaies – quelle est la prochaine étape ?

La Chine permet la dévaluation du yuan en réponse aux nouveaux tarifs douaniers de Trump

Par James Gorrie
19 août 2019 21:47 Mis à jour: 19 août 2019 21:47

Est-ce que la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine s’est transformée en guerre des monnaies ? C’est bien ce qu’on dirait. Pour la première fois depuis la grande récession de 2008, la valeur du yuan est tombée sous le ratio de 7:1 par rapport au dollar. Cette dévaluation provoquée par la politique gouvernementale constitue une réponse très importante de la Chine et peut avoir diverses conséquences.

Manipulateur de monnaie

Cette dévaluation a incité l’administration Trump à qualifier officiellement la Chine comme un manipulateur monétaire, ce qui a immédiatement entraîné de lourdes pertes sur le marché boursier. Cette décision peut être justifiée ou non, car la Chine manipule le yuan depuis des années, mais dans le sens opposé. Le yuan chinois n’est pas négocié sur les marchés comme les autres devises. Au contraire, sa valeur est soigneusement contrôlée – c’est-à-dire manipulée – par la Banque populaire de Chine (BPC) pour être négociée à l’intérieur d’une étroite marge de fluctuation de 2 % à la hausse ou à la baisse de son taux officiel.

De toute façon, les tarifs douaniers ont tendance à affaiblir la valeur d’une monnaie, car ils affaiblissent l’économie derrière cette monnaie. Il convient de noter que ce n’est que lorsque la BPC a cessé de soutenir le yuan et l’a laissé « flotter » sur le marché que sa valeur par rapport au dollar a chuté. C’est le marché qui a forcé cette dévaluation, pas la banque centrale.

La Chine l’a admis dans sa déclaration qui accompagnait la dévaluation, affirmant que la BPC « a accumulé une riche expérience et des outils politiques et qu’elle continuera d’innover et d’enrichir les mesures de contrôle ainsi que de prendre les mesures nécessaires et ciblées contre les réactions positives qui peuvent se produire sur le marché des changes ».

La dévaluation a été anticipée

La décision de dévaluer le yuan fait suite à la décision de Donald Trump d’imposer éventuellement des droits de douane sur les 300 milliards de dollars additionnels de produits chinois importés aux États-Unis, principalement des biens de consommation qui avaient été exclus lors des précédentes impositions tarifaires américaines. Cela signifie que tout ce que la Chine exporte vers les États-Unis serait éventuellement taxé, ce qui rendrait les produits chinois moins compétitifs et nuirait à l’économie chinoise déjà en déclin.

Laisser le yuan se dévaluer par le biais des forces du marché a été une réaction attendue. Un yuan moins élevé par rapport au dollar aide la Chine à compenser les tarifs douaniers de Trump en abaissant le coût des produits chinois.

Cependant, la décision de la Chine de dévaluer sa monnaie pourrait avoir des répercussions importantes sur ses relations déjà tendues avec les États-Unis. Cela donne l’impression que les dirigeants chinois ont pratiquement abandonné l’idée d’essayer de désamorcer la guerre commerciale avec Trump. Il semble plutôt qu’ils copient l’approche intransigeante de Trump à l’égard des négociations. Cela n’augure rien de bon pour les relations économiques entre les États-Unis et la Chine au cours des deux prochaines années.

Coûts politiques et économiques pour Xi Jinping et Donald Trump

Un tel calcul du régime chinois a du sens. Sur le plan politique, Donald Trump se trouve désormais dans une position plus difficile que le dirigeant chinois Xi Jinping, car il fait face aux élections présidentielles américaines en 2020, alors que le régime chinois n’autorise pas les élections. La réaction négative des marchés boursiers à la dévaluation de la monnaie chinoise rend plus difficile la tâche de Trump d’être réélu.

De plus, si la dernière série de droits de douane sur les biens de consommation chinois est appliquée, le consommateur américain pourrait le ressentir au niveau de son portefeuille à mesure que les prix augmentent. En même temps, le refus de la Chine de procéder à des achats convenus de produits agricoles américains vise à frapper durement les producteurs américains. Tout cela pourrait éventuellement nuire aux efforts de Trump d’être réélu en 2020.

Cela pourrait bien être le but de la Chine. Attendre pour voir si Trump est remplacé en 2020 a probablement été un facteur important dans la décision de dévaluation prise par le dirigeant chinois. Si tel est le cas, la Chine risque cependant d’être déçue.

Une monnaie dévaluée nuit au peuple chinois et entraîne la fuite des capitaux ainsi que la perturbation des marchés, ce qui nuit également à l’économie chinoise. Le régime chinois a déjà dû renflouer trois petites banques cette année, ce qui n’est pas une coïncidence.

La Réserve fédérale américaine réagira à la guerre commerciale

En réponse à la dévaluation du yuan, la Réserve fédérale a déjà indiqué qu’elle abaisserait encore les taux d’intérêt si les conditions économiques l’exigeaient. Les subventions agricoles américaines sont aussi une possibilité, car elles ont déjà été utilisées pour compenser la perte du marché chinois du soja par les agriculteurs américains. En d’autres termes, l’impact du premier coup de feu de la Chine dans une guerre monétaire pourrait ne pas être aussi efficace et rapide qu’elle le voudrait.

Pourtant, le cycle de mesures de rétribution ne s’arrêtera probablement pas là. La Chine viole son engagement envers le G20 de ne pas s’engager dans une « dévaluation compétitive ». C’est précisément ce que le régime chinois fait et ce n’est pas aussi intelligent qu’il le pense. Un yuan bon marché nuit non seulement aux producteurs américains, mais aussi aux autres principaux partenaires commerciaux de la Chine, comme l’Union européenne et le Japon.

Les tarifs sont à la fois un moyen tactique et stratégique

Sur le plan tactique, les droits de douane sur les produits chinois visent à amener la Chine à modifier son comportement commercial. Les pièges de la dette chinoise dans le cadre de son gigantesque programme de la nouvelle route de la soie, ses logiciels espions Huawei largement répandus, le vol de technologie et de propriété intellectuelle ainsi que d’autres pratiques qui donnent au régime chinois des avantages commerciaux injustes, tout cela représente ce à quoi veut mettre fin Donald Trump. En outre, la Chine doit tenir sa promesse d’ouvrir son marché aux entreprises occidentales.

Il est peu probable que la Chine ait des plans pour changer fondamentalement le comportement qui a conduit à la montée en puissance de son régime. Sa décision de dévaluer le yuan vise à changer l’attitude de l’administration Trump envers l’utilisation des tarifs douaniers contre les importations chinoises. Même la décision de la Chine de modérer la dévaluation de sa monnaie ne signifie pas qu’elle va changer sa politique, car elle ne peut le faire sans affaiblir l’emprise du Parti communiste chinois (PCC) sur le pouvoir. Il est bien compréhensible que la Chine souhaite revenir au statu quo ante.

Mais cela n’arrivera pas.

Du point de vue structurel, les tarifs douaniers nuisent beaucoup plus à la Chine qu’aux États-Unis, du moins à court terme. Mais d’un point de vue stratégique, la guerre commerciale sino-américaine a pour objectif d’amorcer et d’accélérer la disparition de l’économie planifiée chinoise et du pouvoir du PCC. Pour ces deux raisons, il est probable que cette guerre commerciale s’intensifiera.

James Gorrie est un écrivain texan. Il est l’auteur du livre The China Crisis.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

Soutenez Epoch Times à partir de 1€

Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?

Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.