Comment l’UE contribue à aggraver la crise énergétique

Par ÉLODIE MESSÉANT
15 février 2023 15:09 Mis à jour: 15 février 2023 15:09

Taxation des superprofits, nationalisation d’EDF ou encore bouclier tarifaire accordé aux petites entreprises, les propositions pour contrer les effets de la crise énergétique sont nombreuses. Loin de s’attaquer à la racine du problème, ces solutions court-termistes occultent le fait que la crise que nous traversons est, en partie, imputable à certaines politiques énergétiques de l’UE.

Un marché européen de l’électricité étouffé par la réglementation…

Les causes de la crise énergétique sont multiples et complexes. Raison pour laquelle il est important de revenir à la racine du problème, et de rappeler le fonctionnement du marché européen de l’électricité. Lancé en 1996, ce marché – et plus particulièrement le marché de gros – est fortement encadré par l’UE et par 25 autres cadres nationaux. Le règlement de l’Union européenne 2015/1222 contrôle les prix selon le principe de la tarification marginale, lequel prévoit « des prix maximaux et minimaux harmonisés à appliquer dans toutes les zones de dépôt des offres », ainsi qu’un prix identique « pour chaque zone de dépôt des offres et pour chaque unité de temps du marché ».

Problème : sur le marché de gros, le prix de l’électricité repose sur le prix moyen de la dernière centrale électrique (le plus souvent, des centrales à gaz). Un système censé favoriser les énergies renouvelables, mais la moindre tension d’approvisionnement en gaz risque de se répercuter sur l’ensemble des prix de l’énergie. Par conséquent, plusieurs États membres de l’UE ont été contraints d’appeler à une réforme structurelle afin de plafonner les prix du gaz, et rendre les prix de l’électricité moins dépendants. Des pays comme l’Espagne et le Portugal ont obtenu une dérogation exceptionnelle pour fixer eux-mêmes leurs prix, et ainsi soulager la facture des ménages et des industries. Si la guerre en Ukraine n’arrange rien, il ne fait alors aucun doute que les tensions du côté de l’offre sont liées à cette réglementation.

… et fragilisé par les politiques « écologistes » de l’UE

Outre l’excès de règlements qui affecte le marché de l’électricité, un autre facteur contribue à aggraver la crise énergétique en Europe. Après la catastrophe de Fukushima en 2011, et sous la pression d’un certain activisme écologiste, la part du nucléaire a été progressivement réduite dans de nombreux pays européens, au profit d’énergies renouvelables intermittentes. En Allemagne surtout, mais aussi en France, grand producteur et exportateur historique d’électricité. Des énergies intermittentes qui évidemment, tout le problème est là, nécessitent que d’autres sources d’électricité continuent à fonctionner en parallèle pour assurer l’approvisionnement énergétique (comme le gaz), et éviter tout risque de black-out.

Ceux qui ont sabordé le nucléaire semblent ne pas avoir assez considéré certaines conséquences potentiellement néfastes. Le marché européen de l’électricité étant interconnecté, l’obsession du « tout renouvelable » de l’UE n’a fait qu’accroître la dépendance au gaz russe et au régime de Poutine. Certes, les prédictions alarmistes d’un hiver sans électricité ne se sont pas réalisées, mais les ménages et les entreprises ont subi une hausse fulgurante des prix de l’énergie et des matières premières. Là encore, les effets de la crise énergétique auraient certainement pu être atténués si le parc nucléaire en Europe n’avait pas été sabordé pour des motifs idéologiques, et si une énergie abondante et pilotable avait été disponible en plus grandes quantités.

Le déni des bureaucrates bruxellois

Des erreurs stratégiques qui ne semblent pas faire réagir Bruxelles : le Conseil européen persiste à s’engouffrer dans des politiques irréalistes en portant son objectif à 40 % d’EnR d’ici 2030 (au lieu de 32 % initialement), et l’accélération du déploiement d’énergies renouvelables continue d’être présentée comme une proposition sérieuse par le commissaire européen à l’Énergie. La guerre en Ukraine a pourtant démontré qu’une telle politique ne permettra pas d’aboutir à une énergie fiable, abondante et bon marché ; et encore moins d’atteindre la neutralité climatique d’ici 2050. Sans parler du fait qu’elle place l’Europe sous le joug de la Chine pour les décennies à venir.

L’absurdité de la situation est telle que la Commission européenne préfère financer le coût de certaines politiques écologiques plutôt que de les suspendre ou de les annuler purement et simplement. L’exemple du système d’échange de crédits carbone (SEQE) est particulièrement probant. En raison de la hausse des coûts de l’énergie qu’il impose pour les entreprises européennes, des pays comme l’Espagne ont été contraints de mettre en place un régime d’aides d’État de 2,9 milliards d’euros pour compenser et éviter ainsi une « fuite de carbone » (des délocalisations massives).

Tout cela pour rien : en 2020, les États-Unis sont parvenus à faire passer la part de l’énergie fossile dans leur consommation primaire d’énergie de 85,7 à 80 % – soit quasiment la même réduction que celle qu’ont obtenue les Allemands, sans avoir recours aux très onéreux objectifs de l’Energiewende. Et pendant que le citoyen américain paye (en 2019 et en moyenne) 13 US cents pour un kWh, le citoyen français débourse 22 cents pour le même KWh, contre 34 cents pour son collègue allemand.

En réalité, une politique énergétique responsable encouragerait davantage l’innovation et ferait confiance à des solutions de marché libre – bien plus qu’à la surréglementation, au contrôle des prix et aux subventions de sources d’énergies peu fiables.

Article écrit par Elodie Messéant avec l’aimable autorisation de l’IREF.

L’IREF est un « think tank » libéral et européen fondé en 2002 par des membres de la société civile issus de milieux académiques et professionnels dans le but de développer la recherche indépendante sur des sujets économiques et fiscaux. L’institut est indépendant de tout parti ou organisation politique. Il refuse le financement public.

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