Des pays établissent un corridor économique Inde-Moyen-Orient-Europe pour contrer «la Ceinture et la Route» de la Chine

Le sommet du G20 de la semaine dernière a annoncé la création d'un "corridor économique Inde-Moyen-Orient-Europe" pour contrer la BRI.

Par Alex Wu
19 septembre 2023 12:29 Mis à jour: 19 septembre 2023 12:29

Un projet ferroviaire et portuaire multinational censé relier l’Inde au Moyen-Orient et à l’Europe, présenté en réponse au projet d’infrastructure chinois «la ceinture et la route» (« Belt and Road » – BRI), a été mis en place lors du récent sommet du G20 à New Delhi.

Le projet de corridor économique Inde-Moyen-Orient-Europe (IMEC : India–Middle East–Europe Economic Corridor) a été ratifié par l’Inde, les États-Unis, l’Union européenne, la France, l’Allemagne, l’Italie, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis.

Selon les documents du projet, l’IMEC devrait se composer de deux corridors distincts : un corridor oriental reliant l’Inde et le golfe Persique, et un corridor septentrional rattachant le golfe Persique à l’Europe. L’objectif est de faire contrepoids à la BRI, critiquée pour avoir créé des pièges à dettes et permis l’influence politique du régime communiste chinois sur les pays participants.

L’objectif de l’IMEC est d’établir un réseau navire-rail « fiable et rentable » entre l’Inde, les Émirats arabes unis, l’Arabie saoudite, la Jordanie, Israël et l’Europe. Les pays partenaires ont l’intention de poser des câbles électriques et des câbles numériques le long de la ligne ferroviaire, mais également des pipelines d’hydrogène propre, comme annoncé.

Le corridor économique permettra de transporter des marchandises de l’Inde vers la côte Est des Émirats arabes unis, puis vers le port israélien de Haïfa par voie ferroviaire, et enfin vers l’Europe depuis Haïfa par voie maritime. À l’exception d’un petit tronçon de chemin de fer qui sera construit par l’Arabie saoudite, l’ensemble du corridor a été achevé et pourrait être mis en service dans un avenir proche. Si le gouvernement militaire birman autorise la construction d’un port réservé à l’IMEC, le corridor pourrait s’étendre à des pays comme le Vietnam, la Thaïlande, la Birmanie (également connue sous le nom de Myanmar) et le Bangladesh.

L’IMEC pour contrer la BRI

La région pourrait ne pas avoir un volume d’échanges suffisant pour permettre au nouveau corridor économique et à la BRI de fonctionner simultanément, ce qui les mettrait en concurrence directe, selon les analystes.

Les États-Unis ont joué un rôle de premier plan lors des négociations relatives à la création de l’IMEC pour faire face à la BRI, dont l’endettement croissant a nui aux économies des pays participants. Le lancement du nouveau corridor économique marque également le retour de Washington au Moyen-Orient.

La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, le premier ministre canadien Justin Trudeau, le président américain Joe Biden, le Premier ministre britannique Rishi Sunak, le président français Emmanuel Macron et le chancelier allemand Olaf Scholz arrivent pour la photo de famille au sanctuaire d’Itsukushima lors du sommet du G7 à Hiroshima, au Japon, le 19 mai 2023. (Stefan Rousseau – Pool/Getty Images)

L’IMEC « n’est rien de moins qu’historique », a souligné la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. « Il s’agira de la liaison la plus directe à ce jour entre l’Inde, le golfe Persique et l’Europe : une liaison ferroviaire qui accélérera de 40% les échanges commerciaux entre l’Inde et l’Europe. »

Le corridor place l’Inde au centre des flux commerciaux entre l’Asie du Sud-Est, le Moyen-Orient et l’Europe, ce qui représente une formidable opportunité pour l’Inde et le Moyen-Orient d’accélérer leur développement économique, et pour l’Europe de diversifier ses principales chaînes d’approvisionnement en s’éloignant de la Chine.

Lors du sommet du G20, le Premier ministre indien Narendra Modi a également fait remarquer que l’IMEC favoriserait la viabilité financière plutôt que d’alourdir le fardeau de la dette, et qu’elle respecterait les normes écologiques et la souveraineté territoriale des pays partenaires – des facteurs qui ont été soulignés pour la distinguer de l’initiative chinoise « la BRI ».

Le projet a débuté après plusieurs réunions tenues secrètes entre l’Inde, les Émirats arabes unis et les États-Unis, et avec le soutien total du prince héritier saoudien, avant d’être rejoint par l’Italie, l’Allemagne et la France.

L’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et l’Italie ont rejoint la BRI au cours des années précédentes et sont désormais trois membres fondateurs de l’IMEC, tandis que la Première ministre italienne, Giorgia Meloni, souhaite se retirer de la BRI.

Des ouvriers chinois rentrent chez eux après avoir travaillé dans un nouveau centre commercial appelé The Mall at One Galle Face, qui fait partie du complexe commercial et de bureaux Shangri-La géré par la Chine à Colombo, au Sri Lanka, le 10 novembre 2018. (Paula Bronstein/Getty Images)

Bien que la BRI – le grand projet international lancé il y a dix ans par le dirigeant communiste chinois Xi Jinping – a été présentée par la Chine comme étant axée sur l’économie, au fil du temps, les pays membres ont de plus en plus réalisé qu’il s’agissait d’un outil utilisé par le Parti communiste chinois (PCC) pour remodeler l’ordre mondial, conquérir les pays du Sud et exporter le modèle de gouvernance du PCC.

« La BRI fait venir de Chine la main-d’œuvre, les ressources et les équipements au lieu d’utiliser les ressources locales, mais elle utilise des fonds locaux pour son développement, » a expliqué Zhong Zhidong, chercheur adjoint à l’Institut de stratégie et de ressources de défense nationale de Taïwan à Epoch Times. « Il s’agit d’une forme d’exploitation économique [des pays hôtes et de leur population]. »

L’économiste américain Davy Wong souligne la différence entre les deux groupes économiques et politiques : L’IMEC se compose de pays bénéficiant de l’influence européenne et américaine, tandis que la BRI regroupe des pays soumis à l’influence politique de Pékin.

« L’IMEC se concentre davantage sur l’aspect économique, comme le transport ferroviaire, certaines exemptions tarifaires, etc. La BRI porte plutôt sur l’investissement direct dans des projets, comme l’exploitation de mines et la construction d’installations publiques telles que des chemins de fer, des docks, des aéroports, des écoles, des hôpitaux, et davantage d’investissements directs dans la construction d’infrastructures, » a expliqué M. Wong.

« L’IMEC estime que la géopolitique, les valeurs communes et le système juridique auront la priorité sur les intérêts économiques ; la BRI vise davantage à être en accord avec l’orientation politique de Pékin. La BRI représente l’exportation par Pékin de ses capacités de production excédentaires et de ses capitaux vers le monde, ainsi que son influence sur tous les aspects des relations diplomatiques. La BRI est donc davantage synonyme de montée en puissance de l’influence de Pékin, qui entend changer les règles du jeu dans le monde. »

Song Guocheng, chercheur au Centre de recherche sur les relations internationales de l’Université nationale Chengchi, a indiqué à Epoch Times qu’il pensait que la BRI n’était pas viable. En termes d’investissements chinois, il estime que l’initiative a perdu plus de deux tiers de sa valeur par rapport à son apogée.

« Il y a deux raisons principales », a expliqué M. Song à Epoch Times. « La première est que la capacité de ces pays bénéficiaires à rembourser leurs dettes est relativement faible. Le PCC a investi dans ces pays parce qu’il veut surtout développer sa propre influence géopolitique. D’autre part, l’économie chinoise, actuellement en perte de vitesse, ne peut plus se le permettre. »

Song Tang et Yi Ru ont collaboré à cet article.

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