ENTRETIEN – Rebondissement dans l’affaire Nahel Merzouk. Le 3 juin, les juges d’instruction ont décidé de renvoyer le policier Florian M. devant la Cour d’assises pour meurtre. L’avocat du fonctionnaire de police, maître Laurent-Franck Liénard, a fait appel de la décision.
Éric Henry est délégué national Alliance Police nationale. Cette décision de justice est inacceptable pour le syndicaliste qui estime que son collègue n’avait pas d’autre choix que de faire usage de son arme, le 27 juin 2023.
Epoch Times : Le 3 juin, les juges d’instruction ont décidé de renvoyer Florian M. devant la Cour d’assises pour meurtre. Comment le syndicat Alliance Police nationale a-t-il réagi ?
Éric Henry : Nous sommes scandalisés par cette décision. Renvoyer notre collègue devant la Cour d’assises pour meurtre revient à faire de lui un assassin. C’est gravissime. Un policier ne se lève pas le matin avec l’intention d’ôter la vie à qui que ce soit.
Par ailleurs, je suis assez surpris par la rapidité de l’instruction diligentée par les juges. Elle a été menée en moins de deux ans, alors qu’habituellement, une instruction dure en moyenne quatre ou cinq ans.
Et celle-ci a fait l’objet de multiples expertises et contre-expertises contradictoires.
Les experts ont estimé que notre collègue n’était pas en situation de « danger imminent » tout en reconnaissant que Nahel Merzouk avait effectué quatre actions successives pour redémarrer le véhicule. Autrement dit, il a volontairement redémarré la voiture.
Dans l’ordonnance que l’AFP a pu consulter, les magistrats ont estimé que « rien ne démontre que Florian M. était autorisé dans la circonstance à faire usage de son arme, en méconnaissance des principes de proportionnalité et d’absolue nécessité ». Qu’en pensez-vous ?
Nahel Merzouk conduisait un bolide, roulait à 116 km / heure, a failli écraser des piétons et un cycliste et poursuivait son chemin. Il avait un comportement criminel.
Notre collègue a donc fait usage de son arme parce qu’il n’avait pas d’autre choix pour le stopper et que sa vie était mise en danger.
Et encore une fois, les experts ont conclu que Nahel Merzouk avait volontairement redémarré le véhicule. S’il ne s’agit pas d’absolue nécessité dans ce cas, je ne sais pas ce que c’est.
Ce renvoi devant la Cour d’assises est donc injustifié et inacceptable.
Je sais que certains vont affirmer que notre collègue va « bénéficier » d’un jury populaire à la Cour d’assises, mais cela n’est pas un gage de qualité du jugement quand on sait l’influence que pourraient avoir – par leur expérience, leur idéologie et leur rhétorique -, des magistrats professionnels sur des citoyens tirés au sort peu habitués au monde de la justice.
Je ne cherche en aucun cas à remettre en cause l’institution judiciaire. Alliance est un syndicat républicain, mais j’estime être en droit de me poser des questions quand on sait qu’un tiers des magistrats sont des sympathisants du très politisé Syndicat de la Magistrature.
Cette décision risque-t-elle d’affecter le moral des fonctionnaires de police dans leur quotidien ?
Ces faits dramatiques ne sont malheureusement pas sans conséquences. Ce n’est pas anodin de voir un collègue être renvoyé devant une Cour d’assises pour meurtre.
Puis, comme je le disais, la société doit comprendre qu’un policier est là pour protéger et que s’il doit, parfois, faire usage de son arme, c’est avant tout pour se protéger lui-même et autrui.
Mais vous savez, les policiers sont systématiquement mis en accusation. Si mon collègue avait laissé Nahel Merzouk partir, on lui aurait reproché son inaction. Il a finalement utilisé son arme. Vous connaissez la suite…
Il a été jeté en pâture à l’opinion publique, un média local a donné son nom et son adresse et des responsables politiques ont instrumentalisé l’affaire.
Il n’a, par ailleurs, bénéficié d’aucune protection juridique et a été placé quatre mois en détention provisoire alors qu’il a une famille à nourrir.
Dans ce contexte, ne soyons pas surpris par le nombre croissant des démissions dans les rangs de la police depuis plusieurs années.
La pétition lancée par l’Institut pour la Justice réclamant l’acquittement du policier a dépassé les 200.000 signatures en quelques jours. Que traduit ce soutien de la population ?
Ce soutien populaire à notre collègue est révélateur d’un ras-le-bol. Les Français ne supportent plus de voir la criminalité du quotidien exploser et appellent à un changement complet de logiciel, notamment un choc d’autorité.
Avez-vous prévu de poursuivre la mobilisation sur l’ensemble du territoire ?
Pour l’heure, rien n’est exclu. Mais malheureusement, nous sommes très souvent cloués au pilori.
En réaction aux émeutes de juin 2023, nous avions appelé au combat contre les « nuisibles » dans un communiqué. Ce qui nous avait valu d’être qualifiés d’irresponsables voire de nationalistes alors que ce terme n’a aucune connotation « sombre ».
Même chose quand nous avons osé parler du contact tactique pour lutter contre les refus d’obtempérer. Certains nous sont tombés dessus.
Cette méthode est pourtant utilisée à Londres et au Pays de Galles et est très bien encadrée. Je ne crois pas que le Pays de Galles et la capitale britannique soient en proie à une dérive autoritaire.
Néanmoins, je suis heureux de constater qu’aujourd’hui, certains politiques français commencent à en parler.
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