La gauche américaine a permis au régime communiste cubain de voir le jour, explique Orlando Gutierrez-Boronat

Cuba sert de tremplin pour propager le socialisme en Amérique latine et aux États-Unis

Par Ella Kietlinska & Jan Jekielek
18 février 2023 15:26 Mis à jour: 18 février 2023 15:26

La gauche américaine a joué un rôle important dans l’émergence du régime communiste à Cuba en planifiant, préparant et couvrant les médias pour faire de Cuba le principal moteur de propagation du socialisme aux États‑Unis et en Amérique latine, déclare Orlando Gutierrez‑Boronat, cofondateur et porte‑parole du Directorio democratico cubano, une organisation basée aux États‑Unis qui soutient les droits de l’homme à Cuba.

M. Gutierrez‑Boronat est également un auteur récompensé, conférencier à l’université de Georgetown et un leader communautaire. Il est titulaire d’un doctorat en Philosophie des relations internationales.

Une crise institutionnelle et politique dans les années 1950 à Cuba – lorsqu’un gouvernement militaire a pris le contrôle du pays – a conduit à une insurrection, explique M. Gutierrez‑Boronat pour American Thought Leaders d’EpochTV, dans une interview accordée le 28 janvier.

« Ensuite, Castro et ses acolytes ont pris le contrôle du pays avec le soutien important des libéraux américains comme vous pouvez l’imaginer. »

En 1952, Fulgencio Batista, voyant que ses chances de remporter l’élection présidentielle à Cuba s’amenuisaient après être arrivé troisième dans les sondages, a organisé un coup d’État militaire, devenant ainsi dictateur de Cuba.

Un an plus tard, Fidel Castro, avocat à la tête d’un petit groupe de révolutionnaires, a lancé une rébellion contre Batista qui a abouti au renversement de l’impopulaire dictateur en 1959. Après avoir pris le pouvoir, Castro a imposé le socialisme à Cuba en mettant en place un programme radical de réforme agraire et de nationalisation industrielle.

Un tremplin pour le socialisme

Il est très clair selon les écrits de Che Guevara que l’objectif de la révolution cubaine était de créer une plateforme permettant à la révolution socialiste de se propager aux États‑Unis et en Amérique latine, poursuit M. Gutierrez‑Boronat.

Véritable révolutionnaire marxiste argentin, Guevara a joué un rôle de premier plan dans la révolution dirigée par Castro.

Fidel Castro s’adressant au peuple cubain pour célébrer le triomphe de la révolution cubaine, le 4 janvier 1959. (Hulton Archive/Getty Images)

« Castro était entouré de conseillers internationaux » qui l’ont aidé à concevoir un État totalitaire, ajoute le militant.

« Par une combinaison de planification et de préparation menée par le Parti communiste cubain, le Parti communiste américain, et d’autres forces de gauche, une opportunité s’est présentée, Cuba est devenu une force pour le socialisme en Amérique latine. »

Dès le début, le régime castriste a voulu prendre le contrôle du Venezuela, et Cuba a soutenu une invasion armée du Venezuela en 1967.

« La même chose s’est répétée dans des pays stratégiques que [Cuba] considérait comme indispensables pour créer les républiques socialistes unies d’Amérique latine, et bien sûr, pour provoquer également des tensions sociales, la lutte des classes et la transformation radicale des États‑Unis. »

« Ce plan a toujours existé. Il a toujours fait partie de ce que le régime – et ils ne l’ont pas caché longtemps – disait vouloir mettre en place. »

M. Gutierrez‑Boronat cite Herbert Marcuse, le célèbre penseur marxiste de l’école de Francfort ayant rejoint l’université de Columbia. Dans son livre « Vers la Libération », Marcuse affirme clairement « que la révolution cubaine était nécessaire pour le développement du socialisme aux États‑Unis ».

« Le régime cubain, depuis sa prise de pouvoir, a été un lieu de formation de militants de gauche américains, d’endoctrinement, de création de cellules clandestines et de réseaux d’espionnage aux États‑Unis. Dans toute la région, il facilitait tout type d’activités qui s’opposaient aux projets des États‑Unis et subvertissaient les démocraties », explique M. Gutierrez‑Boronat.

Comment les médias ont construit l’image de Castro

Fidel Castro et Che Guevara, au début de leur campagne de guérilla dans les montagnes de la Sierra Maestra vers 1956. (Hulton Archive/Getty Images)

Les médias ont joué un rôle majeur dans la construction de l’image de Castro aux États‑Unis. Par exemple, le journaliste du New York Times Herbert Matthews a été « un acteur central dans la construction du mythe de Castro ».

Deux ans avant l’arrivée au pouvoir de Castro, Matthews s’est rendu dans les montagnes de la Sierra Maestra à Cuba, où Castro organisait un mouvement de guérilla contre le dictateur cubain et président de l’époque, Batista.

Castro était suivi par 20 personnes seulement, mais Matthews laissait entendre au public américain qu’il disposait déjà d’une armée de plusieurs centaines de personnes.

« Quelques mois après son accession au pouvoir en 1959, Castro s’est rendu aux États‑Unis, où il a été présenté comme un réformateur démocratique, anticommuniste et pro‑américain. Tout cela était faux. Ils étaient déjà en train de construire un État communiste à Cuba. »

La couverture de Castro par Matthews, ainsi que la visite de Castro aux États‑Unis, ont permis de détourner l’attention du public de ce que la gauche faisait réellement à Cuba.

Lors de son voyage aux États‑Unis, Castro a déclaré aux médias américains : « Je l’ai dit le plus clairement possible : nous ne sommes pas des communistes. »

Castro a également affirmé à cette époque dans une interview à la CBC :  « Notre opinion est que (…) tout le monde a le droit de penser comme il veut et c’est un principe démocratique. Nous n’avons aucune raison d’interdire toute sorte d’opinion, l’opinion est un principe démocratique, et c’est la seule raison pour laquelle nous n’interdisons aucune idée. »

« Nous n’avons pas peur d’une idée parce que nous avons notre idée, et nous croyons en notre idée », a ajouté Castro.

Deux ans plus tard seulement, Castro a finalement admis dans un discours télévisé : « Je suis marxiste‑léniniste et je le serai jusqu’à la fin de ma vie. »

Réparer l’image du socialisme

« En 1959, Khrouchtchev avait révélé les crimes de Staline lors du congrès du Parti communiste. L’invasion [soviétique] de la Hongrie en 1956 avait eu lieu, de même que l’écrasement des grèves ouvrières en Allemagne de l’Est. Tout cela était dans l’air. Les gens ont vu à quel point le communisme était répressif. »

« [À l’époque,] la gauche avait besoin d’une révolution socialiste réussie qui ne soit pas entachée par la mauvaise réputation que le stalinisme avait déjà acquise à travers le monde. »

« Puis est arrivée cette révolution dans un pays tropical avec des leaders charismatiques promettant l’utopie et le paradis pour les Cubains. Ils ont commencé à construire tout ça dès le début. »

Le célèbre discours secret, prononcé en février 1956 par le dirigeant soviétique de l’époque, Nikita Khrouchtchev, dénonçait les crimes de son prédécesseur Josef Staline et a déclenché une série de mouvements populaires dans les pays d’Europe de l’Est dominés par l’Union soviétique.

En juin 1956, des manifestations ont éclaté en Pologne. Les dirigeants communistes polonais ont utilisé des chars pour réprimer le mouvement.

C’est en Hongrie, au cours de l’automne 1956, qu’ont éclaté les plus graves manifestations réclamant des réformes démocratiques. L’Union soviétique a envahi le pays pour y maintenir sa domination.

Après la mort de Staline en 1953, les travailleurs de l’Allemagne de l’Est communiste s’étaient soulevés pour protester contre les conditions exigées par le gouvernement qui voulait augmenter la productivité. En quelques jours, les manifestations et les émeutes se sont répandues dans tout le pays. Les autorités d’occupation soviétiques ont réprimé les émeutes en utilisant une force militaire massive.

Embargo médiatique sur les manifestations cubaines

Aujourd’hui encore, parce que Cuba est censé être le moteur de la révolution socialiste dans la région, on tente de protéger le régime cubain de toute la mauvaise publicité qu’il s’attire par ses agissements, explique M. Gutierrez‑Boronat. Il évoque les manifestations de masse contre le régime communiste qui ont eu lieu en juillet 2021. Ces manifestations ont été les plus importantes contre le régime depuis des décennies.

Manifestation contre le gouvernement du président cubain Miguel Diaz-Canel à La Havane, le 11 juillet 2021. (Yamil Lage/AFP via Getty Images)

Les manifestants ont protesté contre les violations des droits de l’homme, le manque de liberté et la détérioration de la situation économique du pays dirigé par les communistes.

Depuis lors, « des milliers de Cubains sont sortis pour protester publiquement contre le régime, notamment des jeunes artistes, des femmes, des jeunes, tous réclamant un changement, et exigeant la fin du communisme. »

Les protestations se poursuivent et des centaines de manifestants sont arrêtés et emprisonnés, mais les médias n’en parlent pas. On peut certes voir des enregistrements vidéo des manifestations, mais « il semble qu’un embargo médiatique total règne sur ce qui se passe à Cuba. Les citoyens défient le régime ».

Ces derniers mois, des vidéos et des photographies sont apparues, montrant des familles érigeant des barricades en guise de protestation pour que la police ne puisse pas entrer dans les quartiers. « Du jamais vu à Cuba il y a cinq ans ou trois ans, une nouvelle phase pour la résistance du peuple cubain. »

Les régimes communistes cherchent d’abord à détruire l’économie pour contrôler le peuple. « Pour Cuba, ils ont dû prendre le contrôle et détruire l’agriculture cubaine afin d’avoir la mainmise sur l’approvisionnement alimentaire. »

« Ils ont besoin de contrôler la nourriture pour contrôler les villes, ils ont besoin de contrôler les villes pour contrôler la classe moyenne, la classe moyenne peut s’opposer à eux (…) Une fois les forces de destruction libérées, ils perdront le contrôle. »

« Et c’est ce qui fait avancer l’insurrection. Le régime dispose toujours d’un solide appareil de sécurité qui peut empêcher l’émergence d’un mouvement national unifié, mais il ne peut pas détruire ce mouvement tel qu’il est aujourd’hui : organique, ancré dans les quartiers et les villes, et en train de grandir. »

Pour briser le blocus de l’information sur ce qui se passe à Cuba, M. Gutierrez‑Boronat et d’autres militants participent à des conférences internationales, organisent des manifestations et rencontrent des dirigeants politiques, syndicaux et étudiants pour « faire passer le message ».

« C’est un succès », assure‑t‑il. « Un réseau de solidarité pour un Cuba libre a émergé ces dernières années, et nous y avons grandement contribué. »

Jack Phillips a contribué à cet article.

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