Stratégie spatiale française
« La guerre de demain commencera dans l’espace », prévient Emmanuel Macron
En visite à Toulouse mercredi, le président de la République a inauguré le nouveau Commandement de l'espace et dévoilé la stratégie spatiale française. Face à la militarisation croissante de l'orbite terrestre, Emmanuel Macron a annoncé un investissement de 4,2 milliards d'euros supplémentaire d'ici 2030 et appelé à développer des capacités offensives.

Emmanuel Macron lors d'une visite à la base aérienne 101 pour inaugurer le Commandement spatial français, à Toulouse, le 12 novembre 2025.
Photo: GUILLAUME HORCAJUELO/POOL/AFP via Getty Images
Emmanuel Macron n’a pas mâché ses mots. « L’espace n’est plus un sanctuaire, c’est devenu un champ de bataille », a souligné le chef de l’État mercredi dans les nouveaux locaux du Commandement militaire de l’espace installé depuis l’été dernier à Toulouse, rapporte l’AFP. Le président a présenté la nouvelle stratégie spatiale de la France, construite sur cinq piliers : accès à l’espace, rôle des industriels, capacités stratégiques de défense, science et exploration, et coopération, précise Le Figaro.
Persuadé que « la guerre d’aujourd’hui se joue déjà dans l’espace » et que « la guerre de demain commencera dans l’espace », Emmanuel Macron a insisté sur la nécessité pour la France et l’Europe de défendre avec force leurs positions dans ce secteur. Cette vision tranche avec la conception traditionnelle de l’espace comme zone neutre et pacifique.
Des menaces concrètes et documentées
Le président s’est montré particulièrement explicite sur les dangers identifiés. « Nous vivons l’espionnage, par exemple par la Russie, de nos satellites par des vaisseaux patrouilleurs, les brouillages massifs de signaux GPS, les attaques cyber contre nos infrastructures spatiales, les essais de missiles antisatellites, et le développement d’armes antisatellites à effet de zone contre les constellations », rapporte le site Numerama. Le chef de l’État a également évoqué, sans s’étendre, « la menace russe particulièrement choquante d’armes nucléaires dans l’espace, dont les effets seraient désastreux pour le monde entier ».
« Nos compétiteurs détiennent des capacités d’action dans et vers l’espace, notamment des armes à énergie dirigée », a-t-il ajouté en assurant qu’il ne s’agissait pas « d’hypothèses mais de réalités », d’après Le Figaro.
Le virage vers l’offensive
Cette nouvelle doctrine marque un tournant stratégique. Le général Bellanger, chef d’état-major de l’armée de l’air et de l’espace, avait préparé le terrain la semaine précédente. « Face à la militarisation de l’espace, le temps n’est plus celui des politesses, mais bien des actions offensives », avait-il suggéré jeudi dernier, rapporte Le Figaro.
La nouvelle stratégie spatiale prévoit des capacités permettant de « perturber dégrader, voire neutraliser, si nécessaire, une capacité adverse, dans le respect du droit international et selon une logique de gradation et de proportionnalité ».
À cet égard, le président a annoncé une rallonge de 4,2 milliards d’euros supplémentaires au spatial militaire d’ici 2030 dans le cadre de l’actualisation de la loi de programmation militaire. Ce montant doit aider à « investir dans des moyens d’action depuis le sol et l’espace, en respectant le droit international, mais sans naïveté aucune », a déclaré Emmanuel Macron.
Des capacités spatiales concrètes
Les premiers satellites patrouilleurs français seront lancés en 2027, notamment Orbit Guard et Toutatis, rapporte Numerama. Leur rôle : « surveiller, inspecter et, si nécessaire, contrer les menaces en orbite », a détaillé le chef de l’État. Emmanuel Macron a également mentionné « l’arrivée prochaine des premières capacités d’action vers l’espace », notamment « à base de lasers et de brouilleurs, pour aveugler les satellites adverses ou les empêcher de fonctionner correctement ».
La nouvelle stratégie sera mise en œuvre par le général Vincent Chusseau, nommé cet été commandant de l’espace. « Il s’agira pour nous d’un outil de combat », confie-t-il au Figaro. Le centre sera équipé d’un nouveau système de commandement baptisé Astreos, qui devrait être pleinement opérationnel en 2030. « Le centre permettra la fusion des données venues de nos différents capteurs. Il nous permettra de planifier les opérations spatiales et d’anticiper les manœuvres hostiles adverses », assure-t-il.
L’indépendance stratégique en ligne de mire
Au-delà de la dimension militaire, le président a insisté sur l’autonomie européenne. « Dépendre d’une grande puissance tierce ou d’un quelconque magnat du spatial c’est hors de question », a-t-il martelé selon l’AFP, ajoutant : « suivez mon regard », dans une claire allusion à Elon Musk.
Dans une Europe spatiale « fragile », il a aussi estimé qu’il fallait « pousser nos champions européens pour qu’ils soient compétitifs sur le marché mondial ». Le président souhaite « faire monter en cadence l’exploitation d’Ariane 6 dont la compétitivité doit être améliorée » et « moderniser la base de Kourou pour en faire un lieu agile, ouvert aux petits lanceurs et aux partenaires étrangers ».
Articles actuels de l’auteur









