OPINIONS

«Le contrôle de l’esprit»: la guerre de désinformation du PCC sur les médias sociaux américains

janvier 12, 2023 14:09, Last Updated: janvier 12, 2023 14:09
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C’est par lots entiers qu’émergent de nouveaux comptes sur les médias sociaux pour interagir avec d’autres qui sont inactifs depuis longtemps. Ils semblent dialoguer et abordent tout le spectre de la politique américaine.

Sur les photos de profils, on peut généralement voir des drapeaux américains ou de très belles femmes. Presque tous sont anonymes, seuls quelques‑uns appartiennent prétendument à des personnes réelles.

À travers des tweets, des posts, des commentaires, ils diffusent des opinions. Certains défendent avec véhémence le droit à l’avortement, d’autres, le droit à la vie. Certains défendent le deuxième amendement, d’autres, le contrôle des armes à feu. Certains affirment que les États‑Unis sombrent actuellement dans une tyrannie gauchiste, d’autres s’indignent de vivre dans un pays fasciste.

Mais surtout, ils publient des mèmes dénigrant les partis politiques et les institutions gouvernementales des États‑Unis. Un de ces mèmes, par exemple, représente Joe Biden avec une légende dénonçant le slogan « Build Back Better », un autre montre le sénateur Marco Rubio (Parti républicain‑Floride) et insinue que ce dernier entretient des liens financiers avec la Russie.

Il serait facile de conclure que ces comptes constituent un échantillon représentatif de la polarisation politique américaine toujours plus marquée, à ceci près qu’aucun de ces comptes n’appartient à de vrais citoyens.

Ces faux comptes intègrent le vaste ensemble des opérations d’influence en ligne menées par le Parti communiste chinois (PCC) et ne constituent que la partie émergée de l’iceberg.

Ces manœuvres numériques visent à semer la discorde et la rancœur sur les médias sociaux. Il n’est pas simplement question de propagande. Ces opérations d’influence correspondent à l’ambition stratégique du PCC de saboter les États‑Unis et de les renverser de leur statut de leader mondial.

Certes, l’ambition du PCC de remplacer l’Occident démocratique par un autoritarisme sino‑centré n’est pas nouvelle. En revanche, les méthodes utilisées sont inédites.

Selon les commentaires des spécialistes en sécurité et des parlementaires, le PCC adapte désormais les manœuvres de sa guerre psychologique selon les failles des sociétés libres. Les campagnes d’influence du régime ont beaucoup évolué, elles sont passées d’une propagande obsolète sur la gloire du communisme vers des campagnes de désinformation plus subtiles et plus insidieuses destinées à manipuler les Américains pour qu’ils renoncent à leur propre pays.

Selon le sénateur Marco Rubio, cet effort est inextricablement lié au désir du régime de miner et de détruire les États‑Unis.

« Le Parti communiste chinois est totalement concentré sur sa mission d’affaiblir et à terme renverser les États‑Unis », déclare‑t‑il pour Epoch Times par courriel. « Il travaille d’arrache‑pied pour influencer et asservir les Américains dans les milieux universitaires, technologiques, au sein du gouvernement fédéral et des gouvernements locaux. »

« Les États‑Unis doivent arrêter d’être naïfs face à cette menace. Il faut commencer par reconnaître et interdire les entreprises, les organisations et les logiciels que le PCC utilise pour influencer les Américains. »

Contrôler l’esprit des Américains, une nouvelle forme de guerre

Le rapport 2022 du Pentagone sur la puissance militaire de la Chine (pdf) souligne le développement d’une nouvelle méthode de guerre psychologique parmi les dirigeants politico‑militaires du régime.

Le rapport indique que l’armée chinoise (Armée populaire de libération, APL) développe ses méthodes de guerre psychologique dans le but d’obtenir un avantage militaire.

« Tandis que l’APL est en train d’étendre la portée de ses opérations d’influence de par le monde et d’asservir l’information sur le terrain, elle élabore et développe la prochaine étape de la guerre psychologique, ce qu’elle appelle des opérations du domaine cognitif (ODC), qui reposeront sur des messages subliminaux, une désinformation avancée, une propagande assumée et le suivi du sentiment public », indique le rapport.

Siège de TikTok à Los Angeles (Photo by CHRIS DELMAS/AFP via Getty Images)

Le rapport décrit les ODC comme « une forme plus agressive de guerre psychologique » destinée à « affecter la cognition, la prise de décision et le comportement d’une cible ».

En bref, les ODC représentent les nouvelles méthodes du régime pour briser la volonté d’un adversaire. Il est question pour le PCC d’actionner le comportement de l’ennemi.

« L’objectif des ODC est de parvenir à ce que l’APL appelle le ‘contrôle de l’esprit’, défini comme l’utilisation de la propagande pour influencer l’opinion publique afin d’apporter des changements dans le système social d’une nation susceptibles de créer un environnement favorable à la Chine et de réduire la résistance civile et militaire aux actions de l’APL », indique le rapport.

« Les articles de l’APL sur les OCD indiquent que rechercher à contrôler l’esprit à un niveau cognitif et soumettre l’ennemi sans combattre est le plus haut domaine de la guerre. »

Les motivations du PCC pour opposer les Américains sont évidentes : une nation en guerre contre elle‑même est difficilement capable de lutter contre un adversaire extérieur.

Selon Sam Kessler, conseiller en géopolitique auprès de la société de gestion de risques North Star Support Group, les nouvelles opérations d’influence du PCC doivent être considérées dans le contexte plus large de ses doctrines et stratégies militaires.

Au premier rang de celles‑ci : la « guerre hors limite ».

La guerre hors limite est un concept élaboré dans un ouvrage coécrit par un général et un haut fonctionnaire chinois. Il s’agit d’attaquer tous les aspects d’une société pour remporter la victoire. Le livre promeut cette stratégie pour que la Chine puisse battre les États‑Unis malgré leur supériorité militaire. Il préconise d’exploiter « trois champs de batailles », juridique, médiatique et psychologique.

« Le PCC se lance dans une guerre cognitive, dans une guerre asymétrique, des opérations subversives visant à provoquer la peur, la confusion, la perturbation et le clivage au sein de la société américaine et dans d’autres pays », explique Sam Kessler.

Provoquer un « effondrement social » aux États‑Unis

En encadrant la façon dont les Américains discutent de leurs problèmes politiques et en les opposant au point de les rendre incapables de travailler ensemble, Sam Kessler pense que le PCC prépare le terrain pour provoquer une crise et la chute de la nation.

« L’objectif est d’affaiblir les fondements d’une société et de ses institutions en employant une stratégie sur le long terme qui cible généralement des individus et des groupes peu méfiants », explique‑t‑il.

« Il peut être question de provoquer la méfiance à l’égard des institutions américaines… Une fois que ces institutions sont traitées avec mépris et qu’elles s’érodent dans la durée, il est très difficile de les redresser. Par conséquent, si on les laisse perdurer sur le long terme, l’histoire a montré que ces méthodes sont très efficaces pour provoquer l’effondrement d’une société et le chaos ni plus ni moins. »

Cette ambition n’est peut‑être nulle part plus claire que dans le cas du réseau de désinformation DRAGONBRIDGE.

La société de renseignement Mandiant, qui a découvert ce réseau de désinformation reposant sur des faux comptes, a conclu que le but ultime de DRAGONBRIDGE était de saboter le fonctionnement des États‑Unis en décourageant les Américains de voter, en attisant les tensions politiques et en accusant le pays de tel et tel méfait.

Les comptes de DRAGONBRIDGE ont plus récemment commencé à mettre en avant des articles réels et publiés par de grands organes de presse, mais légèrement modifiés. Les faux comptes du réseau sont prétendument ceux de citoyens américains désireux de critiquer le bilan des États‑Unis en matière de race et de justice sociale.

Selon Sam Kessler, ces efforts font partie intégrante de la stratégie du régime pour affaiblir les États‑Unis de l’intérieur.

« À bien des égards, la guerre cognitive est plus efficace pour épuiser la réactivité d’une nation, car celle‑ci est empêtrée dans la confusion, avec un moral en baisse et une détermination érodée. »

« Si les fondamentaux d’une nation sont affaiblis, si cette nation se sent fatiguée et mentalement à bout grâce à ces campagnes d’influence ciblées, alors elle est plus susceptible d’être manipulée et contrôlée par des adversaires étrangers comme la Chine, la Russie ou l’Iran. »

(Cancun Chu/Getty Images)

La prolifération des opérations d’influence chinoises

Jusque‑là, il n’était pas évident pour le PCC de s’attaquer directement aux fondamentaux américains. Le régime ciblait les membres de la diaspora chinoise avec sa propagande pro‑communiste. Récemment, la Chine a opéré un tournant abrupt, et le PCC sème désormais l’inimitié politique parmi les citoyens américains.

En l’espace de trois ou quatre ans, les acteurs du régime ont fait le maximum pour créer un déséquilibre international, comme le montrent plusieurs rapports publiés par la société de renseignement Recorded Future.

Selon un rapport de 2019 (pdf), par exemple, de 2016 à 2019, les opérations d’influence du PCC différaient fondamentalement de celles d’autres nations adverses comme la Russie.

Les opérations de la Russie s’appuient sur des réseaux de comptes bots et des « usines à trolls ». Ceux‑ci ont pour but de déstabiliser les nations ciblées en augmentant les malentendus internationaux. Ces opérations créent de la méfiance et de la confusion parmi les électeurs des sociétés démocratiques, et sapent leur capacité à identifier les vraies menaces.

Avant 2019, le PCC a largement exploité l’environnement médiatique libre des États‑Unis pour promouvoir des opinions positives sur la Chine et le communisme. Pour s’imposer à l’étranger, les influenceurs chinois étaient suivis par des comptes bots et tiraient parti de la publicité payante.

En 2022, un autre rapport (pdf) signale que le PCC a mis au point une nouvelle stratégie dans ses opérations d’influence. Il envoie désormais des messages ciblés à des publics bien définis grâce à des bases de données démographiques exhaustives qui ne sont pas sans rappeler celles utilisées par les grandes agences de marketing.

« 2019 a marqué un tournant dans la désinformation en ligne de la Chine, avec une forte augmentation de la propagande informatique ciblant les étrangers », indique le rapport.

« Dans la période post‑2019, des faux mouvements et l’intervention de personnalités en ligne sont devenues les outils de prédilection de la propagande du PCC. YouTube, Facebook et d’autres plateformes mondiales de médias sociaux ont supprimé des dizaines de milliers de comptes soupçonnés de manipulations trompeuses attribués à la Chine au cours des trois dernières années. »

Ces comptes trompeurs, selon Recorded Future, reçoivent probablement des conseils ou un soutien matériel du Département du travail du Front uni du PCC et du ministère de la Sécurité d’État (la principale agence de renseignement du régime).

Qui plus est, le changement rapide des stratégies indiquent que le régime apprend à mener une guerre psychologique auprès d’un partenaire plus expérimenté, la Russie, dont les cybertactiques ressemblent beaucoup aux nouvelles méthodes chinoises.

« La Chine et la Russie ont forgé un partenariat très étroit qui a beaucoup évolué au cours des trente dernières années », explique Sam Kessler. « Il est très possible que nous assistions à un moment à une alliance stratégique plus formelle entre la Chine et la Russie pour contrer plus directement les États‑Unis et l’Occident, si ce n’est pas déjà le cas. »

« Pékin et Moscou ont renforcé leurs liens en matière de défense et de sécurité, outre les liens économiques, leur partenariat au niveau des infrastructures, de l’énergie et des ressources naturelles. Il y a désormais un cyberpartenariat entre la Chine et la Russie. Les deux pays coopèrent et se coordonnent pour gérer la sécurité de l’information et d’autres opérations conjointes. »

Les données au cœur des campagnes d’influence du PCC

Ce qui permet à la machine de désinformation chinoise de se maintenir et de s’affiner, ce sont les données.

En effet, le régime exploite chaque jour de vastes quantités de données concernant les citoyens américains dans ses efforts pour saboter les États‑Unis de l’intérieur.

Selon le rapport 2022 de Record Future, le PCC déploie pour influencer les individus et les communautés une « communication précise ». Il cible son public grâce à une quantité extraordinaire de données et s’adapte pour tenir compte de la culture, l’économie, la religion et les intérêts personnels, etc. de chacun.

« La mise en œuvre de cette stratégie par la Chine exige une connaissance approfondie des publics ciblés. Pour avoir cette connaissance, la Chine s’appuie sur les sociétés internationales, des études régionales, des enquêtes dans les pays et les données comportementales en ligne », indique le rapport.

En outre, les services de propagande du régime sont très certainement clients de China Data Matrix, une société de surveillance des médias basée en Chine « qui prétend avoir une ‘couverture complète’ de Facebook, Pinterest, Instagram, Linkedin, YouTube, Line et d’autres plateformes, portails Web, communautés, forums et blogs importants dans plus de 100 pays et dans 10 langues ».

Il n’est donc peut‑être pas surprenant que les lois du PCC classent les données dans la catégorie des ressources nationales, soumises à la collectivisation communiste, et exigent que toutes les données stockées dans le pays par des entreprises chinoises soient remises au Parti sur demande.

Ce besoin de données pour alimenter les opérations d’influence du régime rend également problématique la présence d’entreprises à capitaux chinois aux États‑Unis.

Le type de données qui pourraient être glanées auprès du géant des médias sociaux TikTok par l’intermédiaire de sa société mère ByteDance, basée en Chine, par exemple, pourrait être utilisé pour alimenter directement la construction d’une campagne d’influence par les autorités communistes.

Le président de la commission des affaires étrangères de la Chambre des représentants, Michael McCaul (Parti républicain‑Texas), est parfaitement conscient du problème. Il estime que la capacité du régime à obtenir les données des utilisateurs américains par le biais d’entreprises comme TikTok est une pièce maîtresse du puzzle.

« Malheureusement, il n’est pas surprenant que le PCC s’efforce de semer la discorde politique au sein du peuple américain. Les États‑Unis ne parviennent pas à prendre au sérieux la menace du PCC », explique Michael McCaul par courriel à Epoch Times.

« Bytedance, une entreprise contrôlée par le PCC, exploite le réseau de médias sociaux le plus populaire auprès des jeunes Américains, et les entités du PCC achètent nos données sensibles. Une Chambre dirigée par les républicains va attaquer ces menaces de front. »

Défendre un système ouvert et libre : difficile, mais possible

Le PCC cherche à façonner le comportement des Américains au détriment des États‑Unis. Pour ce faire, il exploite l’ouverture de la société américaine et des plateformes de médias sociaux basées aux États‑Unis. La menace d’une crise intérieure découlant de ces opérations d’influence augmente.

Ces derniers mois montrent que le PCC gagne du terrain pour diviser les Américains et miner le système politique du pays.

En novembre 2022, des bots déployés par la Chine ont envahi Twitter, s’emparant des hashtags et bloquant les recherches afin d’empêcher les utilisateurs de voir les manifestations contre les confinements qui avaient lieu dans toute la Chine.

En octobre 2022, un rapport a révélé que TikTok n’a pas réussi à empêcher 90% des fausses informations électorales destinées aux Américains avant les élections de mi‑mandat de 2022, notamment des publicités contenant des informations explicitement fausses destinées à empêcher les Américains de voter.

En septembre 2022, Meta a démantelé plusieurs réseaux de faux comptes chinois.

Les acteurs basés en Chine ont essayé d’influencer les élections américaines, ont tenté de saper la stabilité des États‑Unis en créant une inimitié raciale et ont tenté de discréditer et d’attaquer les dissidents chinois qui se présentent au Congrès.

Selon un autre rapport de Recorded Future (pdf) publié en octobre 2022, ces efforts ne feront qu’augmenter dans les années à venir.

« Les influenceurs parrainés par l’État chinois mènent assurément des opérations d’influence malveillantes ciblant les publics anglophones et sinophones des États‑Unis avec des contenus multimédias politiques clivants sur les médias sociaux », indique le rapport.

Tout n’est pas perdu, cependant. Selon Sam Kessler, il y a de l’espoir dans la transparence, et la capacité des agents du PCC à attiser le vitriol politique et à saper la sécurité nationale des États‑Unis diminue chaque fois qu’un tel effort est mis à jour.

C’est pourquoi, Sam Kessler estime que TikTok présente un avantage. La plateforme fonctionne comme une girouette permettant de savoir dans quelle direction souffle le vent.

« Récemment, des efforts plus importants ont été déployés pour réduire le niveau d’influence de TikTok dans le paysage médiatique américain », explique Sam Kessler. « Ces efforts vont augmenter à mesure que les parlementaires, les fonctionnaires fédéraux et les enquêteurs seront plus nombreux à associer TikTok aux médias d’État chinois et à le considérer comme un outil d’espionnage chinois. »

« Le traiter comme un outil d’espionnage et de guerre permettra soit d’éliminer TikTok du mediascape américain, soit de le réformer complètement avec des algorithmes qui ne seront pas conçus pour nuire au tissu social du pays ou aux enfants. »

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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