Le malaise économique chinois est-il cyclique ou structurel ?

Par Christopher Balding
2 septembre 2023 09:12 Mis à jour: 2 septembre 2023 09:12

L’économie chinoise traverse une année difficile. Après les mesures de confinement adoptées pour le Covid-19 en 2022, les analystes s’attendaient à ce que l’année 2023 soit dynamique et que la demande de consommation et de biens immobiliers stimule les perspectives économiques chinoises.

Puis, la dure réalité de l’année 2023 – de la chute des échanges commerciaux à la faillite des promoteurs – s’est imposée à la deuxième économie mondiale. La question que se posent les économistes et les analystes est de savoir s’il s’agit d’un choc cyclique à court terme ou d’un problème structurel sur le long terme affectant le modèle économique chinois.

Les données économiques sont bruyantes. Les données quotidiennes, mensuelles et annuelles rebondissent et nous surprennent. Toutefois, en moyenne, sur des périodes plus longues, de nombreuses données économiques sont en fait assez stables. Depuis la Seconde Guerre mondiale, la croissance économique réelle des États-Unis s’est élevée en moyenne à environ 3%. Certaines années ont été plus faibles, d’autres plus élevées, mais la croissance des revenus et d’autres variables sont restées très stables sur le long terme. En Chine, nous observons des schémas similaires : même si nous n’acceptons pas la croissance officielle, nous pouvons clairement voir de nos yeux que l’économie chinoise a connu une croissance très rapide pendant de nombreuses années qui a permis d’améliorer le niveau de vie.

Les problèmes auxquels la Chine est actuellement confrontée en 2023 sont-ils simplement le fruit d’une mauvaise année, ou existe-t-il des facteurs structurels susceptibles de modifier le taux de croissance à long terme de l’économie chinoise pour les années à venir ?

En réalité, la Chine est confrontée à une baisse structurelle de son taux de croissance qui n’est pas simplement due au bruit. Tout d’abord, bien que la population chinoise ait récemment commencé à diminuer, la population en âge de travailler a amorcé une baisse en 2014, qui ne fera que s’accélérer dans les années à venir. D’un point de vue mathématique, il est pratiquement impossible pour un pays d’augmenter son PIB total alors que le nombre de personnes travaillant pour produire ce PIB diminue. Il ne s’agit pas d’un bruit ou d’une variation statistique, mais d’un changement permanent du taux de croissance chinois.

Deuxièmement, la dette chinoise est un facteur structurel qui freinera la croissance à l’avenir. Une grande partie de la croissance rapide du PIB de la Chine qui a suivi la crise financière mondiale de 2008 reposait sur l’accumulation rapide de dettes qui ont permis de financer des investissements en actifs fixes dans tous les domaines, du train à grande vitesse à l’immobilier. La Chine est aujourd’hui plus endettée que la plupart des pays développés, tous secteurs confondus, et plus endettée que des pays à niveau de revenu comparable, comme la Russie, la Malaisie et le Mexique. Il sera de plus en plus difficile d’augmenter les niveaux d’endettement à des taux historiquement élevés tout en maintenant les banques à flot et les emprunteurs en mesure de rembourser leurs prêts. La plupart des pays ont augmenté leur niveau d’endettement après avoir atteint un niveau de vie relativement élevé. La Chine ne bénéficie plus de ce luxe.

Troisièmement, l’ensemble du modèle chinois devra être modifié pour générer de la croissance. Après la crise financière mondiale de 2008, la majorité de la croissance chinoise est venue de la construction. Les responsables gouvernementaux chargés d’atteindre les objectifs de croissance ont construit d’énormes quantités d’infrastructures avec de l’argent emprunté. Les promoteurs immobiliers ont construit un grand nombre de biens immobiliers en recourant à l’emprunt. Cette démarche était logique à l’époque, car la Chine souffrait d’un manque d’infrastructures.

Aujourd’hui, le contraire est vrai. La Chine dispose de vastes quantités de biens immobiliers vides, dont le stock invendu est évalué à cinq ans, et de projets d’infrastructure démesurés, comme des routes et des aéroports. La Chine ne peut pas continuer à stimuler sa croissance en construisant davantage de choses que personne n’utilisera alors que les projets en cours ne sont pas utilisés. La Chine a déjà épuisé les dividendes qu’elle tirait de ses investissements et cela ne se reproduira pas.

Ce qui détermine en fin de compte la santé d’une économie, c’est ce qu’on appelle la productivité. En termes simples, comment les travailleurs font-ils plus avec moins ? La croissance chinoise a bénéficié de l’ajout de nombreux investissements, tels que des routes, et d’un grand nombre de personnes pour fabriquer plus de choses. Le modèle d’investissement étant soumis à la pression de dettes croissantes et d’une offre excédentaire, et le nombre de travailleurs étant en baisse, le seul moyen de maintenir la croissance à l’avenir est d’augmenter la productivité.

Malheureusement, la croissance de la productivité chinoise depuis la crise financière mondiale de 2008 est restée très faible. Les économistes ne s’entendent pas sur la meilleure façon de mesurer la productivité et de l’évaluer dans le temps. Néanmoins, tout le monde s’accorde à dire que la croissance de la productivité en Chine a été très faible et que, selon certaines mesures, elle a diminué depuis 2008. Selon un rapport récent du Fonds monétaire international, la productivité matérielle et innovante a en fait été négative en moyenne pour les entreprises âgées de plus de deux ans en Chine entre 2011 et 2018. Compte tenu des mesures de répression prises par la suite à l’encontre des entreprises technologiques et autres, ce déclin de la productivité n’a probablement fait que s’aggraver depuis 2018.

Les entreprises d’État et les entreprises liées à l’État étant les plus mal placées dans les études de productivité et les nouveaux investissements allant massivement à ces entreprises, la Chine est confrontée à un dilemme : une économie dynamique, innovante et productive dépend de la stimulation de la concurrence, de la créativité, des entreprises privées et de la remise en question, voire de la faillite, des entreprises en place. Mais en 2023, la Chine n’est pas marquée par la concurrence, la créativité, les entreprises privées ou la remise en question des intérêts de l’État.

Les problèmes structurels rencontrés par la Chine ne seront pas entièrement compensés par une augmentation de la productivité ; ces chiffres sont tout simplement trop importants. Toutefois, l’augmentation de la productivité permettrait d’atténuer les problèmes d’endettement excessif, de surabondance de l’offre et de déclin de la population. Cependant, je ne m’attends pas à ce que Pékin devienne soudainement un partisan de l’entreprise privée et de la concurrence du marché. Le PCC semble enclin à aggraver les problèmes qu’il a lui-même créés.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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