Les investissements directs étrangers en Chine connaissent une évolution négative pour la première fois en 25 ans

Ces données constituent un signal d'alarme pour l'économie chinoise, en proie aux difficultés depuis l'abandon de sa politique zéro Covid.

Par Aaron Pan
9 novembre 2023 01:54 Mis à jour: 9 novembre 2023 01:54

La Chine a enregistré son premier déficit trimestriel d’investissements étrangers depuis 1998, soulignant la tendance des entreprises étrangères à quitter le pays en réponse aux défis économiques et aux tensions géopolitiques.

Le passif des investissements directs, un indicateur des investissements directs étrangers (IDE), a chuté de 11,8 milliards de dollars au cours du troisième trimestre, selon les données préliminaires publiées par l’Administration d’État des changes de Chine le 3 novembre. C’est la première fois que la Chine souffre d’un déficit d’investissements étrangers depuis 1998, date à laquelle le bureau a commencé à enregistrer des données.

Les dernières données officielles signalent davantage de difficultés pour la seconde économie mondiale, qui vacille dans un contexte de crise immobilière et de taux de chômage des jeunes (âgés de 16 à 24 ans) historiquement élevé.

Les analystes suggèrent que le déclin de l’IDE est lié au désavantage de la Chine en termes detaux d’intérêt.

« Une partie de la faiblesse de l’IDE entrant en Chine peut être imputable aux multinationales qui rapatrient leurs bénéfices », a écrit Goldman Sachs dans une note, comme l’a rapporté Reuters. « Alors que les taux d’intérêt en Chine sont ‘plus bas pendant plus longtemps’ et que les taux d’intérêt en dehors de la Chine sont ‘plus élevés pendant plus longtemps’, les pressions sur les sorties de capitaux vont probablement persister. »

Certains experts estiment que la baisse du passif des investissements directs, qui retrace les transactions financières des entreprises à capitaux étrangers en Chine, est probablement influencée par les tensions géopolitiques propres à  l’Occident.

Julian Evans-Pritchard, responsable de l’économie chinoise chez Capital Economics, a expliqué que l’écart inhabituellement grand entre les taux d’intérêt « a conduit les entreprises à transférer leurs bénéfices non distribués hors du pays », selon Reuters.

Si, selon lui, rien n’indique que les entreprises étrangères réduisent globalement leur présence en Chine, « nous pensons qu’à moyen terme au moins, l’aggravation des tensions géopolitiques entravera la capacité de la Chine à attirer les IDE et favorisera plutôt les marchés émergents plus favorables à l’Occident ».

Les pires perspectives depuis des décennies

Selon une enquête de la Chambre de commerce américaine (AmCham) à Shanghai, 60% des personnes interrogées ont cité les tensions croissantes entre les États-Unis et la Chine comme un défi majeur à relever en Chine. L’AmCham a souligné dans son rapport annuel que le climat d’investissement pour les entreprises américaines en Chine était le pire que l’on ait connu depuis des décennies.

« Le rapport montre qu’au milieu des tensions bilatérales sino-américaines, des perturbations dues au Covid et des pressions macroéconomiques, les sociétés membres font état d’une détérioration de leurs résultats commerciaux et de perspectives moins optimistes pour la Chine. »

« 2023 était censée être l’année où la confiance et l’optimisme des investisseurs allaient rebondir après des années de perturbations et de restrictions imposées par le Covid », indique le rapport. « Mais la reprise ne s’est pas matérialisée, et le climat des affaires s’est encore détérioré. »

« Malgré la fin des contraintes de l’ère Covid, le pourcentage d’entreprises se décrivant comme optimistes ou un peu optimistes a chuté à un niveau record de 52% », constate le rapport. Il s’agit du niveau de confiance le plus bas que l’AmCham ait enregistré depuis son premier rapport en 1999.

Le mois dernier, un rapport de l’Atlantic Council GeoEconomics Center et du Rhodium Group, un groupe de réflexion basé à Washington, a laissé entendre que l’économie chinoise avait besoin d’une réforme structurelle.

« Le malaise économique que les décideurs politiques de Pékin observent actuellement n’est pas dû à des facteurs conjoncturels tels que le Covid, mais à l’incapacité de réformer le système économique du pays », note l’étude.

Le rapport indique que l’économie chinoise souffre d’un « déficit persistant de réformes structurelles », qui se traduit par un « retard » par rapport aux économies avancées « dans la plupart des dimensions du marché ».

Détérioration de l’environnement des entreprises

Plusieurs perquisitions et arrestations menées au début de l’année ont ébranlé les investisseurs étrangers. Selon les données de Goldman Sachs citées par Reuters, les sorties de devises étrangères de Chine en septembre ont fortement augmenté pour atteindre 75 milliards de dollars, soit l’augmentation mensuelle la plus importante depuis 2016.

Les défis auxquels sont confrontées les entreprises américaines opérant en Chine vont au-delà des subventions que le régime accorde à leurs concurrents chinois ou au vol de propriété intellectuelle. Une nouvelle série de problèmes, notamment des « amendes exorbitantes sans aucune explication » et des enquêtes sur des entreprises américaines, a été mise en évidence par la secrétaire d’État au commerce, Gina Raimondo, lors de sa visite en Chine à la fin du mois d’août, alors qu’elle s’entretenait avec de hauts responsables chinois de l’économie.

Un autre facteur qui aggrave la situation est la formulation vague des dispositions prises par la loi anti-espionnage, entrée en vigueur le 1er juillet, qui élargit le champ des « activités d’espionnage » aux « documents, données, matériaux ou articles liés à la sécurité et aux intérêts nationaux », sans que jamais ne soit précisé ce qui relève exactement de la sécurité nationale. Mme Raimondo a souligné que l’amendement à la loi était « flou et provoquait des ondes de choc au sein de la communauté internationale ».

« De plus en plus, les entreprises [occidentales] me disent qu’il n’est plus possible d’investir en Chine parce que c’est devenu trop risqué », a-t-elle rapporté à la presse à bord d’un train à grande vitesse en direction de Shanghai, dans la nuit du 29 août.

Depuis le mois de mars, les autorités chinoises ont perquisitionné la société de due diligence Mintz et la société de conseil Capvision, interrogé le personnel de Bain & Co. et enquêté sur le fabricant de puces Micron.

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