L’État fait artificiellement monter le prix des vélos

Par Philbert Carbon
5 novembre 2022 11:09 Mis à jour: 5 novembre 2022 11:09

Le vélo a le vent en poupe, et le vélo électrique fait la course en tête. Depuis la crise du covid, le marché de la bicyclette a fortement progressé en France, aidé, il faut bien le dire, par un tas de mesures dont de nombreuses aides publiques. Résultat : les prix des vélos augmentent. Une fois de plus, l’État est responsable de cette inflation.

Il est communément admis que la crise du covid a dopé le marché du vélo. Les Français des villes fuyaient alors les transports en commun et se sont tournés vers ce mode de déplacement. Mais l’envie de se déplacer au grand air n’explique pas à lui seul le boom de la « petite reine ». Trois autres phénomènes au moins contribuent à soutenir le marché : l’aménagement de pistes cyclables dans les grandes agglomérations, les aides à l’équipement et le développement du vélo à assistance électrique (VAE), en particulier depuis l’apparition des batteries lithium.

Le marché du vélo est tiré par l’électrique

Le chiffre d’affaires du vélo a crû de 25 % en 2020 et de 15 % en 2021, passant de 2,3 milliards d’euros en 2019 à 3 milliards en 2020 et 3,4 milliards en 2021. Une progression de 43 % en deux ans ! En revanche, le nombre de bicyclettes neuves achetées reste stable : 2,8 millions d’unités en 2017, 2,7 en 2018, 2,6 en 2019, 2,6 en 2020, 2,7 en 2021. L’augmentation du chiffre d’affaires du secteur ne s’explique donc pas par une augmentation générale des ventes de vélos, mais par celle des pièces détachées et accessoires et surtout des VAE.

Avec 388 000 unités vendues en 2019 (+12 % par rapport à 2018), 515 000 en 2020 (+33 %) et 660 000 en 2021 (+28 %), le succès du vélo à assistance électrique ne se dément pas. S’il ne représente qu’un petit quart des ventes en volume, le VAE contribue, en revanche, à 60 % des ventes en valeur. Il faut dire qu’il coûte en moyenne 5 fois plus cher qu’un vélo dit « traditionnel ».

Après avoir augmenté de 9,8 % en 2019, le prix moyen d’un VAE a crû de 18,8 % en 2020, pour baisser de 4 % en 2021 et s’établir à 1 993 € selon l’Observatoire du cycle. La hausse est quand même de 25 % en 3 ans. Qu’est-ce qui explique une telle hausse du prix du vélo électrique ?

Il y a d’abord le contexte économique international. Les pièces des bicyclettes sont produites aux quatre coins du monde, dans des pays qui n’ont pas été atteints en même temps par les différentes vagues de l’épidémie de covid. Personnel manquant, usines à l’arrêt… il n’en fallait pas plus pour créer de la pénurie, et donc une augmentation des prix. A cela se sont ajoutées les hausses du coût des matières premières et des transports.

Des aides à foison

Ensuite, il y a bien évidemment l’augmentation de la demande qui est en grande partie créée par les pouvoirs publics.

Au plan national, nous avons ainsi connu le « coup de pouce vélo », lancé en avril 2020 pour une durée d’un an, qui prévoyait une aide pouvant aller jusqu’à 50 € HT pour les particuliers remettant en état un vélo. Cette mesure s’inscrivait dans le plan vélo et mobilités actives lancé 2018 et doté de 500 millions d’euros. Il a été renouvelé pour la période 2022-2027 avec un budget de 250 millions rien que pour l’année 2023. Cet argent servira, notamment, à construire des pistes cyclables et des parkings à vélo.

Parallèlement, l’État a mis en place un « bonus vélo ». Cette aide à l’achat venait initialement en complément d’un soutien équivalent d’une collectivité territoriale. Depuis le 15 août, et jusqu’au 31 décembre 2022, elle est accordée directement, indépendamment des initiatives de la commune, du département ou de la région de résidence, mais son obtention est conditionnée à un niveau de ressources ou à une situation de handicap. Elle va de 150 € pour l’achat d’un vélo neuf « traditionnel » à 2 000 € pour l’achat d’un vélo cargo, vélo allongé, vélo adapté à une situation de handicap, vélo pliant, qu’ils soient électriques ou traditionnels, ou d’une remorque électrique, en passant par 400 € pour l’achat d’un VAE.

Et si vous envoyez à la casse un véhicule ancien (voiture ou camionnette d’avant 2006 pour les moteurs essence, et d’avant 2011 pour les diesel), vous pouvez bénéficier d’une prime à la conversion de 1 500 € (pouvant aller jusqu’à 3 000 € si vous êtes dans une situation de handicap), quel que soit votre niveau de revenu, pour acheter un vélo électrique, pliant, cargo, etc. Une aide qui est augmentée de 1 000 € si vous habitez dans une zone à faible émission et que votre collectivité territoriale vous a versé une aide pour acheter ou louer un vélo à assistance électrique.

Le « bonus vélo » et la prime à la conversion sont cumulables avec une aide locale. Quelques régions (Île- de-France, Grand Est, Pays de Loire, Occitanie, Corse) et départements (Hérault, Seine-Maritime) ainsi que plusieurs villes (Angers, Bordeaux, Caen, La Roche-sur-Yon, Lyon, Marseille, Nice, Paris, Toulon, Toulouse, Strasbourg, Vannes) accordent des aides qui s’ajoutent à celle de l’État.

La ville de Paris, par exemple, accordait (jusqu’au 14 octobre 2022) jusqu’à 400 € pour un VAE et 600 € pour vélo cargo avec ou sans assistance électrique. La région Ile-de-France complète cette aide, jusqu’à 500 € maximum pour un VAE, 600 € pour un vélo cargo électrique et 1 200 € pour un vélo adapté.

On rappellera en passant qu’en 2018, selon l’Insee, le salaire moyen francilien était supérieur de 28 % au salaire moyen national, et que deux tiers des salariés français percevant des très hauts salaires (les 1 % des salaires les plus élevés) exerçaient en Île-de-France et 57 % dans la métropole du Grand Paris. Une étude de 2017 montrait d’ailleurs que les ouvriers ne représentaient que 3 % des bénéficiaires des aides à l’achat d’un VAE. Octroyer ainsi des aides pour acheter une bicyclette à des personnes qui ont largement les moyens de se l’acheter est quand même scandaleux !

C’est sans doute pourquoi la ville de Paris a décidé de conditionner les aides à un plafond de ressources à compter du 15 octobre 2022. Néanmoins, elle poursuit sa politique de dépense en faveur de la « petite reine » avec son plan vélo 2021-2026 doté de plus de 250 millions d’euros (qui vient après le plan 2015-2020 de 150 millions) afin, principalement, d’aménager des pistes cyclables et des places de stationnement.

Les politiques publiques expliquent la hausse du prix des vélos

Il ne faut pas oublier que l’État a mis en place le forfait mobilités durables en mai 2020 permettant aux employeurs du secteur privé de prendre en charge jusqu’à 600 € par an et par personne les frais de déplacement de leurs salariés sur leur trajet domicile-travail effectué à vélo ou en covoiturage. Ce forfait est exonéré d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales. Il est également mis en place dans la fonction publique, pour les déplacements à vélo ou en covoiturage, à hauteur de 200 € par an et par agent.

Les entreprises peuvent, par ailleurs, bénéficier d’une réduction d’impôt sur les sociétés si elles mettent à disposition de leurs salariés une flotte de vélos pour leurs déplacement domicile-travail (dans la limite de 25 % du coût de la flotte de vélos).

Cette manne financière déversée sur les vélos ne peut que produire ce que toute politique keynésienne a toujours produit, à savoir de l’inflation. Les courbes ci-dessous montrent l’évolution de l’indice des prix des bicyclettes – largement subventionnées par les pouvoirs publics comme nous l’avons montré – et l’évolution de l’indice des prix des téléphones portables – non subventionnés comme chacun sait. La comparaison se passe, nous semble-t-il de commentaires.

Article écrit par Philbert Carbon, avec l’aimable autorisation de l’IREF.

L’IREF est un « think tank » libéral et européen fondé en 2002 par des membres de la société civile issus de milieux académiques et professionnels dans le but de développer la recherche indépendante sur des sujets économiques et fiscaux. L’institut est indépendant de tout parti ou organisation politique. Il refuse le financement public.

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