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Suicide d’Evaëlle: procès en vue pour l’enseignante accusée de « harcèlement »

février 24, 2024 16:45, Last Updated: février 24, 2024 23:43
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Accusée d’« humiliations régulières » ayant « fragilisé le psychisme de l’enfant », une enseignante d’Evaëlle, collégienne suicidée à 11 ans en 2019 dans le Val-d’Oise, risque un procès pour harcèlement moral sur mineur, tout comme deux camarades.

Le 12 février, le parquet de Pontoise a requis le renvoi de l’enseignante de français, âgée de 61 ans, et de deux camarades de classe pour harcèlement moral sur mineure, a appris samedi l’AFP, confirmant une information du Monde. Si la juge d’instruction suit ces réquisitions – la décision devrait être connue d’ici fin mars – elle sera jugée devant le tribunal correctionnel et les adolescents de 16 ans renvoyés devant un juge pour enfants.

Le 21 juin 2019, le père d’Evaëlle retrouve sa fille de 11 ans pendue à son lit dans leur pavillon à Herblay (Val-d’Oise). Six mois plus tôt, l’adolescente avait tenté de mettre le feu à une poutre de la maison après une rupture amicale.

Depuis l’entrée d’Evaëlle en sixième au collège Isabelle Autissier d’Herblay, les problèmes se multiplient pour la jeune fille, déjà victime de brimades en primaire. Au-delà du comportement insultant et violent de camarades, elle fait face à des tensions avec son enseignante de français au sujet de la mise en place d’un protocole médical relatif à des problèmes de dos.

Dans un premier temps, la situation avait été réglée en interne et Evaëlle, décrite comme précoce, joyeuse mais ayant des difficultés dans les relations sociales, n’appréhendait plus de se rendre en cours de français. Pourtant, quelques mois plus tard, l’enseignante avait demandé, durant une session consacrée au harcèlement scolaire, aux élèves d’exprimer leurs reproches à Evaëlle qui devait ensuite s’expliquer. Face à ses pleurs, l’enseignante s’était énervée et lui avait intimé de répondre aux questions, d’après les récits des élèves.

« Humiliations régulières » de l’enseignante envers Evaëlle

En février 2019, les parents d’Evaëlle avaient porté plainte contre des élèves et retiré leur fille du collège. Celle-ci était depuis suivie par un psychologue mais un nouveau comportement violent dans son nouveau collège avait provoqué son passage à l’acte.

La demande de renvoi, « c’est une très belle avancée, c’est ce qu’on attend depuis le début. Ça montre que c’est pris au sérieux », a déclaré à l’AFP Marie D., la mère d’Evaëlle. « On a réussi à sauver d’autres enfants en l’arrêtant », a-t-elle ajouté. « Ça désacralise le statut du professeur, ça montre qu’il faut aller jusqu’au bout et se faire entendre si possible avant le drame ».

Les parents d’Evaëlle, Marie (à dr.) et Sébastien dans leur maison à Herblay, le 12 décembre 2019. (Photo AURELIA MOUSSLY/AFPTV/AFP via Getty Images)

Dans son réquisitoire définitif, le parquet estime le « harcèlement moral caractérisé » et que les agissements de l’enseignante envers Evaëlle ont été « un déclencheur puis catalyseur du harcèlement perpétré par les élèves de sixième à son encontre ». Ses « humiliations régulières » ont provoqué la « dégradation majeure des conditions de vie » et une « fragilisation du psychisme de l’enfant », est-il écrit dans le document consulté par l’AFP.

L’enseignante ne peut plus enseigner et a une obligation de soins psychologiques

Son dossier administratif fait état d’une « professeur expérimentée, sérieuse et dynamique » mais l’enquête a brossé un autre portrait. La majorité des élèves interrogés ont rapporté qu’Evaëlle était une cible récurrente de la professeure qui lui criait dessus et l’isolait au fond de la classe. De manière générale, elle était décrite comme faisant une différence entre élèves et encline à s’en prendre à ceux en difficulté, une description confirmée par d’anciens collègues.

Son renvoi pour le harcèlement moral de deux autres collégiens à la même période a également été requis. Depuis 2021, elle ne peut plus enseigner à des mineurs et a une obligation de soins psychologiques.

« Je ne suis pas surprise de la position du parquet de Pontoise qui est dans son rôle d’accusation. Je conteste fermement les faits qui me sont reprochés. Je regrette que l’enquête et l’instruction aient été menées à charge », a réagi auprès de l’AFP l’enseignante.

Pour un troisième adolescent mis en examen en 2020, un non-lieu a été requis. « La protection des victimes doit évidemment être la priorité mais attention à ne pas accuser trop vite des enfants car cela laisse des traces indélébiles », a réagi son avocate, Me Marion Ménage.

L’Éducation nationale a par ailleurs indemnisé la famille au titre du préjudice moral, selon le rectorat de Versailles, en échange de l’abandon d’éventuelles poursuites envers l’État.

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