Une sécurité mondiale aux caractéristiques chinoises

L'Initiative de sécurité mondiale lancée par Pékin totalement axée sur le contrôle communiste

Par Stu Cvrk
1 mai 2022 18:56 Mis à jour: 1 mai 2022 19:36

Avec son « Initiative de sécurité mondiale » Xi Jinping essaie de faire valoir que la Chine est en mesure de diriger le monde, mais derrière cette appellation altruiste se cachent néanmoins les véritables intentions du Parti communiste chinois (PCC).

Régulièrement, la Chine fait part d’une nouvelle grande initiative : l’« Initiative ceinture et route » (ICR), « Made in China 2025 », la « route de la soie numérique » (et la « Chine numérique »), la « route polaire de la soie », etc. La dernière en date et certainement la plus grandiose : l’« Initiative de sécurité mondiale ».

Mais quels sont les véritables objectifs occultés par les termes rassurants de Xi Jinping lors de son allocution au Forum asiatique de Bo’ao le 21 avril ? L’Initiative de sécurité mondiale est en réalité la dernière parade en date du régime pour donner un aspect acceptable à ses activités.

Une vue générale du centre de conférence international du Forum de Bo’ao pour l’Asie (BFA) à Bo’ao, dans la province de Hainan (sud de la Chine). La conférence annuelle 2022 s’est tenue du 20 au 22 avril. (STR/AFP via Getty Images)

Examinons cela plus en détail.

Xi Jinping aime annoncer ces initiatives lors de grands discours prononcés face à un public tout acquis. Il a, par exemple, présenté l’ICR lors d’un discours à l’université Nazarbayev d’Astana, au Kazakhstan, en septembre 2013. Il a annoncé la route de la soie numérique lors d’un discours prononcé à l’occasion de l’exposition Chine‑ANASE à Nanning en septembre 2020. Il en va de même pour la récente Initiative de sécurité mondiale.

Une partie du cerveau de Xi Jinping et des autres dirigeants communistes est toujours focalisée sur la sécurité, la sécurité intérieure essentiellement, car c’est d’elle dont dépend entièrement la subsistance du PCC. Toutes les initiatives proposées par Xi Jinping poursuivent cet objectif de subsistance : il s’agit donc de renforcer le pouvoir, l’autorité et la sécurité du PCC, et ce, quel qu’en soit le prix.

Une des premières interventions de Xi Jinping sur la sécurité a eu lieu en mai 2014 lors d’un discours d’ouverture prononcé à la Conférence sur l’interaction et les mesures de confiance en Asie (CICA) à Shanghai.

« Nous devons (…) établir une nouvelle architecture de coopération régionale en matière de sécurité et construire ensemble un chemin commun, gagnant‑gagnant, pour la sécurité de l’Asie », a déclaré Xi Jinping… Bref, les inepties habituelles.

Toutefois, dans ce discours, une phrase laisse entendre les véritables intentions de Xi Jinping : « Nous devons nous conformer aux normes fondamentales qui régissent les relations internationales, telles que le respect de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale, la non‑ingérence dans les affaires intérieures, le respect des systèmes sociaux et des voies de développement choisies. »

Cette phrase annonce subtilement, en vertu de « l’intégrité territoriale » et de « la non‑ingérence dans les affaires intérieures » que le PCC ne tolérera aucune ingérence étrangère quand il sera temps de contraindre Taiwan à accepter sa gouvernance. Selon le régime, l’île de Taiwan fait partie du territoire de la RPC (République populaire de Chine), dont elle est la 23e province.

Depuis quelques années, Xi Jinping répète et enrichi ce charabia, et sa position sur la « sécurité » est soigneusement relayée par les médias chinois.

Par exemple, selon le Quotidien du Peuple au 2 avril Xi Jinping « a constamment mis en avant une certaine vision de la sécurité, qui serait commune, complète, basée sur la coopération, durable, et qui inspirerait les hommes à marcher vers une paix durable et une sécurité universelle ».

Parmi les autres mesures que Xi Jinping défend : le contrôle international des armements, le désarmement et la non‑prolifération, la stratégie nucléaire d’autodéfense, la participation active dans les opérations mondiales de maintien de la paix.

Malgré ces affirmations, le régime chinois refuse d’entamer des pourparlers sur la limitation des armes nucléaires stratégiques. Il a certainement violé la Convention sur les armes biologiques et toxiques (CABT) qu’il a ralliée en 1984, commet des génocides à l’encontre de ses propres minorités, ne cesse d’agrandir sa marine de guerre (qui est déjà la plus importante au monde), détient le programme de développement de missiles le plus actif et le plus diversifié du monde et construit à un rythme effréné des silos pour missiles balistiques intercontinentaux DF‑41 en Mongolie intérieure.

Les nouveaux missiles balistiques intercontinentaux DF-41 de l’armée chinoise, qui peuvent apparemment atteindre les États-Unis, lors d’un défilé pour célébrer le 70e anniversaire de la fondation de la République populaire de Chine en 1949, sur la place Tiananmen, le 1er octobre 2019. (Photo : Kevin Frayer/Getty Images)

Comme d’habitude, les actions menées par le régime sont plus révélatrices que ces propos si bienveillants. Les déclarations de Xi Jinping en faveur d’une « sécurité mondiale et durable » ne s’appliquent que pour le maintien du PCC à Pékin. Dans le même temps, sa volonté d’« inspirer la société humaine vers une paix durable » signifie en réalité : inciter les autres pays à instaurer une forme de paix en se soumettant à la suprématie militaire chinoise.

Xi Jinping a donc fait passer son discours sur la sécurité régionale pour la nouvelle « Initiative de sécurité mondiale ». Une initiative sortie du même moule que les autres et qui sert les objectifs du PCC.

Mais voici la phrase clé de son discours à Bo’ao le 21 avril : « Nous devons défendre le principe de l’indivisibilité de la sécurité, construire une architecture de sécurité équilibrée, efficace et durable, et nous opposer à la construction d’une sécurité nationale reposant sur l’insécurité dans d’autres pays. »

Ces mots visent directement Taiwan. Il s’agit de fournir au PCC un argument lui permettant d’œuvrer de manière arbitraire et de la façon qu’il jugera la plus appropriée pour faire face à toute « insécurité » associée à l’indépendance de Taiwan. Tout soutien dissuasif apporté à Taiwan pourrait être considéré comme une violation du principe « d’indivisibilité de la sécurité », qui implique que « les États ne renforceront pas leur sécurité au détriment de celle des autres États ».

Le concept lui‑même est absurde, surtout lorsqu’il est appliqué à Taiwan, car la vaste expansion militaire de la Chine communiste renforce clairement la sécurité de la Chine au détriment de la sécurité des autres États de la région (et du monde).

Un article du Quotidien du Peuple du 22 avril identifie six engagements liés à l’Initiative de sécurité mondiale. Il convient de relever celui‑ci : « Nous nous engageons à respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale des différents pays, à poursuivre la non‑ingérence dans les affaires intérieures des autres et à respecter la voie de développement et le système social choisis en indépendance par les peuples ; »

Une fois de plus, les actions menées par la Chine sont plus explicites que les mots et exposent l’hypocrisie qui caractérise la diplomatie de Pékin. La première phrase légitime le refus du PCC de condamner l’invasion de l’Ukraine par la Russie (qui est pourtant une violation directe de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine) tout en augmentant l’importation d’hydrocarbures produits par la Russie depuis le début de la guerre.

La deuxième phrase concernant la « non‑ingérence dans les affaires intérieures » vise de toute évidence un quelconque soutien étranger à Taiwan.

La dernière phrase concernant « la voie de développement et le système social choisis en indépendance par les peuples » est particulièrement risible et sous‑entend que le peuple chinois a choisi démocratiquement, au fil du temps, le maintien du régime totalitaire du PCC.

Réflexions finales

Les propos altruistes de Xi Jinping sur la sécurité mondiale masquent l’expansion continue des capacités de l’Armée populaire de libération (APL). Cette expansion a pour but d’assurer la sécurité et le maintien du régime communiste à Pékin, mais également d’intimider et de convaincre les autres pays à chercher des arrangements pacifiques avec une Chine montante et belliqueuse. La nouvelle initiative de Xi Jinping devrait bien plus s’intituler « Sécurité mondiale aux caractéristiques chinoises ».

Stu Cvrk a pris sa retraite en tant que capitaine après avoir servi 30 ans dans la marine américaine dans diverses fonctions d’active et de réserve, avec une expérience opérationnelle considérable au Moyen‑Orient et dans le Pacifique occidental. Fort de sa formation et de son expérience en tant qu’océanographe et analyste de systèmes, Stu Cvrk est diplômé de l’Académie navale des États‑Unis, où il a reçu un enseignement libéral classique qui sert de base à ses commentaires politiques.

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Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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