SCIENCES

Une structure en bois vieille d’un demi-million d’années découverte en Afrique

septembre 21, 2023 11:38, Last Updated: septembre 21, 2023 11:42
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Des archéologues ont mis au jour la plus ancienne structure en bois jamais façonnée par des humains, vieille de près d’un demi-million d’années, une construction complexe qui suppose des capacités techniques avancées chez les premiers hommes, selon une étude parue mercredi.

Exceptionnellement bien préservée, la structure a été découverte sur le site préhistorique des chutes de Kalambo dans l’actuelle Zambie, et date d’au moins 476.000 ans, avant l’apparition supposée de notre propre espèce, Homo sapiens.

Elle consiste en deux rondins emboîtés, reliés transversalement par une entaille pratiquée intentionnellement afin de construire une structure, probablement la fondation d’une plate-forme surélevée, d’un passage ou d’un habitat, selon l’étude publiée dans Nature. Une collection d’outils en bois, dont un bâton de fouille, a également été mise au jour sur le site. L’utilisation du bois par l’homme à des âges aussi anciens avait déjà déjà prouvée, mais pour un usage limité : faire du feu, ou tailler en pointe des bâtons pour la chasse ou la cueillette.

La plus ancienne structure en bois connue à ce jour remonte, elle, à seulement 9000 ans, précise à l’AFP Larry Barham, professeur à l’Université britannique de Liverpool, premier auteur de l’étude. L’archéologue ne s’attendait pas à trouver un tel trésor en fouillant le site préhistorique de Kalambo, situé au bord sur la rivière du même nom, au-dessus de chutes d’eau hautes de 235 mètres.

Une découverte rare

« Il est rare de trouver du bois dans des sites aussi anciens car généralement il pourrit et disparaît. Mais aux chutes de Kalambo, des niveaux d’eau élevés en permanence l’ont préservé », expliquent les auteurs dans un communiqué.

Dans les années 1950 et 1960, de premières fouilles avaient déjà livré des morceaux de bois, sans possibilité de les dater. Les nouvelles pièces, découvertes en 2019, ont livré leur âge avec la datation par luminescence des dépôts entourant les objets – la méthode permet de déterminer quand ils ont été exposés pour la dernière fois à la lumière du Soleil avant d’être enfouis, détaille le professeur Geoff Duller de l’Université d’Aberystwyth au Pays de Galles, co-auteur.

Verdict : les dépôts ont au moins 476.000 ans, « ce qui prouve que ce site est beaucoup plus ancien qu’on ne le pensait », souligne le scientifique. Et qu’il a été occupé bien avant Homo sapiens, dont les plus anciens fossiles remontent à environ 300.000 ans.

Les recherches n’ont pas pu déterminer quelle lignée humaine était à l’œuvre, mais le Pr Barham n’exclut pas d’avoir affaire à Homo heidelbergensis, une espèce éteinte qui a vécu entre environ 700.000 et 220.000 ans avant notre ère. Car à part le fossile d’un crâne d’Homo heidelbergensis, découvert en Zambie dans les années 1920, « il n’y a pas d’autre homininé connu dans la région ».

De quoi changer notre vision sur ces ancêtres

La découverte a, quoiqu’il en soit, « changé sa vision » de ces ancêtres. « Ils ont utilisé leur intelligence pour transformer leur environnement et se faciliter la vie, ne serait-ce qu’en fabriquant une plate-forme pour s’asseoir en bord de rivière », décrypte l’archéologue. Et réussi à fabriquer « quelque chose qu’ils n’avaient jamais vu auparavant » : contrairement à la taille d’un bâton, facilement observable et imitable, la création de deux pièces en vue de leur assemblage montre selon lui des facultés d’abstraction.

« Le fait qu’ils aient pu travailler le bois à grande échelle suppose des capacités cognitives comme la planification, la visualisation du produit fini avant sa conception, le déplacement des objets mentalement dans l’espace », observe la préhistorienne Sophie Archambault de Beaune, professeure à l’Université Jean Moulin Lyon 3, qui n’a pas participé aux travaux. « Ces capacités étaient déjà supposées à partir de l’étude des outils en pierre taillée », courants dans ces temps reculés, souligne néanmoins la chercheuse interrogée par l’AFP.

Selon les auteurs de l’étude, la structure était propice à « une occupation durable », ce qui « remet en question l’idée selon laquelle ces premiers hommes étaient nomades ». « Aux chutes de Kalambo, ils disposaient non seulement d’une source d’eau pérenne, mais la forêt qui les entourait leur fournissait suffisamment de nourriture pour leur permettre de se sédentariser et de construire des structures », avancent-ils. Une hypothèse qui reste à prouver, car il pouvait aussi bien s’agir « d’installations saisonnières », commente Sophie Archambault de Beaune.

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