Vers une pénurie de lait cet hiver, alertent les éleveurs: « On fonce dans le mur »

Par Nathalie Dieul
8 septembre 2022 21:21 Mis à jour: 8 septembre 2022 21:21

Manque d’eau, chaleur, inflation, forte hausse des prix de l’énergie : tous ces facteurs inquiètent les éleveurs, qui alertent sur les risques de pénurie de lait pendant l’hiver 2022.

« Là, avec la rentrée, on ne peut pas vraiment parler de pénurie. Mais on va clairement y arriver dans quelques mois si rien ne change. On fonce dans le mur », s’inquiète Stéphane Bulot, éleveur et administrateur à la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL), en entrevue à Actu.fr.

Un grand nombre de facteurs vient intensifier une problématique déjà existante. « Ça fait deux ans que la production de lait diminue en France. On est à -1,5 %. La décroissance est actée », a expliqué à La Presse de la Manche Ludovic Blin, président de la section Lait pour le syndicat FDSEA de la Manche. Depuis cette déclaration faite début août, d’autres facteurs ont amplifié le phénomène.

« Les vaches ne trouvent pas assez d’herbe dans le champ »

D’une part, le manque de pluie et les fortes températures ont empêché l’herbe des prés, le maïs et la luzerne de pousser comme d’habitude pour nourrir les vaches afin qu’elles donnent du lait.

« À cause du manque de pluie, les vaches ne trouvent pas assez d’herbe dans le champ. Les quelques unes qui restent sont très pauvres en vitamines et en nutriments », raconte à France Bleu Eric Bourquardez, producteur agricole à Villars-le-sec dans le Territoire de Belfort. Il a dû commencer à piocher dès début août dans les stocks de fourrages prévus pour nourrir ses animaux cet hiver, comme d’autres éleveurs. « Si elles sont moins bien nourries que d’habitude, il y aura forcément une production de lait moins importante », précise-t-il.

Des dépenses additionnelles

D’autres facteurs viennent rendre la production de lait plus difficile. L’explosion des prix de l’énergie et des matières premières, alors que les éleveurs réclament une hausse du prix du lait pour compenser les dépenses additionnelles auxquelles ils font face. Même si Intermarché et System U ont accepté les hausses demandées par les agriculteurs, la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL) rappelle dans un communiqué que « ces hausses doivent revenir aux paysans avant qu’il ne soit trop tard ».

L’un des exemples de la flambée du prix des matières premières qui impacte les agriculteurs est celle des tourteaux, intégrés à l’alimentation des vaches. « On donne moins de tourteaux aux vaches, qui produisent moins de lait en retour », remarque Gaël Drouet, agriculteur.

« Nous avons déjà un métier difficile. À cela il faut ajouter toutes les crises, et maintenant la sécheresse, c’est en train de devenir de plus en plus compliqué », s’inquiète de son côté Jean-Noël Monnier, président de la Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles (FDSEA) dans le Territoire de Belfort.

La vente d’une partie des troupeaux pour acheter du fourrage

Face à toutes ces nouvelles réalités, certains éleveurs sont obligés de vendre une partie de leurs troupeaux, ce qui risque d’avoir un impact important sur la production de lait. Rien que dans la Manche, la Chambre d’agriculture estimait l’année dernière que le département allait perdre 45.000 bovins.

« À force de taper, il est probable que la Normandie perde, comme en Bretagne, un nombre significatif de bovins. Soit on admet qu’il faut une rémunération solide des éleveurs, soit ça s’arrêtera », a déclaré Pascal Férey, président de la Chambre d’agriculture de la Manche. C’est en novembre 2021 qu’il a fait cette déclaration, soit bien avant la guerre en Ukraine et la sécheresse de l’été 2022.

« Il est inconcevable que des éleveurs soient acculés à la vente d’une partie de leurs troupeaux afin d’acheter du fourrage pour le reste, c’est pourtant la réalité de nombreuses exploitations », se désole la FNPL ce 30 août 2022.

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