Anonymous contre Daesh : la difficile traque sur Twitter

Par Epoch Times
5 avril 2016 14:00 Mis à jour: 30 octobre 2019 14:14

La blogosphère des réseaux sociaux, lieu privilégié pour la propagande de Daesh, fait l’objet d’une lutte acharnée entre les hackers et groupes affiliés à Anonymous, et les terroristes ou leurs sympathisants. Récemment, des activistes ont levé la voix sur les pratiques peu coopératives de Twitter. Les administrateurs du réseau social ont indiqué leur volonté de fermer les comptes des terroristes, mais les activistes rapportent une situation contraire : d’après eux, non seulement ces comptes n’ont pas été fermés, mais Twitter s’en est pris à leurs comptes.

125 000 comptes supprimés

En 2015, Twitter a indiqué avoir supprimé 125 000 comptes liés à des terroristes présumés. D’après les administrateurs du réseau, ces comptes « menaçaient ou faisaient la promotion d’actes terroristes principalement liés à ISIS ».

Cependant, un son de cloche différent s’est fait entendre de la part de la communauté anti-terroriste agissant sur le réseau. D’après des représentants de cette communauté, Twitter s’est attribué le crédit de leur travail ; de plus, de nombreuses failles persistent sur Twitter, permettant aux terroristes de poursuivre leurs opérations de recrutement.

Plusieurs groupes de hackers, dont Anonymous, se sont ralliés contre Daech dans une campagne digitale nommée #OpISIS. La plupart des participants gardent leur identité secrète, mais affichent au grand jour le résultat de leurs activités, en publiant par exemple des listes de partisans et de recruteurs de Daech. Ils encouragent également la communauté de Twitter à indiquer tout compte lié à l’organisation terroriste.

La campagne d’Anonymous a commencé peu après les attentats parisiens. D’après un tweet d’#OpParisOfficial, le groupe a déjà fait fermer plus de 11 000 comptes Twitter liés à Daech. GhostSec, un autre groupe de hackers, a signalé 19 568 comptes Twitter faisant la promotion du terrorisme. Ce groupe a également permis aux autorités de prévenir à temps des projets d’attentats dans un marché de Djerba, en Tunisie et à New York City en 2015.

« Qui a suspendu 125 000 comptes ? Anonymous, des groupes affiliés à Anonymous et des citoyens ordinaires », a indiqué Anonymous dans un commentaire. « Vous devriez réaliser que si nous arrêtions de signaler les comptes des terroristes et les images qui les accompagnent, Twitter serait submergé par leur propagande », indique WauchulaGhost, appartenant au groupe de hackers.

Après le communiqué de Twitter, les groupes de hackers ont rencontré un nouveau problème : beaucoup de participants aux campagnes anti-Daech ont vu leur compte supprimé. Le réseau social semble s’en être pris à ceux qui combattaient le terrorisme digital, supprimant les comptes un par un ou par groupes.

Au vu des déclarations, ce développement a été accueilli comme une nouvelle douche froide par les membres du groupe. WanchulaGhost, contacté par Epoch Times, a lui-même fait cette expérience. Le 28 février, 15 comptes Twitter dont le sien ont été supprimés. Les partisans du groupe anti-terroriste ont inondé le réseau social de tweets, et deux heures plus tard, la plupart des comptes étaient réactivés. Cependant, WanchulaGhost notifie n’avoir « jamais reçu de mail de Twitter ».

Si nous arrêtions de signaler les comptes des terroristes et les images qui les accompagnent, Twitter serait submergé de propagande terroriste.

– WauchulaGhost, activiste Anonymous

Une semaine plus tard, Twitter a finalement fait savoir que des comptes avaient été fermés pour « harcèlement » ; mais aux yeux des activistes anti-Daech, il est difficile de croire que leur activité relèverait de cette qualification.

La communauté des terroristes

Facebook et Twitter sont les deux principales plateformes utilisées par la propagande de Daech. D’après un rapport publié en février par la George Washington University, sur Twitter, environ 2 000 nouveaux comptes pro-Daech sont créés chaque jour.

Parmi ces derniers, un noyau dur de 350 comptes forme le principal de l’activisme pro-Daech. Ces comptes permettent de rétablir le réseau de followers à chaque fermeture de comptes. Les hackers de la campagne #OpISIS gardent cependant trace de ces comptes principaux et tentent activement de les mettre hors course.

WanchulaGhost a déclaré à Epoch Times, que bien que Twitter affirme que 125 000 comptes terroristes ont été supprimés, aucune des informations recueillies par le groupe à partir des listes ne confirment cette déclaration. D’après le rapport de l’université, Daech renouvelle les comptes Twitter supprimés en en créant de nouveaux. Depuis les 350 comptes principaux, l’organisation fait savoir à ses partisans les noms des comptes nouvellement créés.

WanchulaGhost remarque encore que si Twitter entreprend de supprimer les nouveaux comptes, beaucoup d’entre eux ont l’opportunité de rester actifs durant des semaines, et continuent ainsi la propagation d’images et de vidéos de propagande. Une situation « difficile à admettre », d’après le hacker, d’autant que ces comptes seraient « signalés par beaucoup de personnes ».

Contacté par Epoch Times, Twitter rapporte que le réseau « a de nombreuses équipes dans le monde qui enquêtent sur les listes rapportant les comptes terroristes, et qu’elles travaillent de pair avec les autorités quand cela est approprié ». Le représentant de Twitter fait aussi savoir que la réglementation du réseau exclut les « menaces et le contenu faisant la promotion de la violence, dont les menaces et la promotion du terrorisme ». Durant le premier semestre 2015, le réseau social aurait ainsi reçu 2 436 requêtes de la part des autorités américaines.

« Twitter n’a même plus besoin de les chercher »

Malgré cela, WanchulaGhost pointe les lacunes du réseau social, incapable de donner aux utilisateurs le moyen de signaler les contenus promulguant le terrorisme. « Si la violence et le terrorisme n’ont pas leur place sur Twitter, peut-être que les administrateurs devraient ajouter des options spécifiques. Pour l’instant, seules les violences et les harcèlements ciblés retiennent leur attention. Si l’on avait une option permettant de rapporter un contenu terroriste, tout serait plus simple ».

La communauté antiterroriste et les partisans de #OpISIS espèrent que dans le futur, Twitter mettra plus d’effort dans la coopération permettant de signaler et d’arrêter les terroristes. « Anonymous rapporte jour et nuit les comptes liés au terrorisme », souligne le hacker, qui estime qu’ « à ce stade, Twitter n’a même plus besoin de les chercher ».

D’après le rapport de l’université George Washington, les efforts globaux ayant permis de fermer les comptes utilisés par Daech ont eu un fort impact pour limiter l’action du groupe terroriste. Pour chaque compte fermé, les auteurs de l’enquête remarquent que les partisans de Daech doivent en créer de nouveaux, ce qui entraîne une « chute drastique du nombre de followers de l’organisation terroriste » sur Twitter.

« Ces suppressions de comptes ont un effet réel sur [les partisans de Daech] qui veulent recommencer et continuer leur actions ; cela diminue à la fois le rythme des publications et la taille de leur réseau », soutiennent-ils. Le 24 mars, suite aux attentats de Bruxelles, le groupe Anonymous a déclaré dans un communiqué une « guerre totale » à l’organisation terroriste. « Tant qu’il y aura des attaques à travers le monde, nous ne nous arrêterons pas […]. Nous défendrons le droit à la liberté », ont-ils indiqué.

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