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Matzneff : les mœurs d’une certaine élite intellectuelle des années 70-80, adepte de la pédophilie et du tourisme sexuel

Il y a ceux qui découvrent les faits, abasourdis, et ceux qui savaient sans trop voir le mal: les révélations, à paraître jeudi, d'une éditrice séduite, adolescente, par l'écrivain Gabriel Matzneff font s'entrechoquer deux époques et deux regards sur la pédophilie.

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Le 12 juillet 1990, le président de l'association française SOS Racisme Harlem Desir, l'homme d'affaires et mécène français Pierre Bergé et l'écrivain français Gabriel Matzneff posant dans le jardin de la "Maison des Ecrivains" à Paris, lors de leur première anniversaire de la Maison chinoise de la démocratie.

Photo: PIERRE GUILLAUD / AFP via Getty Images

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Durée de lecture: 8 Min.

Il y a ceux qui découvrent les faits, abasourdis, et ceux qui savaient sans trop voir le mal: les révélations d’une éditrice racontant sa relation sous emprise, alors qu’elle avait 14 ans, avec l’écrivain Gabriel Matzneff, font s’entrechoquer deux époques et deux regards sur la pédophilie.
Le goût autoproclamé de l’écrivain de 83 ans pour les « moins de 16 ans » et pour le tourisme sexuel avec de jeunes garçons en Asie avait jusqu’ici très peu fait ciller. La sortie, prévue jeudi, du livre « Le Consentement » de Vanessa Springora, 47 ans, semble être en train de changer la donne.
Apportant son « soutien » à « toutes les victimes » de l’écrivain, le ministre de la Culture Franck Riester a ainsi rappelé samedi que « l’aura littéraire n’est pas une garantie d’impunité ».

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Autre signe de cette bascule: la séquence où Bernard Pivot interviewe Gabriel Matzneff est devenue virale (près de 900.000 vues) et fait scandale, près de trente ans après sa diffusion. Il y est interrogé de manière badine sur ses conquêtes sexuelles. A l’exception de l’écrivain québécoise Denise Bombardier, lui lançant qu’il aurait « des comptes à rendre à la justice », personne ne réagit.
Tentant de se défendre, l’ancien animateur d' »Apostrophes » a plaidé le principe du « autres temps, autre moeurs », affirmant que dans « les années 70 et 80, la littérature passait avant la morale », provoquant une vague d’indignation.

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Même si elle est depuis longtemps proscrite par la loi, la pédophilie a été tolérée et promue dans les années 70 par des intellectuels socialistes invoquant la liberté sexuelle et l’héritage de Mai 68 avec son slogan « il est interdit d’interdire ».
Des pétitions ont été signées, comme celle de 1977 relayée par Libération, pour défendre trois hommes poursuivis pour des agressions sexuelles d’enfants de 12 à 13 ans. Parmi les signataires figuraient les personnalités de gauche comme Jack Lang et Bernard Kouchner.

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Cette tolérance s’est poursuivie dans les années 80, période où se déroule le livre de Vanessa Springora, avant que le vent ne tourne dans les années 90, menant à la condamnation unanime de la pédophilie et au mea culpa des journaux qui l’avaient défendue.
Quand la littérature passe avant la morale
Un retournement né d’un début de prise de parole des victimes et de la multiplication des associations de défense à l’enfance, souligne Pierre Verdrager, auteur d’un livre sur « comment la pédophilie est devenue scandaleuse ». « On commence à prendre conscience que cette libération des corps peut poser des problèmes quand elle concerne la sexualité des enfants avec les adultes », affirme le sociologue.
Les crimes de Marc Dutroux en Belgique, l’affaire Outreau en France viendront renforcer ce sentiment.
Malgré ce contexte de dénonciation de la pédophilie, »je rappelle que Matzneff n’a pas été condamné », estime Etienne Gernelle, le directeur du Point, où l’écrivain tient une chronique. « Les mêmes journaux qui, il y a trente ans, disaient que l’amour avec les enfants c’est bien, au nom d’une morale soixante-huitarde, voudraient virer ces mêmes gens », souligne celui qui n’entend guère se séparer de sa plume. Et de dénoncer un climat où certains appellent à rayer de la carte les artistes mis en cause dans des affaires de violences sexuelles.
« J’ai beau chercher, je ne comprends toujours pas en quoi le fait de ne plus tolérer qu’un dandy pervers de 40 ou 50 ans mette son sexe dans la bouche d’une enfant de 13 ans ou exploite des petits garçons en Asie du Sud-Est est une menace pour la création littéraire… », a estimé quant à lui l’essayiste et homme politique de gauche Raphaël Glucksman.

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La sortie de « Consentement de Vanessa Springora le 2 janvier
Vanessa Springora raconte dans son livre avoir entamé une relation, sous emprise, avec l’écrivain à l’âge de 13 ans au milieu des années 1980. Il était alors presque quinquagénaire et multipliait les relations avec de jeunes filles et jeunes garçons, parfois dans le cadre de tourisme sexuel en Asie.
Dans ce roman autobiographique, « Consentement », Vanessa Springora décrit comment elle a été séduite par Gabriel Matzneff. « Elle raconte comment il l’a sodomisée, la première fois elle avait 13 ans et demi, elle croyait qu’il l’aimait, ensuite sa vie a été un enfer », relève Mme Bombardier. La propre mère de l’adolescente « savait qu’il était pédophile » et le recevait malgré tout « parce qu’il était un des bonzes de la littérature française ».
Lors de l’émission « Apostrophes » en mars 1990, Denise Bombardier avait été la seule invitée à réagir, jugeant que Gabriel Matzneff aurait « des comptes à rendre à la justice » s’il n’avait pas une telle « aura littéraire ».
« Dans ce monde-là, ils parlaient de moi comme la mal-baisée », rappelle l’auteure québécoise à l’AFP. « Je n’ai plus jamais eu de critique dans le Monde ».

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« Il y a encore quelques jours, (l’ancienne directrice des pages littéraires du Monde) Josyane Savigneau a soutenu Matzneff et dit que j’étais une purge, l’écrivain Frédéric Beigbeder a dit qu’il resterait son ami: ces gens-là appartiennent à une caste complètement à part », regrette-t-elle.
« Ce qui me réjouit, c’est de voir comment les jeunes générations sont scandalisées de se rendre compte que c’était comme ça en France », ajoute la chroniqueuse au Journal de Montréal.