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Avant le minimalisme, il y avait les moines
Le minimalisme d’aujourd’hui n’invente ni le silence, ni la sobriété, ni l’intention. Il les retrouve. Dans les ermitages et les abbayes, des générations de moines faisaient déjà du dépouillement un engagement concret — plus spirituel que stylistique, plus existentiel que tendance.

Les traditions monastiques enseignent depuis longtemps que posséder moins de biens permet de libérer l'esprit et le cœur pour des aspirations plus élevées.
Photo: hamadalzaabi/Shutterstock
Une multitude de livres ont envahi les librairies, prétendant montrer comment vivre plus pleinement en adoptant la simplicité. Parmi eux, The Life-Changing Magic of Tidying Up : The Japanese Art of Decluttering and Organizing (La Magie du rangement : L’art japonais du rangement) de Marie Kondo, vendu à plus de 10 millions d’exemplaires. Pourtant, comme le souligne Heidi Deddens dans un article pour Comment Magazine, l’art japonais du rangement décrit par Marie Kondo va bien au-delà d’une simple maison bien rangée.
Heidi Deddens a justement souligné qu’au cœur du minimalisme réside une aspiration spirituelle, un désir de se départir du superflu pour découvrir le sens et l’épanouissement intérieur, la source pure de la vie. Par cette quête fondamentale de liberté spirituelle et par les moyens concrets mis en œuvre pour l’atteindre (limiter les possessions, embrasser le silence et la simplicité, pratiquer la pleine conscience), le minimalisme s’apparente à une tradition bien plus ancienne : le monachisme.
« Le minimalisme, défini comme un art de vivre avec moins, n’a rien d’un phénomène nouveau, souligne Heidi. Il existe depuis des siècles, sous des appellations variées, le plus souvent associé aux traditions monastiques du christianisme, du bouddhisme et d’autres religions. »

Se délester de possessions peut libérer de l’espace pour plus de clarté, de concentration et une vie intérieure plus riche de sens. (imaginima/Getty Images)
Mystiques et monastiques

Depuis des siècles, la vie monastique offre une alternative à la société qui valorise le statut social, la réussite et l’acquisition de biens. (Atelier2J/Shutterstock)
Cinq siècles plus tard, s‘inspirant de la tradition des Pères du désert, saint Benoît de Nursie a renouvelé et façonné la tradition monastique occidentale aux Ve et VIe siècles. La Règle de saint Benoît est devenue un guide pour d’innombrables monastères et pratiques monastiques à travers les siècles. Le texte fondateur de Benoît est remarquable par sa concision et sa simplicité, sans oublier sa profonde réflexion spirituelle sur la façon dont l’accumulation de possessions anesthésie l’âme : « Sans l’ordre de l’abbé, nul ne peut prétendre donner, recevoir ou conserver quoi que ce soit en son nom propre, absolument rien — ni livre, ni tablettes, ni stylet — en somme, pas un seul objet », écrit Benoît, « d’autant plus que les moines ne peuvent disposer librement de leur propre corps ni de leur propre volonté. Pour leurs besoins, ils doivent s’adresser au père du monastère et rien de ce que l’abbé n’a donné ou autorisé ne leur est permis.» Un minimalisme pour le moins extrême.

Les préceptes de saint Benoît, empreints de retenue et de simplicité, ont façonné des siècles de pratique monastique. (Nastasic/Getty Images)
En quête d’une existence plus spirituelle, les minimalistes modernes ont redécouvert, presque par hasard, des pratiques monastiques millénaires ; toutefois, dans la culture populaire, ces pratiques sont dépouillées de leur dimension religieuse explicite. Les moines ont depuis longtemps compris le paradoxe du « moins, c’est plus », et que la clarté d’esprit et de cœur s’accroît à mesure que l’on se débarrasse du superflu.
La page contient une citation du célèbre moine Thomas Merton : « On peut passer sa vie entière à gravir les échelons du succès pour s’apercevoir, une fois arrivé au sommet, que l’échelle est appuyée contre le mauvais mur.» Voilà le genre de chose qu’on pourrait lire sur un blog minimaliste moderne.
Minimalistes d’aujourd’hui
Becca Ehrlich, une minimaliste chrétienne convaincue, estime que les moines ont beaucoup à apprendre aux personnes intéressées par le minimalisme. Sur son blog, elle cite le site web du monastère de la Sainte-Croix : « La vie monastique offre une alternative à l’importance accordée par la société au statut social, au consumérisme et à l’accumulation de biens, ainsi qu’à l’idée que notre valeur personnelle ne se mesure pas à notre réussite, à ce que nous faisons, produisons ou possédons.»

Les pratiques de solitude et de contemplation demeurent essentielles à la fois à la sagesse monastique et aux aspirations minimalistes modernes. (Olga Pankova/Getty Images)

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