Face aux «nouveaux OGM» l’Autriche, pays du bio, entre en résistance

Par Epoch Times avec AFP
15 août 2023 10:50 Mis à jour: 15 août 2023 19:05

« Ils sont gonflés de penser à un truc pareil » : fermière dans le nord-est de l’Autriche, Beate Brenner, 47 ans, ne décolère pas depuis qu’elle sait que Bruxelles veut assouplir sa réglementation des OGM pour doper l’édition génomique.

Avec son mari Walter, 48 ans, elle cultive sur soixante hectares dans le village de Schönfeld an der Wild des céréales depuis 2002. Sous le label « bio », comme près d’un quart des producteurs de ce pays, champion d’Europe en la matière. Et craint la contamination de ses produits naturels par les « nouvelles techniques génomiques » (NGT) modifiant le matériel génétique des plantes mais sans ajout extérieur, contrairement aux organismes génétiquement modifiés (OGM).

Un champ avec d’anciennes variétés de céréales dans la ferme biologique de Beate et Walter Brenner à Schoenfeld an der Wild, en Basse-Autriche. (Photo ALEX HALADA/AFP via Getty Images)

« Chez nous, les gens ont confiance »

« Chez nous, les gens ont confiance parce qu’ils savent comment on travaille », plaide-t-elle sous un ciel orageux en servant dans son petit magasin attenant l’une de ses clientes, Susi Pofi, qui ne veut pas entendre parler non plus d’un changement des règles. « On parle quand même de notre santé », s’insurge cette voisine de 64 ans, lorsque la productrice lui trace les grandes lignes du projet d’accord en discussions. « Il faut faire du bruit pour qu’ils reculent », tranche-t-elle.

Selon une enquête de la chambre de commerce, 94 % des Autrichiens sont favorables au maintien de l’obligation d’étiquetage pour tous les aliments génétiquement modifiés. Ils semblent peu sensibles aux arguments de la Commission européenne, pour qui la législation encadrant drastiquement les OGM freine le développement des NGT, nécessaires pour s’adapter au changement climatique. Créer des variétés plus résistantes à la sécheresse ou pauvres en gluten ne devrait pas nécessiter les laborieuses procédures d’autorisation, de traçabilité ou de surveillance imposées au transgénique. Elle a le soutien de la plupart des États membres comme du parti conservateur (PPE), premier groupe au parlement de Strasbourg. Et espère finaliser le texte avant les élections européennes, en juin 2024.

L’industrie agro-alimentaire est dans les starting-blocks : 90 demandes d’autorisation pour des cultures NGT, dont un tiers sont à des stades de recherche avancée, étaient déposées début juillet. En Belgique, le maïs est déjà testé en plein champ. En Suède, ce sont les pommes de terre qui ont été plantées. Et alors que l’Europe est la région du monde qui se réchauffe le plus vite, les organisations professionnelles agricoles font pression. Mais certains font de la résistance. Les partis européens de gauche exigent une analyse des risques et des moyens de détection pour tracer les nouveaux venus lâchés dans la nature.

Elle dénonce la « soumission » de Bruxelles aux lobbys

Et avec un label, Bio Austria, fort de 13.500 adhérents qui se veut la plus grosse association de défense de l’agriculture biologique sur le continent, l’Autriche mène la fronde. En partenariat avec l’ONG Global 2000, Bio Austria a recueilli en décembre près de 421.000 signatures contre l’assouplissement des directives. Elle dénonce la « soumission » de Bruxelles aux lobbys ainsi qu’un « recul de la transparence alimentaire ».

« La porte d’entrée du nouveau génie génétique doit rester aussi sécurisée que celle des OGM », plaide sa présidente, Gertraud Grabmann, qui a l’oreille du gouvernement à Vienne. Dominé par les conservateurs défendant les petits producteurs traditionnels ayant misé sur la qualité pour s’imposer dans le marché unique, il compte aussi des écologistes vent debout contre les « apprentis sorciers ».

L’agricultrice biologique Beate Brenner avec un panier de pains et de pâtisseries dans son magasin à Schoenfeld an der Wild, en Basse-Autriche. (Photo ALEX HALADA/AFP via Getty Images)

Le changement représente un « danger » qui « prive les consommateurs de leur liberté de choix », estiment trois ministres, qui promettent ensemble de faire « tout ce qui est en leur pouvoir pour conserver les règles » actuelles. Devant ses équipements flambants neufs où la farine est fraîchement moulue avant de servir à la confection des pâtes et du pain, Beate Brenner compte sur eux. Elle veut garder « ses bons produits » authentiques qui font « la fierté de l’Autriche ».

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