Bertrand Alliot, porte-parole d’Action Écologie : « Les partis politiques écologistes, et notamment en France, ont très vite délaissé les questions environnementales pour basculer sur d’autres sujets »

Par Julian Herrero
9 décembre 2023 16:05 Mis à jour: 9 décembre 2023 16:41

ENTRETIEN – Pour Bertrand Alliot, porte-parole de l’association Action Écologie, il faut d’urgence ralentir les politiques de décarbonation qui ont des effets désastreux sur l’économie et l’environnement. Il regrette aussi que les partis écologistes français traditionnels aient rapidement abandonné les sujets environnementaux au profit de thématiques très différentes. L’ingénieur-maître en gestion de l’environnement s’en prend également aux multiples conférences internationales (COP, protocoles, sommets…) qu’il qualifie de « cirque permanent ».

Epoch Times : Monsieur Alliot, vous êtes porte-parole d’Action Écologie, une association qui se veut être « l’alternative à l’écologie politique », combattant le « catastrophisme » et qui ramène l’écologie vers « les seuls sujets environnementaux ». À quand remonte la création de cette association ? Nous avons le sentiment qu’Action Écologie a été conçue comme une réponse aux partis, aux associations et aux ONG écologistes traditionnelles. Est-ce le cas ? Vous avez longtemps milité au sein de la Ligue de protection des oiseaux (LPO) avant de la quitter. Que reprochez-vous à ces partis, associations et ONG ?

Bertrand Alliot : Action Écologie a été créée en 2020. Je l’ai rejointe un an plus tard et je suis devenu porte-parole. L’association peut compter sur 4000 donateurs. Nous sommes effectivement anti-catastrophistes. Aujourd’hui, les discours écologistes, concernant notamment le climat et la biodiversité, sont caricaturaux et anxiogènes. Sur ces deux sujets, nous estimons qu’il y a lieu de faire diminuer la pression. Ce n’est pas parce qu’il y a un réchauffement climatique qu’il y aura forcément une catastrophe climatique associée. Sur la biodiversité, nous sommes aussi assez critiques : parler d’effondrement, notamment dans les pays européens, est largement exagéré. Les choses sont beaucoup plus compliquées que ça. Par exemple en Europe, et plus particulièrement en France, il y a énormément de bonnes nouvelles. Nous avons par ailleurs fait une étude sur ce sujet qui relativise beaucoup les inquiétudes.

Action Écologie apporte une autre approche des sujets environnementaux que les associations, ONG et partis écologistes plus classiques. Je crois que les ONG commencent à faire beaucoup de mal à notre pays. Au moment de leur création, elles ont contribué à faire évoluer positivement les choses. Il y a eu des normes et des réglementations utiles. Mais aujourd’hui, réalisant qu’elles n’ont plus de réelles missions à accomplir, elles sont obligées de se radicaliser.

Cela explique en partie le catastrophisme qu’elles alimentent sans cesse. Et ce qui est assez incroyable, c’est que la transition écologique qu’elles défendent répond très mal aux enjeux environnementaux qui doivent être pensés en dehors de la question du CO2.

En ce qui concerne les partis politiques, notamment en France, je crois qu’ils ont assez vite délaissé les questions environnementales et ont basculé sur d’autres sujets : immigration, droits sociétaux …

Ce qui est actuellement fait en matière de politiques publiques pour le climat a des effets désastreux sur l’environnement. Le développement des éoliennes et des panneaux solaires, c’est-à-dire des énergies renouvelables intermittentes, est un bon exemple. On peut également citer la voiture électrique. Ceux qui prônent ces politiques prennent uniquement en compte les émissions de CO2 comme critère de performance. En somme, la décarbonation est le seul projet qui persiste et tous les autres domaines sont oubliés : consommation excessive de matière première, pollution de l’eau et des sols, lutte contre les nuisances sonores, etc. Toutes les ONG et ceux qui les suivent, au premier rang desquels se trouvent nos gouvernants, sont devenus monomaniaques du CO2. Je pense qu’il faut vraiment arrêter de donner de l’argent à ces ONG dont les actions sont désormais nocives pour l’environnement. Nous avons d’ailleurs récemment lancer l’Appel à la Désescalade pour que « les pouvoirs publics rompent avec l’idéologie qui sous-tend la transition dite « écologique ». Vos lecteurs peuvent le signer en allant sur notre site Internet.

Sur son site internet, Action Écologie, appelle à « préserver l’environnement sans être l’ennemi d’un art de vivre à la française » et à « dénoncer les excès de l’écologisme ». Une sémantique assez proche des cercles de réflexions ou partis politiques de droite. Pouvons-nous dire qu’Action Écologie est une association de droite ? Partagez-vous le terme « écologiste de droite ? »

Je dirais plutôt non, parce que notre message est apolitique. Toutefois, il est vrai que ceux qui critiquent la folie de la décarbonation ou les discours écologistes radicaux sont plutôt issus des rangs de la droite. Nous pouvons dire que nous sommes compatibles avec les valeurs de la droite. Nous souhaitons protéger l’environnement sans toutefois nuire à l’art de vivre à la française. C’est-à-dire, ne pas remettre en cause notre gastronomie, les sapins de Noël, le Tour de France et toutes ces choses qui ont tendance à être dénoncées par les écologistes de gauche.

Je ne partage pas pour autant le terme « écologiste de droite ». Il ne faut pas faire la même erreur que « l’écologie de gauche ». Une erreur qui consiste à parler d’écologie avec des marqueurs idéologiques. Par exemple, la gauche associe l’immigration à l’écologie en disant qu’il faut accueillir plus de migrants pour sauver la planète, et je vois déjà des gens à droite qui commencent à soutenir qu’accueillir plus de réfugiés est mauvais pour l’environnement. Il faut que la droite s’approprie le sujet de l’environnement, mais n’en fasse pas le faux-nez d’une idéologie.

 Action Écologie mène diverses actions telles que des envois de messages d’alertes et des publications d’études. L’association organise aussi des débats et des conférences. Vous êtes vous-même auteur d’un ouvrage « Une histoire naturelle de l’homme – l’écologie serait-elle une diversion ? ». Comptez-vous peser davantage dans le débat politique ? Action Écologie a-t-elle des ambitions électorales ? S’agit-il plus pour l’association d’agir pour l’instant comme un think tank ?

Nous n’avons pas d’ambition électorale. Nous voulons davantage agir comme un think tank et presque comme un média d’information pour parler d’environnement, mais avec une voix originale par rapport à tous ceux qui s’intéressent à la question écologique. Même les spécialistes de l’environnement au sein des Républicains ont repris le diagnostic apocalyptique de la gauche sur le climat. Ils disent s’opposer à l’écologie punitive, mais partagent le même constat que les écologistes radicaux. Nous, nous disons qu’il n’y a pas de « crise écologique », mais seulement des problèmes environnementaux que nous sommes en mesure de traiter sans grandiloquence et psychodrame. Nous nous opposons au concept de crise globale qui nécessite des politiques mondiales de salut public. Action Écologie est la seule à le dire.

Nous sommes en plein dans la COP 28 qui se tient à Dubaï. Nous avons récemment appris qu’a été acté la création d’un fonds de compensation des pertes et des dommages climatiques dans les pays vulnérables. Quelle est votre analyse ? Comment voyez-vous les grandes conférences internationales de manière générale ? (COP, protocoles, sommets…). Certains parlent d’un « bal des hypocrites ». Partagez-vous ce constat ?

J’imagine que le fonds de compensation va rapporter de l’argent à certains pays pauvres. Forcément, ces derniers ne vont pas être contre… Nous sommes en plein dans un jeu d’hypocrisie parce qu’il y a de l’argent à se faire.

Les COP, protocoles, sommets etc. c’est du cirque permanent. Ils se fixent à chaque fois comme objectif de diminuer drastiquement les émissions de gaz à effet de serre alors que les énergies fossiles représentent 80 % des énergies utilisées à l’échelle mondiale. Les pays européens semblent les seuls à y croire en organisant une décarbonation à marche forcée qui n’est rien d’autre que la mise en œuvre de la décroissance de l’économie. Le pire, ce sont les effets produits par ces politiques : ils sont nuls. Aucun résultat n’est visible à l’échelle planétaire qui est la seule qui compte dans ce domaine. Deux critères de performance sont importants. D’une part, les émissions mondiales et d’autre part le taux de CO2 dans l’atmosphère. Sur ces deux points, aucun infléchissement global ne s’est produit, bien au contraire. Avec Action Écologie, notre message est de dire que toute action sur le CO2 est vouée à l’échec. Pourtant, nos dirigeants continuent de dépenser aveuglement des centaines de milliards. Préoccupons-nous des autres sujets environnementaux : nous aurons une bien plus grande probabilité d’être utiles à quelque chose.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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