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Charles-Henri Gallois : « La relance de la France doit passer par une baisse de la mauvaise dépense publique »

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Photo: Crédit photo : Charles-Henri Gallois

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Durée de lecture: 8 Min.

ENTRETIEN – Le 10 septembre a eu lieu la passation de pouvoir entre le Premier ministre démissionnaire François Bayrou et le nouveau chef du gouvernement Sébastien Lecornu. L’homme politique eurois qui a débuté sa carrière politique chez les Républicains avant de rejoindre la macronie en 2017 va devoir, après Michel Barnier et François Bayrou, composer avec une Assemblée nationale morcelée.
Charles-Henri Gallois est président de Reprenons le Contrôle et conseiller économique de Jordan Bardella au Parlement européen. Si le budget proposé par Sébastien Lecornu est similaire à celui de François Bayrou, le Rassemblement national censurera le gouvernement prévient-il.
Epoch Times – Ce mercredi, Sébastien Lecornu a officiellement succédé à François Bayrou. Il est le septième Premier ministre d’Emmanuel Macron. Comment avez-vous réagi à sa nomination ?
Charles-Henri Gallois Cette nomination n’est pas une surprise. Le nom de Sébastien Lecornu figurait en tête de la liste des successeurs de François Bayrou.
Mais nous aurions gagné de précieux mois si Emmanuel Macron avait choisi de dissoudre directement l’Assemblée nationale.
Maintenant, la nomination de l’ex-ministre des Armées à Matignon s’inscrit dans la continuité de la politique qui est menée depuis 8 ans. Sébastien Lecornu est un macroniste de la première heure.
Et comme le Rassemblement national l’a toujours dit, s’il n’y a pas de rupture avec le macronisme, ça ne peut pas marcher. Par conséquent, fidèle à ses valeurs, le RN ne censurera pas a priori parce qu’on ne censure pas une personne, mais un projet, une politique.
Nous serons très vite fixés sur les orientations prises par le nouveau Premier ministre et tout le monde connaît nos lignes rouges, à savoir la non-ratification de l’accord commercial avec les pays du Mercosur, la programmation pluriannuelle de l’énergie et un budget qui serait injuste pour les Français.
Le Rassemblement national n’accepterait pas un budget qui serait similaire ou presque avec celui de Michel Barnier et de François Bayrou. C’est-à-dire un projet de loi de finances qui comprendrait des hausses de dépenses publiques et des augmentations de taxes et d’impôts.
Ce n’est pas admissible dans un pays où la dépense publique ne cesse d’augmenter et qui est déjà le plus fiscalisé au monde.
Au lieu de faire les poches des Français, le futur gouvernement devra plutôt chercher à faire des économies substantielles sur la mauvaise dépense publique.
Mais nous ne nous faisons pas d’illusions sur la politique que proposera Sébastien Lecornu. Cela sera très certainement la même que celle de son prédécesseur. Alors nous censurerons.
J’en entends beaucoup accuser le RN de nourrir l’instabilité lorsque nous affirmons que nous n’hésiterons pas à censurer si nos lignes rouges sont franchies, mais je rappelle que ceux qui sont à l’origine de cette instabilité sont les politiques qui ont constitué une alliance baroque lors des élections législatives de juin 2024 allant de LFI aux Républicains. Le prétendu « front républicain » est un front de l’instabilité. Ils ont délibérément empêché la France d’avoir un gouvernement stable pour sauver leurs places.
« Il va falloir des ruptures et pas que sur la forme et la méthode, mais aussi sur le fond. Pas de grands discours », a déclaré Sébastien Lecornu lors de sa brève prise de parole. Qu’est-ce que cela vous inspire ?
On peut toujours espérer des ruptures, mais permettez-moi d’en douter. Sébastien Lecornu est un politique qui a participé à la fermeture de la centrale de Fessenheim et donc au saccage de notre industrie nucléaire. Il y a donc fort à parier que la politique qu’il propose soit la même que celles de ces prédécesseurs.
Mais pour l’heure, nous verrons le projet qu’il présentera. Et comme je vous le disais, s’il est similaire à celui de François Bayrou, nous censurerons le gouvernement.
Des experts et analystes vantent son bilan au ministère des Armées et le fait qu’il soit un politicien habile. Qu’en pensez-vous ?
Je ne pense pas qu’on puisse dire qu’il est exceptionnel. D’ailleurs, lorsqu’il était ministre des Outre-mer, il avait une image assez exécrable.
Et je ne suis pas certain que l’armée française soit en meilleur état aujourd’hui qu’avant son arrivée au ministère des Armées. Nos capacités sont même diminuées avec tout ce qui a été envoyé en Ukraine et non remplacé.
Comment jugeriez-vous les neuf mois de François Bayrou à Matignon ? Certains disent qu’il aura eu le mérite d’alerter les Français sur le danger de la dette.
François Bayrou est l’un des principaux artisans de l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron. Et le bilan du chef de l’État, c’est une dette publique qui a augmenté de 1 100 milliards d’euros depuis 2017.
Après la Seconde Guerre mondiale, il a fallu 55 ans pour arriver à un tel montant. Jamais un président de la République n’avait eu un bilan économique aussi médiocre.
Et sur la même période, aucun autre État européen n’a été autant un mauvais élève que la France. Quand vous regardez le ratio dette PIB de la France entre 2017 et 2024, il augmente de 16 points alors qu’il diminue de 0,5 point au sein de l’UE malgré notre propre performance. Le bilan est catastrophique.
J’ajoute que les députés MoDem ont systématiquement voté les budgets depuis 2017 et que le désormais ex-Premier ministre a doublé la dette de la ville de Pau depuis qu’il en est maire.
J’ai donc du mal à croire François Bayrou quand il se présente en « lanceur d’alerte » sur l’état de nos finances publiques. En vérité, j’ai l’impression qu’il prend la posture d’un homme d’État et souhaite sortir par la grande porte. Mais, il s’agit uniquement d’une posture éloignée des faits.
Dans le Journal du Dimanche, vous, Philippe d’Arvisenet et André-Victor Robert avaient appelé à des « mesures radicales pour sauver l’économie française ». Mais les mesures économiques radicales ne sont jamais très populaires en France …
Je ne crois pas. Quand vous regardez les sondages, vous constatez que les Français sont d’accord à une majorité écrasante pour baisser la mauvaise dépense publique.
Mais encore faut-il leur présenter la situation honnêtement. Si vous leur dites, comme François Bayrou, qu’ils ont une part de responsabilité et qu’en plus, vous augmentez les dépenses et accentuez la pression fiscale, ça ne peut pas marcher.
C’est la raison pour laquelle je considère avec Philippe d’Arvisenet et André-Victor Robert que la relance de la France doit passer par une baisse de la mauvaise dépense publique, mais absolument pas par une hausse de la fiscalité, ce qui tuerait la croissance.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.