David Toutain, une haute gastronomie à emporter emballante

Par Epoch Times avec AFP
28 mai 2020 15:35 Mis à jour: 28 mai 2020 16:13

Dans une petite cuisine de son restaurant étoilé à Paris, David Toutain pose une fleur de coquelicot sur un marbré de saumon accompagné de crème avocat-oseille avant de signer sur le couvercle d’une boîte biodégradable. 

Cette offre à emporter à prix doux (pour des plats gastronomiques) cartonne, deux semaines après le lancement. Cela lui permet de « payer le trimestre » en loyer et salaires et envisager l’avenir avec sérénité contrairement à certains confrères qui, fermés depuis la mi-mars, crient à la catastrophe.

Pourtant avant l’épidémie du coronavirus, cette façon de cuisiner était inimaginable pour ce chef, star montante de la scène gastronomique récompensée de deux étoiles Michelin, qui propose des assiettes contemporaines autour d’associations végétales surprenantes au graphisme épuré et code couleur élégant.

« Cela marche du feu de dieu! », s’enthousiasme David Toutain qui dresse une des 50 commandes journalières en donnant parallèlement des instructions à quatre cuisiniers qui l’assistent.

Son épouse, Thaï Toutain, qui l’aide en salle, range les sacs aux couleurs du restaurant vert et terre.

Il assure « qu’à 90%, cela ne bouge pas » par rapport à ce qu’il fait d’habitude.

« On a toujours les mêmes hommes, les mêmes couteaux, les mêmes maraîchers, les mêmes bouchers, les mêmes poissonniers, on fera tout pareil, mais dans une boîte biodégradable, en fibre de sucre de canne, et froid », explique David Toutain à l’AFP.

Avec des plats autour de 25 euros ou le menu « carte blanche » avec deux entrées, deux plats et un dessert à 76 euros, l’offre à emporter coûte deux fois moins cher qu’un repas dans son restaurant et permet à ceux qui n’ont pas les moyens de s’offrir un restaurant gastronomique de découvrir « la trame et l’âme » du chef étoilé.

Certains curseurs ont été réajustés: si au restaurant on enlève la peau du cabillaud et on poche, le poisson livré est poêlé d’un côté sur la peau pour que les clients puissent le réchauffer au four pendant quelques minutes.

Le micro-ondes est proscrit: pour le homard grillé sur le lit de pin servi avec une purée de carottes et vinaigre de genièvre, « je ne garantis pas » le résultat, avertit le chef.

Des instructions courtes vont avec chaque plat détaillant la façon de réchauffer et le dressage.  « On insiste sur les dressages pour gagner le maximum de ce qu’on peut perdre un peu à côté », explique David Toutain.

Au départ, les boîtes se présentent comme des œuvres d’art: dans toutes les nuances du rouge dans canard-betterave-hibiscus-framboise, le quasi-monochrome de côte du veau aux asperges blanches ou huîtres-fondue aux poireaux-coulis de kiwi, explosion de couleurs et jeu géométrique « des ronds dans des rectangles » du saumon-oseille…

« On a travaillé sur les diamètres des plats pour que cela puisse rentrer dans les boîtes, il faut aussi penser au fait que cela ne bouge pas pendant le transport », raconte David Toutain.

« C’était important de retrouver le plaisir et de penser au plat élaboré », souligne-t-il.

« Drives » gastronomiques, food trucks ou chefs à domicile: la haute gastronomie se réinvente face à la crise sanitaire qui a bouleversé le mode de vivre à la française.

Après le guide Fooding, faisant partie du groupe Michelin qui répertorie le meilleur du « take-away » sur le site « plat de résistance! », le Gault et Millau s’apprête à lancer le 5 juin « Let’s Gault » qui va recommander des tables proposant des ventes à emporter en France.

Certains voient dans ces nouvelles formules le restaurant de demain, mais David Toutain n’y croit pas: la peur d’être contaminé en allant au restaurant disparaîtra rapidement, juge-t-il.

Il assure que son restaurant, qui compte 12 tables habituellement, pourra en garder 9 pour rouvrir et estime que le protocole sanitaire ne sera pas difficile à mettre en place.

Sans renoncer à la partie à emporter même après la réouverture. « C’est très intéressant pour moi pour attirer les gens qui ne peuvent pas venir au restaurant », particulièrement en attendant les touristes étrangers qui constituent jusqu’à 40% de sa clientèle.

 

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