Face au risque d’embrasement, l’exécutif entre apaisement et fermeté

Par Epoch Times avec AFP
29 juin 2023 13:00 Mis à jour: 29 juin 2023 13:46

La mort du jeune Nahel sous les balles d’un policier est « inexcusable », mais les violences urbaines qui ont suivi et se sont amplifiées sont « injustifiables »: Emmanuel Macron tente de concilier apaisement et fermeté pour éviter l’embrasement et la réédition des émeutes de 2005.

Mercredi depuis Marseille, le chef de l’État n’avait pas mâché ses mots pour dénoncer, sans attendre la fin de la garde à vue du policier, un acte « inexplicable » et « inexcusable ». « Rien ne justifie la mort d’un jeune », avait-il lancé après la mort de cet adolescent de 17 ans tué la veille à Nanterre, en banlieue parisienne, lors d’un contrôle routier.

Ces propos lui ont valu les critiques immédiates de la droite et de l’extrême droite, qui invoquent la « présomption d’innocence », mais aussi de syndicats de policiers, malgré le soutien de principe qu’Emmanuel Macron a apporté aux forces de l’ordre.

Dans un tweet, Marine Le Pen s’en est prise jeudi à « un pouvoir qui abandonne tous les principes constitutionnels par peur des émeutes, ce qui contribue à les aggraver ».

« Peur de voir la situation s’embraser »

« Je me méfie de ces condamnations immédiatement données dans la rue par les politiques, voire dans les médias », a également souligné le président (LR) du Sénat Gérard Larcher.

La crainte est grande, au sein de l’exécutif, de voir la colère suscitée par cet événement dégénérer. « On est très vigilants », reconnaît un ministre, tandis qu’un autre prévient en petit comité qu’un « mot de travers peut susciter un emballement et mettre le feu ».

En attendant les résultats de l’enquête, le gouvernement justifie ses prises de positions par les images « choquantes », selon les termes d’Élisabeth Borne, qui montrent « une intervention qui n’est manifestement pas conforme aux règles d’engagement de nos forces de l’ordre ».

Une vidéo, authentifiée par l’AFP, a montré qu’un des deux policiers tenait Naël en joue, puis a tiré à bout portant.

« De la part d’Emmanuel Macron, ce sont des mots très forts à l’égard de la police. Il est peut-être allé un peu loin, par peur de voir la situation s’embraser », estime Emilie Zapalski, spécialiste de communication politique, relevant que « cela a eu l’effet inverse, car ça donne du grain à moudre à ceux qui dénoncent les violences policières, ça alimente la colère ».

L’experte souligne auprès de l’AFP que jusqu’à présent, « les banlieues se sont tenues à l’écart des mouvements de contestation comme les gilets jaunes ou l’opposition à la réforme des retraites ». Or, « la colère elle est là, le terreau il est là », d’autant qu’Emmanuel Macron a pu « donner l’impression qu’il ne mettait pas le paquet sur les banlieues en enterrant le plan Borloo ».

Depuis qu’il a mis dans un tiroir ce plan présenté en 2018 par l’ancien ministre Jean-Louis Borloo, la politique de la ville est considérée par nombre d’élus et acteurs du secteur comme un angle mort de la politique macroniste.

L’état d’urgence comme en 2005 en question

Dans tous les esprits, plane le souvenir des émeutes de 2005, quand les banlieues des grandes villes s’étaient enflammées après la mort de deux adolescents, Zyed Benna et Bouna Traoré, électrocutés dans un transformateur en tentant d’échapper à la police à Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis).

À l’époque, le président Jacques Chirac et son ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy avaient tâtonné sur la réponse politique à apporter, avant de décréter l’état d’urgence, une première en métropole depuis la guerre d’Algérie.

Jeudi, des appels à en faire autant « sans délai » ont déjà été émis par le président du parti Les Républicains Éric Ciotti et par le chef de Reconquête ! Éric Zemmour.

Apaisement et fermeté

Après une seconde nuit de violences plus graves que la précédente, l’exécutif a haussé le ton jeudi.

Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a dénoncé des « violences insupportables » qui ont abouti à 150 interpellations. Et a lancé « honte à ceux qui n’ont pas appelé au calme », dans une allusion à La France insoumise.

Quant au président Macron, il a convoqué en urgence une cellule interministérielle de crise avant de partir à Bruxelles pour un sommet européen. Tout en plaidant le « recueillement » et le « respect » avant la marche blanche prévue dans l’après-midi pour Nahel, il a condamné des « scènes de violences » contre « les institutions et la République » qui sont « injustifiables », et a aussi déploré « une tentative de récupération.

Apaisement et fermeté, « c’est le bon équilibre », veut-on croire dans son entourage.

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