La « discrimination » sévit dans les institutions canadiennes – mais comment cette « discrimination » est-elle définie?

Par Tara MacIsaac
13 mars 2024 21:47 Mis à jour: 13 mars 2024 21:47

Au Canada, dans une enquête récente, les représentants politiques de la province de Colombie-Britannique ont déclaré que le corps législatif provincial est un lieu de travail « toxique » où règne la discrimination. À la fin de l’année dernière, la Commission canadienne des droits de la personne a reçu des plaintes similaires concernant son propre personnel. Par ailleurs, un rapport de Statistique Canada, publié le 4 mars, indique qu’un athlète sur cinq a été victime de discrimination dans le domaine du sport, tandis qu’une analyse réalisée le mois dernier indique que sept jeunes Canadiens sur dix ont été victimes de haine en ligne.

On pourrait conclure de ces rapports que le Canada est une société intolérante. Or, ce n’est peut-être pas la réalité objective, estime l’universitaire David Haskell.

« Cela donne l’impression que le Canada est plus intolérant que la réalité ne le suggère », a déclaré M. Haskell, professeur à la faculté des Arts libéraux de l’université Wilfrid Laurier, à Epoch Times. « Nous sortons de la réalité objective pour entrer dans la perception subjective. »

M. Haskell a récemment publié un article sur les effets de la formation à la « diversité, équité et inclusion » (DEI), affirmant que l’omniprésence de la DEI apprend aux Canadiens à percevoir la haine là où elle n’existe pas nécessairement.

En ce qui concerne les études récentes sur le racisme, il est important d’examiner les détails des incidents considérés comme « discriminatoires », a déclaré M. Haskell.

« Se sentir mal à l’aise »

Par exemple, le rapport de Statistique Canada sur la discrimination dans le sport énumère les types de comportements discriminatoires, dont le plus courant est le fait d’être « mis mal à l’aise ». Les personnes interrogées ont également décrit les comportements discriminatoires comme le fait d' »être privé de certaines possibilités » et de « faire l’objet de sanctions ou punitions injustes ».

En ce qui concerne les opportunités dont les victimes déclarent avoir été privés, l’enquête demandait aux répondants s’ils avaient été empêchés d’avoir plus de temps de jeu ou de passer au niveau de compétition suivant. Cependant, l’enquête ne donne aucune indication pour déterminer si les opportunités ont été refusées en raison d’une compétence insuffisante ou d’une discrimination.

Des enquêtes précises sur la discrimination devraient tenter de déterminer s’il existe un lien clair avec la discrimination, a déclaré M. Haskell.

« Il fut un temps où nous avions une définition très claire de ce qu’était le racisme. Il était clairement lié à la race parce que [l’auteur du racisme] reconnaissait que c’était le cas. »

M. Haskell a déclaré qu’il n’était pas le seul à parler de la subjectivité de la « discrimination ». À l’université de Melbourne, le psychologue Nick Haslam a inventé le terme « concept creep » (ndlt, la dérive conceptuelle, traduction libre), lié à une « sensibilité de plus en plus grande au préjudice » qui reflète « un programme moral libéral ».

Dans un article de 2016, M. Haslam a écrit : « Les aspects négatifs de l’expérience et du comportement humains ont élargi leur signification de sorte qu’ils englobent désormais un éventail de phénomènes beaucoup plus large qu’auparavant. »

La dérive conceptuelle (concept creep) « risque de pathologiser l’expérience quotidienne et d’encourager un sentiment de victimisation vertueux mais impuissant », a-t-il ajouté.

Mark Lipton, professeur au College of Arts de l’université de Guelph et spécialiste de la DEI, reconnaît qu’il peut être difficile de déterminer si un acte est discriminatoire.

Dans le cas d’une agression, par exemple, « il est difficile de dire s’il s’agit d’une agression fondée sur la race, à moins que l’agression ne soit accompagnée d’une insulte raciste », a-t-il déclaré à Epoch Times.

Néanmoins, il préconise de sensibiliser les gens, de manière respectueuse, à leurs préjugés inconscients.

Sans une définition objective, il est difficile de savoir quels sont les critères utilisés par la Commission canadienne des droits de l’homme pour décider si une affaire relève de la discrimination, a-t-il déclaré.

« Ce qu’ils prennent en compte ou non, semble aléatoire », a-t-il déclaré. « Je ne comprends pas très bien les facteurs qui conduisent non seulement à une enquête, mais également à un procès. »

Ce qui est considéré comme « discriminatoire » dans les rapports récents

Dans le rapport sur la discrimination au sein du corps législatif de la Colombie-Britannique, de nombreux cas mentionnés se réfèrent à des débats houleux ayant eu cours pendant la période des questions.

Les députés provinciaux interrogés par le groupe de consultants ADR Education ont parlé d' »intimidation » et de cris. Certains ont déclaré que les jeunes femmes autochtones étaient traitées avec moins de respect.

Un député a toutefois fait remarquer que les débats houleux font partie du processus politique et démocratique.

Un autre député a évoqué l’absence de garderie sur place, ce qui fait que les députés ayant de jeunes enfants ne se sentent pas soutenus.

« Étant donné que les origines fondamentales et les fondements structurels de l’assemblée législative sont majoritairement blancs, masculins et coloniaux, il convient d’accorder une attention particulière à la construction d’une culture du travail plus inclusive, modernisée et décolonisée qui embrasse et actualise pleinement les valeurs et les objectifs de la DEI », indique le rapport, selon le Vancouver Sun.

La majorité des députés de la Colombie-Britannique sont des néo-démocrates, dont le parti est connu pour sa forte sensibilité à la DEI. De même, M. Haskell a fait remarquer que la Commission canadienne des droits de l’homme – dont les membres du personnel allèguent une discrimination généralisée au sein du lieu de travail – est très attachée au concept de la DEI et à la lutte contre le racisme.

Les personnes ainsi imprégnées de la DEI ont tendance à voir le racisme plus fréquemment, a-t-il dit. Il a cité l’exemple de la faculté de Travail social de l’université Wilfrid Laurier, où il travaille.

L’ancienne doyenne, qui est une femme noire, a accusé le personnel autochtone de racisme. Ceux-ci l’ont à leur tour accusée de racisme. Le conflit a finalement nécessité l’intervention d’un arbitre extérieur, qui a déterminé que ni l’un ni l’autre n’était raciste.

La saga est décrite en détail par le média True North, qui a eu copie des courriels et le rapport de l’arbitre par le biais d’une fuite. Les professeurs concernés n’ont pas répondu à la demande de commentaire d’Epoch Times au moment de la publication, et l’université a déclaré ne pouvoir faire de commentaires publics sur les questions relatives à ses membres du personnel.

« C’est le domaine du Travail social », a déclaré M. Haskell. « C’est la discipline la plus préoccupée par les questions relevant du racisme. »

Il ajoute qu’il devient difficile de croire les universitaires, « parce que les universitaires, qui sont les spécialistes, se trompent ».

Le rapport du Sénat sur la discrimination au sein de la Commission canadienne des droits de l’homme a fait état des préoccupations du personnel de la Commission concernant le taux élevé de rejet des plaintes fondées sur la race par leurs collègues.

« Bien avant qu’une enquête n’ait lieu, il était habituel pour le personnel de spéculer sur la façon dont un plaignant imaginait les choses », a déclaré l’employée Bernadeth Betchi dans le rapport du Sénat.

Dans le rapport de Statistique Canada sur l’exposition des jeunes à la haine en ligne, aucune définition du contenu haineux n’est fournie pour guider les personnes interrogées, se contentant de dire qu’il « peut s’agir, sans s’y limiter, de contenu terroriste ou de violence envers des groupes ethniques ».

Alors que ces rapports suggèrent que les Canadiens et les institutions fédérales sont racistes, M. Haskell a déclaré que des mesures plus objectives montrent que le racisme est en baisse. Depuis les années 1960, des enquêtes demandent régulièrement aux Canadiens : « Autoriseriez-vous votre fils ou votre fille à épouser une personne d’une autre race ou d’une autre ethnie? » Chaque année, de plus en plus de personnes répondent par l’affirmative. « Il s’agit là d’un véritable indicateur. »

« Dans un contexte où des lois telles que le projet de loi sur les préjudices en ligne qui cherchent de plus en plus à pénaliser la « haine » et la « discrimination », comment la « haine » est, subjectivement ou objectivement définie, devient de plus en plus important », a déclaré M. Haskell.

« Nous nous éloignons de plus en plus des définitions très claires de la haine, comme nous l’avons vu dans les articles 318 et 319 du code pénal, qui étaient assez rigoureux », a-t-il déclaré. « Nous entrons à présent dans le domaine de la subjectivité, où la haine est tout ce qui heurte les sensibilités progressistes ou libérales. »

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