La nouvelle loi sur la sécurité inaugure une nouvelle ère autoritaire pour Hong Kong

Par Eva Fu
7 juillet 2020 15:56 Mis à jour: 7 juillet 2020 15:56

À la croisée des chemins entre l’Est et l’Ouest, la plaque tournante internationale de Hong Kong a longtemps prospéré grâce à son débat public dynamique, sa presse vibrante et ses échanges commerciaux animés.

Aujourd’hui, un nombre croissant de Hongkongais envisagent de fuir la ville, craignant que les libertés précieuses qui la distinguaient de la Chine continentale ne disparaissent sous le dernier empiétement de Pékin.

Le 1er juillet, date du 23e anniversaire du transfert de souveraineté du Royaume-Uni à la Chine, une loi de sécurité nationale de grande envergure est entrée en vigueur. Des infractions telles que la sécession, la subversion et la « collusion avec des forces étrangères » sont désormais passibles d’une peine maximale d’emprisonnement à vie.

Cette loi a fait craindre que Hong Kong, autrefois un lieu où les gens pouvaient critiquer ouvertement le régime, se transforme en une autre ville de Chine continentale placée sous l’emprise autoritaire du Parti communiste chinois.

« C’est une tragédie mondiale », ont déclaré Fred McMahon, le Dr Michael A. Walker, titulaire de la chaire de recherche sur la liberté économique à l’Institut Fraser, au journal Epoch Times. Le 3 juillet, l’institut, basé au Canada, a publié une lettre pour dénoncer cette loi, tout en appelant à une « réponse globale » pour faire face à la détérioration de la situation à Hong Kong.

Le 3 juillet, cette lettre avait été signée par une coalition de groupes de réflexion de 39 pays.

Limitation du temps de parole

La police de Hong Kong a agi rapidement, en arrêtant 10 personnes en vertu des dispositions de la loi lorsque des milliers de manifestants se sont rassemblés à Causeway Bay le 1er juillet pour s’y opposer. Dans certains cas, ils ont été arrêtés pour possession de drapeaux, de banderoles et de tracts portant des slogans prônant l’indépendance de Hong Kong.

Un restaurant Shau Kei Wan, un des milliers de commerces qui soutiennent ouvertement le mouvement pro-démocratique de Hong Kong, a été forcé de retirer de ses murs des messages et des affiches de protestation le 2 juillet après avoir été averti par la police.

Des clients sont assis près de notes vierges sur un mur Lennon à l’intérieur d’un restaurant pro-démocratie à Hong Kong le 3 juillet 2020, en réponse à une nouvelle loi sur la sécurité nationale introduite dans la ville qui rend illégaux les opinions politiques, les slogans et les panneaux prônant l’indépendance ou la libération de Hong Kong. (Isaac Lawrence/AFP via Getty Images)

Quatre policiers armés sont apparus dans la boutique le matin et ont photographié l’intérieur du magasin, a déclaré le propriétaire du restaurant au journal Epoch Times. Citant la loi de sécurité, la police a menacé d’arrêter le propriétaire si l’affichage d’autocollants exprimant le soutien au mouvement se poursuivait.

Plus tard dans la soirée, les autorités de Hong Kong ont annoncé que le slogan de protestation populaire « Libérez Hong Kong, la révolution de notre temps » serait interdit, déclarant qu’il constitue une violation de la nouvelle loi, car il « évoque » un message pro-indépendant, séparatiste et subversif.

« Hong Kong est-il toujours Hong Kong ? En quoi le Hong Kong d’aujourd’hui est-il différent des autres villes chinoises comme Guangzhou et Shanghai ? » a déclaré Gordon Lam, le propriétaire du restaurant, dans une interview. Contraint de se conformer à l’ordre de la police, le magasin a fermé temporairement pour enlever les autocollants. Le gouvernement, a-t-il expliqué, utilise la loi pour briser la liberté économique et la liberté d’expression.

« Cette loi sur la sécurité nationale détruit complètement les valeurs fondamentales de Hong Kong », a-t-il déclaré au journal Epoch Times.

De nombreux magasins ont commencé à retirer les messages pro-démocratie pour éviter les mesures de répression ; les bibliothèques publiques ont également retiré les livres écrits par des militants pro-démocratie. Le 4 juillet, la police a confisqué le drapeau américain d’un manifestant lors d’une célébration locale du jour de l’Indépendance des États-Unis, en invoquant une violation de la loi.

La police évacue une femme qui tient un drapeau américain à l’extérieur du consulat américain lors d’une marche pour célébrer le jour de l’Indépendance des États-Unis à Hong Kong le 4 juillet 2020. (Isaac Lawrence/AFP via Getty Images)

L’activiste Nathan Law, qui a témoigné lors d’une audience du Congrès américain le 1er juillet, a fui Hong Kong vers un lieu non identifié, déclarant que s’il restait, « mon discours et mon comportement pourraient mettre en danger ma propre sécurité, étant donné les circonstances ».

Appareil de sécurité

Les fonctionnaires chinois ont affirmé que la loi prendrait pour cible un petit segment de la société, mais les définitions larges et vagues des infractions – ainsi qu’une clause qui stipule que les personnes qui ne résident pas à Hong Kong pourraient également faire l’objet de poursuites – ont suscité l’inquiétude des experts juridiques et des observateurs des droits de l’homme, qui craignent que les résidents et les étrangers qui provoquent la colère du régime ne se retrouvent à sa merci une fois qu’ils auront mis le pied sur le sol de Hong Kong.

De telles lois « ne devraient jamais être utilisées pour criminaliser une conduite et une expression qui sont protégées par le droit international des droits de l’homme », a déclaré le bureau des droits de l’homme des Nations unies dans une déclaration du 3 juillet, exprimant son inquiétude face à la possibilité d’une « interprétation et d’une application discriminatoires ou arbitraires ».

La police anti-émeute monte la garde lors d’une opération de nettoyage au cours d’une manifestation dans un centre commercial à Hong Kong le 6 juillet 2020. (Isaac Lawrence/AFP via Getty Images)

La loi sur la sécurité nationale prévoit également la création d’un nouveau bureau de sécurité dans la ville.

Le 3 juillet, Pékin a nommé Zheng Yanxiong, connu pour son rôle dans la répression des manifestations anti-corruption organisées en 2011 dans le village de Wukan, situé au sud du pays, à la tête du nouveau bureau de sécurité – qui dépend directement du gouvernement central.

« Nous pensions que la ‘police secrète’ était quelque chose d’abstrait. Maintenant, c’est une crainte bien réelle », a déclaré M. Law lors de l’audition du 1er juillet.

En 2016, il a remporté une élection pour devenir un législateur local, mais a été disqualifié après avoir protesté contre l’emprise de Pékin sur Hong Kong lors de sa cérémonie d’assermentation.

Des personnes brandissent des feuilles de papier vierges lors d’une manifestation dans un centre commercial de Hong Kong le 6 juillet 2020, en réponse à la nouvelle loi sur la sécurité nationale introduite dans la ville, qui rend illégaux les opinions politiques, les slogans et les panneaux prônant l’indépendance ou la libération de Hong Kong. (Isaac Lawrence/AFP via Getty Images)

La réaction mondiale

Le régime chinois, comme par le passé, a répondu à la réaction internationale en déclarant que la loi et son application relèvent des « affaires intérieures ».

« En quoi cela vous concerne-t-il ? » a déclaré Zhang Xiaoming, directeur adjoint du bureau de Pékin pour les affaires de Hong Kong, lors d’une conférence de presse tenue le 1er juillet, lorsqu’on l’a interrogé sur les éventuelles sanctions des gouvernements occidentaux.

Le Congrès américain a approuvé à l’unanimité une loi qui imposerait des sanctions aux fonctionnaires chinois qui violent l’autonomie de Hong Kong, ainsi qu’aux banques qui font des affaires avec ces fonctionnaires. Le Royaume-Uni a promis d’étendre les droits d’immigration à environ 3 millions de Hongkongais, une décision à laquelle environ deux tiers de la population britannique ont souscrit, selon un récent sondage. Les législateurs du parti au pouvoir au Japon font campagne pour annuler la prochaine visite du leader chinois Xi Jinping à la lumière des événements qui ont lieu à Hong Kong.

La ville est « en première ligne dans la lutte pour la liberté contre l’autoritarisme », a déclaré Benedict Rogers, un militant des droits de l’homme installé à Londres et qui critique ouvertement la mainmise de Pékin sur Hong Kong.

« Si le régime est autorisé à s’en tirer impunément, alors il ne s’arrêtera pas à Hong Kong », a-t-il déclaré dans le programme « American Thought Leaders » (littéralement : « leaders de la pensée américains ») du journal Epoch Times.

« Le Parti communiste chinois est déjà en train de violer nos libertés – dans votre pays et dans le mien – et nous ne devons pas permettre que cela continue. »

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