Le centre et la droite prêts à taxer les ultra-riches pour éviter la censure

Gabriel Attal lors d’une réunion du parti Renaissance à Saint-Denis, le 6 avril 2025.
Photo: THOMAS SAMSON/AFP via Getty Images
Pour éviter une nouvelle censure du gouvernement, le centre et la droite se disent désormais disposés à mettre davantage à contribution les ultra-riches, sans aller toutefois jusqu’à l’instauration de la taxe Zucman, mesure phare défendue par les socialistes.
Le 20 février 2025, en plein débat à l’Assemblée nationale sur la proposition de l’économiste Gabriel Zucman, le député macroniste Sylvain Maillard dénonçait une taxation « confiscatoire », jugée « dangereuse ». Six mois plus tard, au lendemain de la chute du gouvernement Bayrou, il reconnaît dans Le Figaro la nécessité de « lâcher » à la gauche « une victoire symbolique sur l’imposition des plus fortunés ».
« Une évolution idéologique » au sein de la majorité ?
Longtemps opposée à toute hausse d’impôt, après avoir supprimé l’impôt sur la fortune (ISF), la macronie admet un infléchissement. « L’idée d’une contribution sur les très hauts patrimoines fait clairement son chemin », reconnaît le député Renaissance Charles Sitzenstuhl. Selon lui, « ce sont des évolutions idéologiques profondes qui ne sont pas anodines, mais la situation politique l’exige » pour « éviter une nouvelle censure ».
Les socialistes au centre du jeu
Avec un Rassemblement national tourné vers l’objectif d’une dissolution, les socialistes apparaissent comme un acteur central dans la survie du Premier ministre Sébastien Lecornu. Fin août, le PS a présenté un contre-budget largement fondé sur la taxe Zucman : un impôt plancher de 2 % sur les patrimoines de plus de 100 millions d’euros. Le chef des députés PS, Boris Vallaud, l’a qualifiée de mesure « fondamentale ».
Une ministre démissionnaire estime que, pour justifier une coopération avec le gouvernement, les socialistes ont besoin d’« un gain qu’ils puissent mettre en scène ». « Pour la macronie, c’est plus facile de lâcher sur Zucman que sur les retraites », juge un député de droite.
Un feu vert de l’Élysée ?
Profitant du contexte, l’économiste multiplie les interventions médiatiques. « La taxe est plébiscitée dans tous les électorats », affirme-t-il dans Le Monde. « Les partis le savent (…) Il ne reste qu’un blocage, il est du côté du chef de l’État. »
Un ancien ministre macroniste estime que la déclaration de Sylvain Maillard laisse penser à un feu vert de l’Élysée : « Oui, tu peux avancer en ce sens. » Selon lui, « cette fois-ci, le président a vraiment envie d’aider son Premier ministre » et se montre prêt à des concessions.
Une opposition persistante à droite
Le président LR du Sénat, Gérard Larcher, a rappelé jeudi son opposition à la taxe Zucman, estimée inconstitutionnelle. Les sénateurs l’avaient rejetée en juin après son adoption à l’Assemblée.
Néanmoins, plusieurs élus du centre et de la droite se disent ouverts à une forme de contribution des ultra-riches. Julien Dive (LR) se dit contre la taxe Zucman « en l’état », mais envisage une version « édulcorée ». Henri Alfandari (Horizons) propose de « faire quelque chose de symbolique, mais ne pas être excessif ».
Le débat sur l’assiette fiscale
Les discussions portent sur l’assiette de l’impôt. Les macronistes veulent exclure « l’outil de production ». « Si vous possédez LVMH et une Rolex dans votre fortune, on compte la Rolex, mais pas les actions LVMH. Parce qu’on considère que c’est un outil industriel français », explique un ministre, reconnaissant que les recettes en seraient fortement réduites.
La ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, a travaillé sur plusieurs options alternatives, comme des mécanismes de lutte contre la suroptimisation fiscale.
Des socialistes déterminés
Après avoir échoué à imposer leurs vues lors des négociations sur les retraites en 2025, les socialistes refusent de céder. « On ne va pas participer à une parodie de négociation où on irait pendant des semaines (…) pour qu’à la fin, on nous donne une micro-taxe sur les plus riches », a averti vendredi sur France 2 le député PS Philippe Brun.
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