Les Nations unies considèrent la fonte des glaces arctiques comme un indicateur clé du changement climatique – mais elles ne fondent pas

Les politiques climatiques fondées sur une relation supposée entre le CO2 et le niveau des glaces arctiques posent problème, estiment les scientifiques

Par Katie Spence
16 février 2024 23:53 Mis à jour: 16 février 2024 23:53

Selon le dernier rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) de l’ONU, les ours polaires ne sont pas au bout de leurs peines.

En raison de l’augmentation des émissions de gaz carbonique (CO2) et d’autres gaz à effet de serre, les modélisations climatiques prévoient une région Arctique dépourvue de glace au mois de septembre, d’ici à 2050.

« Tous les scénarios envisagés prévoient un Arctique sans glace en septembre », indique un rapport scientifique soulignant les conclusions du GIEC. « Ces résultats soulignent l’impact profond des émissions de gaz à effet de serre sur l’Arctique. »

Une prévision similaire avait été faite en 2013, mais à l’époque, prévoyait une absence de glace vers 2033.

« Tous les modèles climatiques prévoient un été sans glace d’ici une vingtaine d’années », a déclaré Ron Kwok, chercheur principal au Jet Propulsion Laboratory de la NASA, en juillet 2013. « Ce n’est pas très loin. »

Cependant, un nouveau rapport d’Allan Astrup Jensen, directeur de recherche et PDG du Nordic Institute of Product Sustainability and Environmental Chemistry and Toxicology, au Danemark, montre qu’entre septembre 2007 et septembre 2023, le recul de la glace de mer arctique a été quasiment nul.

« Les faits sont que l’étendue de la glace de mer arctique mesurée par les satellites depuis 1978 exprime des variations annuelles, et qu’elle a considérablement diminué de 1997 à 2007. Cependant, avant cette période, de 1978 à 1996, la tendance à la baisse était minime, et au cours des 17 dernières années, de 2007 à 2023, la tendance à la baisse a également été à peu près nulle », indique le rapport.

« Par conséquent, rien n’indique que nous devrions nous attendre à ce que la glace d’été de la mer Arctique disparaisse complètement, comme prédit, dans une ou deux décennies. »

M. Jensen a déclaré à Epoch Times que le GIEC et d’autres organisations « excluent la possibilité que la superficie de la glace de mer puisse s’étendre à l’avenir et même atteindre les niveaux d’avant 1996 ».

« C’est parce qu’ils pensent que le facteur déterminant de l’étendue de la glace de mer est le réchauffement prévu par l’augmentation des niveaux de CO2 dans la troposphère », a-t-il déclaré.

Dans les années 1980, au cours de plusieurs expéditions, Frank Geisel, ingénieur océanographe et architecte naval, a examiné l’épaisseur de la glace dans l’Arctique et l’Antarctique avec les garde-côtes.

Selon lui, il est problématique de mesurer l’étendue et l’épaisseur de la glace de mer, puis de conclure que le CO2 est à l’origine d’un déclin et qu’il faut donc l’atténuer.

« Nous ne pouvons pas simplement commander et dire : ‘Si nous faisons ceci, cela se produira' », a déclaré M. Geisel à Epoch Times. « Peut-être. Mais peut-être pas. »

Des résidus de charbon sont déchargés près d’une usine sidérurgique non autorisée en Mongolie intérieure, Chine, le 3 novembre 2016. Selon le GIEC, les émissions de gaz à effet de serre provoqueront la disparition de la glace en été dans l’Arctique d’ici 2050. (Kevin Frayer/Getty Images)

CO2 et glace de mer

L’administration nationale des océans et de l’atmosphère (National Oceanic and Atmospheric Administration, NOAA) utilise les données du Centre national de données sur la neige et la glace (National Snow and Ice Data Center, NSIDC) pour enregistrer les minimums annuels de la glace de mer arctique en septembre, à la fin de la saison de fonte estivale. La mesure est basée sur l’étendue de la glace de mer, c’est-à-dire le nombre de kilomètres carrés de glace couvrant l’océan Arctique pendant une période donnée.

En septembre 1979, la NOAA a indiqué que le minimum annuel de glace de mer dans l’Arctique était de 2,72 millions de miles carrés (7,04 millions de km carrés). À la même époque, les concentrations de CO2 étaient de 337,1 parties par million (ppm), selon The Nature Conservancy.

Près de 20 ans plus tard, en 1996, les concentrations de CO2 étaient passées à 362,58 ppm et le minimum annuel de glace de mer dans l’Arctique en septembre était passé à 2,93 millions de miles carrés (7,6 millions de km carrés).

Après 1996, l’étendue de la glace de mer a diminué jusqu’en 2007, la baisse la plus importante ayant eu lieu entre 2006 et 2007, passant de 2,26 millions de miles carrés (5,85 millions de km carrés) en 2006 à 1,65 million de miles carrés (4,27 millions de km carrés) en 2007. Les concentrations de CO2 étaient de 383,37 ppm.

Après la publication des résultats de 2007, l’American Geophysical Union a publié un rapport avertissant que l’Arctique pourrait être « au bord » d’un changement fondamental, et les images d’ours polaires affamés échoués sur des plaques de glace flottantes sont devenues monnaie courante.

En raison notamment de la dégradation de leur habitat, le 15 mai 2008, les ours polaires ont été inscrits sur la liste des espèces « vulnérables » en vertu de la Loi sur les espèces en voie de disparition (Endangered Species Act).

Or, l’étendue de la glace de mer enregistrée en septembre 2008 et 2009 a augmenté et, bien qu’elle ait atteint un niveau historiquement bas en 2012, entre 2007 et 2023, le déclin de la glace de mer est quasiment nul.

Les ours polaires ont été inscrits sur la liste des espèces « vulnérables » en vertu de la Loi sur les espèces en voie de disparition (Endangered Species Act) en mai 2008, à la suite d’une baisse importante de la superficie de la glace de mer dans l’Arctique. (Ekaterina Anisimova/AFP via Getty Images)

En septembre 2023 – l’année « de loin » la plus chaude des 174 années de données climatiques de la NOAA, selon la scientifique en chef de l’organisation Sarah Kapnick – le minimum annuel de glace de mer dans l’Arctique était de 1,69 million de miles carrés (4,38 millions de km carrés), soit une augmentation d’environ 40.000 miles carrés (103.000 km carrés) par rapport à 2007. La concentration de CO2 était de 421,55 ppm en 2023.

M. Jensen explique qu’il y a quelques années, il a commencé à élaborer et à publier des graphiques et des diagrammes à partir des données du NSIDC, afin de fournir aux gens des représentations visuelles simples.

« J’ai envoyé mon premier diagramme au NSIDC, mais je n’ai eu aucune réaction de leur part. Cela m’a surpris. J’ai également été surpris de constater que de nombreuses personnes, y compris des scientifiques et même des amis, ont du mal à être convaincues que la glace de mer n’a pas changé depuis 2007, bien que j’utilise les mêmes données officielles que celles utilisées par le GIEC », a remarqué M. Jensen.

« Ils subissent un lavage de cerveau en raison des nombreux articles alarmistes qui parlent d’une diminution de la glace de mer dans l’Arctique et du grand respect qu’ils ont pour le GIEC, l’organisation des Nations unies. »

M. Geisel s’est dit préoccupé par le fait que certains scientifiques et décideurs politiques utilisent « une analyse très précise, presque microanalytique, d’une situation très, très macro ».

« Nous étudions des processus qui évoluent sur [l’échelle] de décennies, et nous essayons de comprendre comment nous allons y répondre cette année », a déclaré M. Geisel.

Frank Geisel, ingénieur océanographe et architecte naval, examine la glace de mer dans la mer de Béring. (Avec l’aimable autorisation de Frank Geisel)

« Si l’on étudie les systèmes météorologiques dans le Haut-Arctique, il existe un énorme système de haute pression, bien connu des spécialistes de la météo, qui se trouve au sommet du pôle. (…) Il se déplace, et il est bien connu qu’il change de position et modifie ainsi les régimes climatiques à une fréquence décennale – nous parlons de 10, 12 ans. »

« Il s’agit là de processus à grande échelle et à long terme que notre technologie ne comprend pas entièrement. »

M. Geisel a fait la comparaison avec les scientifiques qui étudient de près les ouragans à l’aide d’images satellite et qui ne sont toujours pas en mesure de comprendre pleinement comment ils se comporteront dans un avenir proche.

« Nous disposons de beaucoup d’images et nous pouvons modéliser [les ouragans] très précisément, à une échelle d’environ 100 mètres », a-t-il déclaré.

« Mais l’atténuation des effets de l’ouragan lorsqu’il arrive sur le littoral ne se fait pas à l’échelle de 100 mètres. Elle se fait sur une base de 100 miles (160 km). Lorsqu’un ouragan arrive sur les côtes de Floride, le gouverneur dit : ‘Tout le monde dehors!’. La précision de ces mesures ne conduit donc pas nécessairement à une mitigation des conséquences, ni même à leur compréhension. »

Une image satellite montre l’ouragan Dorian se dirigeant vers la côte de la Floride dans l’océan Atlantique le 1er septembre 2019. (NOAA via Getty Images)

Remise en question des données

Le NSIDC prend des mesures satellitaires de la glace de mer et enregistre les endroits où les concentrations de glace sont d’au moins 15% pour comprendre l’étendue de la glace de mer. La NOAA utilise ensuite les mesures de septembre pour tracer l’étendue de la glace de mer au fil du temps.

Cependant, la marge d’erreur est importante.

« Pendant la fonte estivale et la prise des glaces à l’automne, l’étendue peut être sous-estimée de 1 million de miles carrés (2,59 millions de km carrés). Au milieu et à la fin de l’hiver, avant le début de la fonte, l’erreur se situera dans la partie inférieure des estimations », indique le NSIDC.

Selon le NSIDC, les données relatives à la superficie de la glace de mer peuvent présenter une erreur allant jusqu’à 1 million de miles carrés(2,59 millions de km carrés), lorsqu’elles sont mesurées en septembre, alors qu’en mars, la marge d’erreur est plus faible.

Sur un graphique, la diminution de l’étendue de la glace de mer entre 1979 et 2023, calculée sur la base des données plus précises de mars, est deux fois moins rapide (15.000 miles carrés ou 38.850 km carrés) que celle de septembre (30.000 miles carrés ou 77.700 km carrés).

Selon M. Jensen, la qualité des modèles climatiques dépend des données qu’ils contiennent.

« La forte diminution de l’étendue de la banquise arctique avant 2007, lorsque le prix Nobel a été décerné au GIEC et à Al Gore, était censée se poursuivre indéfiniment. De ce point de vue, les prévisions étaient justes », a-t-il déclaré.

« Toutefois, lorsqu’il est apparu clairement que la diminution s’était arrêtée, ils auraient dû cesser ces prédictions. »

« Toutefois, cela leur a posé des problèmes politiques, car cela aurait remis en question toute la question du changement climatique induit par le CO2, puisque la disparition de la glace de mer arctique avait été un argument majeur en faveur de la théorie du CO2. »

En outre, l’imagerie satellitaire de l’étendue de la glace de mer n’a pas commencé en 1979, bien que la plupart des graphiques utilisent ce point de départ.

En utilisant les images de ses anciens satellites, la NASA a rassemblé des estimations approximatives de l’étendue de la glace de mer remontant jusqu’aux années 1960.

M. Jensen a souligné que même si les images satellites des années 1960 n’étaient pas aussi précises que les modèles actuels, elles donnent une image globale qui ne correspond pas aux affirmations de la NOAA concernant la diminution constante de l’étendue de la glace de mer.

« Il est possible qu’avant 1978, l’étendue ait été plus faible certaines années. Il est donc possible que les années 1978 à 1996 aient constitué une période [où l’étendue était] maximale. Un tel maximum pourrait se reproduire à l’avenir si le CO2 n’est pas le facteur à l’origine de la variation de l’étendue de la glace de mer arctique », a déclaré M. Jensen.

Dans un rapport archivé datant du début des années 1990, le GIEC déclare : « Depuis 1976 environ, l’étendue de la glace de mer dans l’hémisphère nord a varié autour d’un niveau climatologique constant, mais en 1972-1975, l’étendue de la glace de mer était nettement inférieure.

« Dans l’hémisphère sud, depuis 1981 environ, l’étendue de la glace de mer a également varié autour d’un niveau constant. Entre 1973 et 1980, il y a eu des périodes de plusieurs années pendant lesquelles l’étendue de la glace de mer dans l’hémisphère sud était soit sensiblement supérieure, soit inférieure à celle des années 1980. »

Selon M. Jensen, « il semble évident » que les changements dans la glace de mer de l’Antarctique sont principalement dus aux phénomènes El Niño et La Niña.

« Peut-être que le Gulf Stream de l’Atlantique et d’autres courants de l’océan Pacifique sont les principaux facteurs [faisant varier l’étendue] de glace de mer Arctique? Davantage de recherche est nécessaire », a-t-il déclaré.

Réponse du NSIDC

Interrogé sur le rapport de M. Jensen, Walt Meier, chercheur principal au NSIDC, a déclaré que [le rapport] ne contenait « rien de nouveau, ni de résultats scientifiques significatifs », et que l’année de départ qu’il utilise « était un minimum record ».

Représentation graphique de l’évolution de l’étendue de la glace de mer arctique entre septembre 1984 et septembre 2016. (NASA)

« Choisir l’année 2007 comme année de départ peut minimiser la tendance et ne fournit pas une mesure du changement scientifiquement utile. La tendance générale depuis le début de nos données satellitaires, cohérentes et continues, en 1979, montre une forte tendance à la baisse sur 45 ans », a déclaré M. Meier à Epoch Times par courrier électronique.

« Les 17 années allant de 2007 à 2023 sont les 17 années les plus basses jamais enregistrées. L’analyse du type et de l’épaisseur de la glace montre un déclin substantiel de l’épaisseur, avec une disparition presque complète de la glace la plus ancienne et la plus épaisse de l’Arctique. L’environnement de la glace de mer arctique a fondamentalement changé par rapport aux années 1970 et 1980. »

M. Meier a déclaré que le NSIDC n’incluait des données provenant d’images satellites qu’à partir de 1979, « parce qu’il s’agit de l’enregistrement à long terme de la plus haute qualité. L’ajout de données antérieures peut fournir un contexte supplémentaire, mais ne modifie pas les conclusions tirées des données débutant en 1979. »

Un bateau traverse la glace en train de fondre sur la côte ouest du Groenland, le 28 août 2008. Dans l’ensemble, les données recueillies par le NSIDC sur 45 ans montrent que l’étendue de la glace de mer arctique est restée relativement stable, la majeure partie de son déclin s’étant produite entre 1997 et 2007. (Steen Ulrik Johannessen/AFP via Getty Images)

Lorsqu’on lui demande pourquoi nous n’avons pas observé une tendance à la baisse de l’étendue de la glace de mer correspondant à l’augmentation des concentrations de CO2 – si le CO2 est le principal moteur de la disparition de la glace de mer – M. Meier répond : « les émissions de gaz à effet de serre affectent la glace de mer, et le climat en général, comme un ‘pouce sur la balance’ à long terme. »

« Il y a toujours une variabilité dans le climat, et nous nous attendons donc à des hauts et des bas. Les températures mondiales n’augmentent pas régulièrement chaque année – d’autres facteurs, tels que El Niño ou La Niña, jouent également un rôle. Toutefois, les gaz à effet de serre ajoutent chaque année un peu de ‘carburant’ supplémentaire. »

Par ailleurs, selon le dernier rapport du NSIDC, la glace de mer arctique a augmenté de 4,63 millions de miles carrés (12 millions de km carrés) en décembre 2023, ce qui représente la troisième augmentation mensuelle la plus importante en 45 ans.

L’étendue de la glace de mer a augmenté en moyenne de 33.700 miles carrés (87.300 km carrés) par jour, « nettement plus rapidement que la moyenne de 1981 à 2010 de 24.700 miles carrés (64.000 km carrés) par jour », indique le rapport.

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