Les produits «verts» davantage liés à l’attrait social et aux profits des entreprises qu’à l’environnement

Par Autumn Spredemann
8 février 2023 13:24 Mis à jour: 8 février 2023 13:24

Cette année les consommateurs recherchent plus que jamais des produits « verts », tandis que les entreprises mettent à profit cette tendance. Malheureusement, tout porte à croire qu’il s’agit davantage d’un phénomène de mode que d’un véritable engagement à protéger l’environnement.

Le marché bio mondial connaît une croissance sans précédent et le chiffre d’affaires du commerce de détail bio a dépassé les 120 milliards d’euros en 2020.

Souvent l’engagement écologique des entreprises se résume à un emballage de couleur verte. En raison de règlementations laxistes, tout ce dont les entreprises ont besoin, c’est d’un label affichant des mots rassurants devenus familiers tels que « durable », « biodégradable » ou « naturel ». Ensuite, le produit est présenté comme tel, quel que soit son impact écologique réel.

Le terme utilisé dans le secteur est « écoblanchiment », et des dizaines d’entreprises ont déjà été démasquées pour avoir proposé des articles et des services tout sauf écologiques.

Black Friday dans le New Jersey, le 25 novembre 2022. (Kena Betancur/Getty Images)

Pourtant, la duplicité ne s’applique pas seulement aux entreprises. Les recherches montrent que de nombreux consommateurs prônant la défense de l’environnement recherchent en réalité la valorisation sociale et se soucient peu de l’écologie.

Une étude a été menée sur l’impact psychologique de l’utilisation de produits « verts ». Pour la majorité des sondés, à l’instar des produits de marque, utiliser des produits ayant officiellement une empreinte carbone réduite est considéré comme valorisant socialement. Les auteurs de l’étude appellent cela « l’effet vert ».

Malgré cela, le nombre de personnes achetant ces produits « verts » pour se sentir valorisés restent très minoritaires.

Une enquête a montré que sur les 62% de personnes affirmant vouloir davantage d’options « vertes », seules 26% les achètent réellement.

Et bien que le pourcentage de personnes affirmant vouloir des produits plus durables et qui sont prêtes à payer plus cher pour les obtenir ait augmenté depuis 2019, un sérieux écart subsiste entre l’intention et l’action.

Les initiés de l’industrie verte savent que les consommateurs font peu de recherches (voire aucune) sur les produits dits écologiques avant de les acheter. D’où l’écoblanchiment, qui, selon les analystes, n’est pas près de disparaître.

Au‑delà de l’achat

« Les résultats de l’enquête ne sont pas surprenants. Il est reconnu depuis longtemps qu’une partie importante des consommateurs prend ses décisions d’achat en fonction de la valeur sociétale perçue d’un produit », explique Carlos Cen Wu à Epoch Times.

Carlos Cen Wu est le PDG et cofondateur de Tallo, une entreprise qui propose des produits de soins personnels durables. Il explique que Tallo est née d’une frustration liée aux pratiques standards de l’industrie, aux étiquettes déroutantes et aux ingrédients nocifs.

Selon lui, la véritable durabilité va bien au‑delà des simples achats et de l’attrait social.

Pour que quelqu’un puisse avoir un impact positif et durable sur son empreinte carbone, il faut « un examen complet de ses habitudes de consommation et un engagement ferme à réduire son impact environnemental ».

Il donne l’exemple de personnes qui choisissent de remplacer tous leurs articles en plastique par des produits alternatifs « plus vert ». Mais qu’advient‑il de tout ce plastique ? Certaines personnes négligent la possibilité de réutiliser leur plastique au profit de l’achat de nouveaux articles « verts ».

« Ce comportement est un moyen de se mettre en avant et ne correspond pas à une véritable volonté de réduire son impact environnemental », déclare l’entrepreneur.

Une approche plus efficace consisterait à utiliser ce que l’on possède le plus longtemps possible, remarque-t-il, puis à remplacer les articles par un choix plus durable lorsque le besoin s’en fait sentir.

En effet, pour qu’un produit soit vraiment durable, il faut prendre en compte l’ensemble de son cycle de vie. Dans le secteur, on appelle cela une analyse du cycle de vie, ou ACV, qui utilise un produit de référence et un examen complet de l’article en question – de sa conception à la poubelle – pour déterminer la durabilité.

Mais de nombreuses entreprises ne vont pas aussi loin. Au lieu de cela, elles se concentrent sur un seul attribut de leur produit. Par exemple, contient‑il des matériaux recyclés ? Si c’est le cas, il peut être étiqueté « vert », indépendamment de la façon dont il a été créé ou de ce qui se passe une fois à la poubelle.

En 2022, 18 grands noms se sont vu reprocher des pratiques similaires de « blanchiment écologique ».

Parmi eux, Michelin, le géant de la mode H&M, le projet Ocean Cleanup, sensationnel sur Internet, et le groupe de musique Coldplay.

En définitive, les consommateurs doivent encore faire des efforts pour soutenir les entreprises qui proposent des produits véritablement écologiques.

Mais il semble que de nombreux défenseurs de l’environnement ne joignent pas le geste à la parole. Une analyse de 2022 a révélé que seulement 52% des consommateurs tentent de savoir comment les entreprises gèrent les ressources et si elles pratiquent un approvisionnement éthique pour leurs produits.

Du riz et des boissons aux amandes bio dans un supermarché bio à Saintes, dans l’ouest de la France, le 23 octobre 2018. (GEORGES GOBET/AFP via Getty Images)

Pour certains propriétaires d’entreprises du secteur vert, ce seul aspect est très révélateur.

Un mode de vie vert ?

« Je pense que pour vraiment tester les intentions ‘vertes’ des gens il faut voir dans quelle mesure ils ont vraiment évalué et passé au peigne fin leur vie de manière holistique et ont apporté des changements importants ou non », explique Lauren Byington à Epoch Times.

Lauren Byington dirige Heal Yes !, une société qui propose des produits de maquillage biologiques aux consommateurs soucieux de l’environnement.

Son entreprise a été une des premières à mettre l’accent sur l’approvisionnement éthique en mica, un minéral associé depuis toujours au travail forcé et à l’exploitation des enfants dans certains pays. Consciente du cycle de vie des produits, Mme Byington utilise également des emballages recyclables ou réutilisables.

Selon elle, pour déterminer le niveau d’engagement d’une personne à vivre « vert », il suffit d’examiner son mode de vie.

« Qu’en est‑il du riche homme d’affaires ou de l’homme politique qui a investi dans des entreprises écologiques et qui plaide constamment en faveur de l’énergie solaire et éolienne, mais qui vole en jet toutes les semaines, possède de nombreuses maisons aussi énormes qu’énergivores et dont la femme porte des pierres précieuses, des cosmétiques testés sur les animaux et d’autres produits obtenus par des méthodes cruelles ? »

Bouteilles en plastique recyclées, le 17 avril 2019. (Brenton Edwards/AFP via Getty Images)

Mme Byington implore les consommateurs de prendre le temps qu’il faut pour rechercher d’où viennent les produits avant de faire confiance aux entreprises, car les étiquettes « vertes » peuvent être trompeuses.

Certaines entreprises de cosmétiques propres peuvent prétendre à certains écolabels, mais de nombreuses plateformes fournissant ces certifications vertes exigent avant tout des frais annuels pour qu’un produit soit considéré comme « propre ».

Selon Melanie DiSalvo, spécialiste de la chaîne d’approvisionnement, les consommateurs ne font pas vraiment d’efforts et sont moins soucieux de l’environnement qu’ils ne l’affirment.

« Si les gens se souciaient réellement des questions environnementales, ils s’attacheraient à réutiliser ce qu’ils ont déjà et à ne pas gaspiller », explique-t-elle à Epoch Times.

Sa société Virtue + Vice travaille avec plus de 200 startups qui visent le durable. La plupart des gens ne font pas de réelles recherches avant d’acheter, admet-elle.

« Le consommateur moyen va lire quelques articles en ligne et fait ensuite son achat. Le problème avec beaucoup de ces articles est qu’ils sont écris par des influenceurs qui ne font pas vraiment autorité en la matière. »

Mme DiSalvo compare ce phénomène au jeu pour enfant qu’on appelle « le téléphone ». Une personne influente entend quelque chose de la part d’un expert en durabilité, apporte quelques modifications, puis transmet la rumeur aux médias.

« Si les consommateurs se souciaient de ces questions, ils devraient faire attention à qui leur donne des conseils. »

Lauren Byington, Carlos Cen Wu et Melanie DiSalvo estiment unanimement que la tendance à l’écoblanchiment se poursuivra jusqu’à ce que de meilleures réglementations soient mises en place.

Comme le rappelle Melanie DiSalvo, la sensibilisation à l’environnement n’a rien à voir avec l’image. Il s’agit de réduire et de réutiliser.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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