L’IA menace la dignité de l’humanité

Cette illustration photographique montre des écrans affichant le logo de DeepSeek, une société chinoise d'intelligence artificielle qui développe des modèles de langage de grande taille open source, et le logo du chatbot d'intelligence artificielle ChatGPT d'OpenAI à Toulouse, dans le sud-ouest de la France, le 29 janvier 2025.
Photo: Lionel Bonaventure/AFP via Getty Images
Les études examinant l’effet de l’intelligence artificielle (IA) sur une myriade d’activités humaines sont désormais monnaie courante, explorant comment l’avancée apparemment imparable de la technologie dans nos vies a tout affecté, des taux de plagiat à l’emploi, des diagnostics médicaux à la conduite d’un véhicule.
Aujourd’hui, une nouvelle étude de l’université Charles Darwin en Australie examine l’impact de ce phénomène sur notre humanité et conclut qu’il menace la dignité humaine à l’échelle mondiale.
L’auteure principale de l’étude, Maria Randazzo, qui travaille à la faculté de droit de l’université, explique que l’IA est en train de remodeler les paysages juridiques et éthiques occidentaux à une vitesse sans précédent, tout en sapant les valeurs démocratiques et aggravant les préjugés systémiques.
Les créateurs de l’IA ne faisant pas grand-chose pour résoudre le problème – et les nouvelles itérations de certains grands modèles de langage (LLMS) semblant aggraver la situation – il incombe aux législateurs de freiner ses pires excès.
Toutefois, Mme Randazzo soutient que les réglementations actuelles ne donnent pas la priorité aux libertés et droits fondamentaux de l’homme, tels que la vie privée, la lutte contre la discrimination, l’autonomie des utilisateurs et les droits de propriété intellectuelle, en grande partie en raison de la nature intraçable de nombreux modèles algorithmiques, que les grandes entreprises technologiques considèrent comme une propriété intellectuelle exclusive.

Maria Randazzo, docteure en philosophie de l’Université Charles Darwin en Australie, affirme que l’intelligence artificielle représente un risque pour la dignité humaine. (Crédit photo Université Charles Darwin)
Les décisions prises par des processus d’apprentissage en profondeur ou d’apprentissage automatique sont impossibles à retracer pour les utilisateurs, ce qui les empêchent de déterminer si et pourquoi un modèle d’IA a porté atteinte à leurs droits et à leur dignité, et de demander justice le cas échéant.
Elle qualifie cette situation de « problème de la boîte noire », car personne en dehors des entreprises technologiques ne sait ce qui se passe à l’intérieur de la boîte.
« Il s’agit d’un problème très important qui ne fera qu’empirer sans une réglementation adéquate », a souligné Mme Randazzo.
« L’IA n’est pas du tout intelligente au sens humain du terme. C’est une réussite en ingénierie, pas en comportement cognitif. Elle n’a aucune idée de ce qu’elle fait ou pourquoi – il n’y a pas de processus de pensée tel qu’un être humain le comprendrait, juste une reconnaissance des formes dépourvue d’incarnation, de mémoire, d’empathie ou de sagesse. »
Actuellement, les trois puissances numériques dominantes du monde – les États-Unis, la Chine et l’Union européenne – adoptent des approches très différentes de l’IA, s’appuyant respectivement sur des modèles centrés sur le marché, sur l’État et sur l’humain.
Mme Randazzo estime que l’approche centrée sur l’humain adoptée par l’UE est la meilleure façon de protéger la dignité humaine ; toutefois, sans un engagement mondial en faveur de cet objectif, même cette approche ne suffit pas.
« Globalement, si nous n’ancrons pas le développement de l’IA à ce qui fait de nous des êtres humains – notre capacité à choisir, à ressentir, à raisonner avec soin, à faire preuve d’empathie et de compassion – nous risquons de créer des systèmes qui dévalorisent et réduisent l’humanité à des points de données, au lieu d’améliorer la condition humaine », a-t-elle expliqué.
« L’humanité ne doit pas être traitée comme un moyen pour parvenir à une fin. »

Rex Widerstrom est un journaliste néo-zélandais qui a plus de 40 ans d'expérience dans les médias, y compris la radio et la presse écrite. Il est actuellement présentateur à Hutt Radio.
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