Limiter l’accès de la Chine à certaines technologies permettrait de mieux lutter contre leur système de prélèvements d’organes forcés, selon des experts

Des experts se sont entretenus avec la commission exécutive du Congrès américain sur la Chine

Par Eva Fu & Frank Fang
25 mars 2024 07:01 Mis à jour: 25 mars 2024 21:48

WASHINGTON – Des chercheurs demandent aux autorités américaines que les technologies occidentales utilisées dans le domaine de la transplantation d’organes ne soient pas aussi facilement transférables vers la Chine, soulignant qu’un tel transfert de compétences favorisent le système de prélèvements d’organes forcés orchestré par l’État chinois.

Matthew Robertson, chercheur, spécialiste de la Chine à la Fondation pour la mémoire des victimes du communisme (Victims of Communism Memorial Foundation), estime que cette mesure serait l’un des moyens les plus efficaces de lutter contre les violations des droits de l’homme commises par le Parti communiste chinois (PCC).

« Les autorités pourraient interdire l’exportation de technologies et de produits pharmaceutiques liés aux transplantations, et empêcher les entreprises américaines de transiger avec la Chine dans le secteur de la transplantation », a-t-il écrit dans un témoignage écrit pour une audition au Congrès intitulée « Stopper le crime des prélèvement forcés d’organes – Que faut-il faire de plus? » (Stopping the Crime of Organ Harvesting—What More Must Be Done?).

Le département du Trésor pourrait également élaborer des sanctions visant à empêcher les hôpitaux chinois impliqués dans le système de prélèvements d’organes forcés, et qui comptent parmi les « plus grands et les plus riches [hôpitaux] de Chine », de travailler avec des particuliers américains, selon M. Robertson, qui a précédemment travaillé comme journaliste à Epoch Times.

(De gauche à droite) Chris Smith, président de la Commission exécutive du Congrès sur la Chine (CECC), le sénateur Jeff Merkley et la représentante Michelle Steel lors d’une audition sur les prélèvements d’organes forcés orchestré par le Parti communiste chinois devant la Commission exécutive du Congrès sur la Chine, à Washington, le 20 mars 2024. (Madalina Vasiliu/Epoch Times)

Même si ces désignations nécessiteraient une importante concertation entre les agences américaines, une liste noire de milliers d’hôpitaux et de chirurgiens pour cause de violations enverrait « un signal extrêmement fort » quant à l’opposition des États-Unis au « trafic d’êtres humains, aux exécutions extrajudiciaires et aux prélèvements d’organes forcés », a-t-il déclaré.

Présidant l’audition du 20 mars, le républicain Chris Smith, président de la Commission exécutive du Congrès sur la Chine, a décrit l’industrie des prélèvements forcés d’organes en Chine comme étant « une atrocité d’une malfaisance sans égal ».

« Nous avons tous la responsabilité d’agir », a-t-il déclaré à l’auditoire. « Si nous n’agissons pas maintenant, de nombreuses autres vies seront perdues. »

En 2019, dans son jugement final, le China Tribunal, à Londres, a conclu que le prélèvement d’organes forcé « est pratiqué depuis des années dans toute la Chine sur une grande échelle et que les pratiquants du Falun Gong ont été l’une – et probablement la principale – source d’approvisionnement en organes ». Le Falun Gong est une discipline spirituelle durement persécutée dans la Chine communiste.

Lors de l’audition, le républicain Zach Nunn s’est dit horrifié par la brutalité du phénomène.

« Je ne vois pas d’acte plus odieux que de prendre un prisonnier politique, de l’attacher à un lit d’hôpital et de lui voler des parties de son corps », a-t-il déclaré dans son discours d’ouverture.

« Cela se passe aujourd’hui même dans le pays le plus peuplé du monde, et ceux qui ont été persécutés à maintes reprises, les Ouïghours, les pratiquants du Falun Gong et les détenus, sont souvent l’objet de ces crimes odieux, mais ils ne sont pas les seuls – il s’agit d’une pratique répandue et routinière dans toute la Chine. »

« L’ère de la folie et du massacre de masse d’une population, doit cesser, en particulier lorsqu’ils sont menés sous le couvert de la science. »

Zachary Nunn lors d’une audience sur les prélèvements forcés d’organes cautionnés par le Parti communiste chinois (PCC) devant la Commission exécutive du Congrès sur la Chine à Washington le 20 mars 2024. (Madalina Vasiliu/Epoch Times)

Un nombre croissant de chercheurs s’alarment aujourd’hui de l’extension de ces violations à d’autres groupes réprimés.

Lors de l’audition, Ethan Gutmann, enquêteur spécialiste dans les droits de l’homme et cofondateur de la Coalition internationale pour mettre fin aux abus de transplantation en Chine (ETAC), a déclaré avoir interrogé d’anciens détenus de camps de détention de la région du Xinjiang, dans le nord-ouest de la Chine. Ces derniers ont fait état de prélèvements sanguins inexpliqués et de disparitions soudaines de détenus au milieu de la nuit.

M. Gutmann a noté qu’un hôpital de la ville d’Aksu, qui pratique des transplantations d’organes, se trouve à 20 minutes de route de l’aéroport, où une « voie express » a été instaurée pour faciliter le transport d’organes fraichement prélevés.

Selon les données de l’autorité de l’aviation civile chinoise d’avril 2023, ces voies express ont été empruntées plus de 11.000 fois dans tout le pays au cours des six années qui ont suivi leur mises en place.

« La plus grande base de données d’ADN »

Maya Mitalipova, directrice du laboratoire de cellules souches humaines au Whitehead Institute for Biomedical Research du MIT, a déclaré que certaines entreprises sont complices des violations commises par la Chine en matière de prélèvements forcés d’organes, selon son témoignage écrit. Cette dernière a déclaré que la Chine utilise les kits de séquençage d’ADN de certaines entreprises pour constituer la « plus grande base de données d’ADN du monde » afin de trouver facilement des organes compatibles pour les patients en attente d’une transplantation.

Mme Mitalipova a nommé deux entreprises : Thermo Fisher Scientific, fabricant américain d’équipements médicaux, et BGI Group, basé en Chine. En décembre 2022, le républicain Chris Smith et trois autres membres de la CECC ont fait parvenir une lettre à Thermo Fischer, posant des questions à la société sur ses pratiques et produits. Le fabricant américain d’équipements médicaux a répondu dans une lettre que ses produits sont utilisés pour des « enquêtes médico-légales de routine » et des « enquêtes policières et médico-légales » en Chine.

Maya Mitalipova, directrice du laboratoire de cellules souches humaines au Whitehead Institute for Biomedical Research, MIT, témoigne lors d’une audition sur les prélèvements forcés d’organes cautionnés par le Parti communiste chinois (PCC) devant la Commission exécutive du Congrès sur la Chine, à Washington, le 20 mars 2024. (Madalina Vasiliu/Epoch Times)

En octobre 2023, citant la lettre de Thermo Fischer, Chris Smith et le sénateur démocrate Jeffrey Merkley, coprésident de la CECC, ont écrit au secrétaire d’État Antony Blinken, au secrétaire au commerce Gina Raimondo et à la secrétaire au Trésor Janet Yellen, demandant des contrôles à l’exportation des technologies utilisées pour la collecte massive de données biométriques au Tibet.

« Puisque si peu de garanties existe sur la manière dont l’ADN et d’autres données biométriques sensibles sont recueillies et utilisées en République populaire de Chine (RPC), nous craignons que le matériel de collecte et d’analyse biométrique ne permette des violations flagrantes des droits de l’homme, allant de la surveillance de masse coercitive aux prélèvements forcés d’organes », écrivent les deux législateurs.

Epoch Times a contacté Thermo Fisher pour commentaires.

Le gouvernement américain a sanctionné plusieurs filiales du groupe BGI pour avoir effectué des analyses génétiques pour le compte du régime chinois ces dernières années. Toutefois, l’entreprise a nié avoir été impliquée dans des violations des droits de l’homme à la suite des sanctions américaines de 2020.

En 2023, le directeur général de BGI, Zhao Lijian, a déclaré aux médias d’État chinois que son entreprise devait mener ses activités commerciales « conformément aux stratégies nationales du pays ». En 2021, Reuters a rapporté que, selon son enquête, le groupe BGI travaillait avec l’armée chinoise pour recueillir les données de millions de femmes par le biais de tests prénataux.

S’il est probable que ces entreprises « sont liées », Mme Mitalipova souligne qu’elles ne sont pas les seules complices.

« Peut-être que sanctionner Thermo Fisher servira de leçon, mais, dans tous les cas, il doit y avoir un encadrement réglementaire », a-t-elle déclaré à Epoch Times.

M. Robertson a exhorté le Congrès à enquêter sur la complicité des hôpitaux chinois [dans le système de prélèvements d’organes forcés], notamment pour savoir s’ils ont bénéficié d’un financement fédéral par le biais d’une coopération avec des établissements américains.

« Les institutions bénéficiaires [de fonds fédéraux] devraient être invitées à rendre compte de leur niveau de surveillance vis-à-vis des sous-bénéficiaires [de ces fonds] potentiellement impliqués dans ces pratiques », a-t-il ajouté.

Dans une étude publiée en 2019 dans la revue scientifique BMC Medical Ethics, M. Robertson soupçonne la Chine d’avoir systématiquement falsifié les données relatives aux dons d’organes. Dans une étude ultérieure publiée dans l’American Journal of Transplantation en 2022, M. Robertson relève 71 articles en langue chinoise dans lesquels des médecins ont prélevé des cœurs et des poumons sur des personnes en vue d’une transplantation, sans effectuer de test de mort cérébrale préalable, indiquant que les patients ont été tués pendant le prélèvement de l’organe.

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