Reporters sans Frontières : un journaliste d’Epoch Times entendu par un juge après 2 mois de détention arbitraire au Nigeria

Par Nathalie Dieul
1 janvier 2022 13:11 Mis à jour: 1 janvier 2022 17:04

Accusé d’avoir publié de « fausses informations » dans son article dénonçant les massacres des chrétiens dans le nord-ouest du Nigeria, le journaliste d’Epoch Times Luka Binniyat a été arrêté le 4 novembre dernier. Il devait être finalement entendu par un juge ce mercredi 29 novembre dernier. Reporter sans frontières dénonce le fait qu’il ait passé près de deux mois de détention arbitraire pour avoir seulement fait son travail.

L’arrestation de Luka Binniyat est liée à son article, publié le 29 novembre dans Epoch Times, qui dénonçait le fait que la police et l’armée du Nigeria n’avait procédé à aucune arrestation un mois après l’horrible massacre de 38 hommes, femmes et jeunes enfants non armés dans le village de Madamai, dans l’État de Kaduna, le 26 septembre.

Arrêté le 4 novembre, le journaliste n’a pas eu la possibilité d’être libéré sous caution, ses deux demandes ayant été refusées par le tribunal, précise Reporter sans frontières (RSF), qui « dénonce la détention arbitraire prolongée de Luka Binniyat » dans un article publié la veille de la comparution de ce dernier devant un magistrat.

L’audience devait avoir lieu le 6 décembre, mais l’absence du juge a repoussé celle-ci de trois semaines. Elle a finalement été fixée au 29 décembre.

« Il n’a rien fait d’autre que son métier »

« Ce journaliste est persécuté alors qu’il n’a rien fait d’autre que son métier », déplore Arnaud Froger, responsable du bureau Afrique de RSF. « Nous appelons la justice nigériane à libérer immédiatement ce journaliste et à cesser de vouloir faire taire ceux qui dénoncent la réalité des massacres à Kaduna », ajoute-t-il.

« C’est un outrage à la justice que les autorités nigérianes laissent les extrémistes peuls violents qui détruisent village après village s’en tirer à bon compte sans enquête, poursuite ou punition, tout en s’empressant d’envoyer en prison un journaliste courageux qui rapporte des massacres de civils innocents », a déclaré Nina Shea, directrice de l’Institut Hudson pour la liberté religieuse, à Epoch Times.

« L’arrestation récente de Luka Binniyat – après qu’il a fait un reportage sur les massacres pour un média – s’inscrit dans la continuité du camouflage systématique par le gouvernement des atrocités commises par les Fulanis contre des villageois chrétiens pacifiques », a ajouté Mme Shea. « Il s’agit d’une preuve supplémentaire qu’un génocide ethnico-religieux est en cours dans le nord du Nigeria et qu’il est perpétré avec la complicité des autorités », assure-t-elle.

Luka Binniyat est en difficulté en tant que journaliste depuis qu’il a été emprisonné dans l’État de Kaduna en 2017 pour plusieurs chefs d’accusation, dont celui de « violation de la paix », selon le Comité pour la protection des journalistes (CPJ).

« Accuser un journaliste de ‘violation de la paix’ simplement pour avoir informé le public est inacceptable, et le jeter arbitrairement en prison lorsqu’il se présente pour une audience est scandaleux », a déclaré Angela Quintal, coordinatrice du programme Afrique du CPJ, en juillet 2017.

Liberté de la presse menacée au Nigeria

M. Binniyat fait partie des quelques journalistes actifs critiquant le gouvernement qui ont été accusés d’« incitation ». Certains d’entre eux, comme les journalistes Internet Steven Kefas et George Makeri, réalisent leurs reportages depuis des lieux tenus secrets dans les États de la ceinture médiane du Nigeria, de peur d’être arrêtés et détenus pendant des mois sans caution.

Le journaliste d’investigation Ibanga Isine a lui aussi été contraint de quitter le pays en janvier 2021 après avoir enquêté sur les massacres du sud de Kaduna. Plusieurs de ses sources ont été tuées en marge de ses reportages et il a dû prendre ses précautions pour ne pas connaître le même sort, assure RSF.

Le journaliste Jones Abiri a été détenu pendant deux ans dans des prisons secrètes et souterraines. M. Abiri a expliqué à Epoch Times qu’il n’a pas la liberté de parler de son expérience en prison car des poursuites sont en cours contre lui.

Lorsque Steven Kefas est sorti d’une prison de Kaduna en 2020 après un séjour de cinq mois, il était atteint de maladies tropicales, dont le paludisme. Même feu Obadiah Malafia, ancien haut fonctionnaire du gouvernement, a été arrêté à l’automne 2020 et publiait ses articles d’opinion en 2021 tout en se cachant, jusqu’à son décès dans un hôpital de Jos cette année.

« De manière générale, la liberté de la presse au Nigeria est menacée lorsque les journalistes craignent d’être détenus pour leur travail », a déclaré M. Rozen à Epoch Times.

RSF rappelle que le Nigeria se classe 120e sur 180 pays au classement mondial de la liberté de la presse.

Plus de 43 000 chrétiens assassinés

M. Binniyat est l’un des rares reporters d’Epoch Times dont les articles factuels sur les atrocités ont attiré l’attention de la correspondante de guerre de Fox News, Lara Logan.

Plus de 43 000 citoyens chrétiens ont été assassinés par des mercenaires islamistes radicalisés de la Middle Belt ou par des insurgés lourdement armés liés à la branche nigériane de l’État islamique d’Irak et de Syrie (ISIS) depuis 2015, selon le documentaire de Lara Logan sur le carnage au Nigeria qui a commencé à être diffusé sur le site Fox Nation le 27 septembre.

L’épuration religieuse au Nigeria documenté par Lara Logan n’a reçu qu’un faible accueil mondial, mais il peut potentiellement sensibiliser l’Occident davantage. « Le film de Lara Logan, qui mentionne le travail de M. Binniyat et d’autres journalistes d’Epoch Times, a peut-être attiré l’attention des autorités nigérianes », selon le professeur Dick Andzenge, immigré du Nigeria et aujourd’hui professeur de justice pénale et de victimologie à la St Cloud State University.


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