On verse du sang à cause du pétrole

Par Thomas McArdle
8 avril 2022 18:30 Mis à jour: 8 avril 2022 19:25

Au cours de la guerre du Golfe menée par l’ex-président américain George H. W. Bush en 1991, les manifestants ont lancé le slogan « Pas de sang pour le pétrole ». Le pétrole était considéré comme une marchandise sale, lucrative et émettrice de gaz à effet de serre pour laquelle on ne devrait pas mourir. Cependant, le pétrole n’est pas le venin du diable, comme beaucoup de gens semblent en avoir été convaincus.

L’or noir pompé dans les profondeurs du sol a souvent été qualifié d’élément vital de l’économie mondiale. Même si on le glorifie de cette manière, on n’admet pas tous ses mérites. Le pétrole était utilisé dans l’Antiquité pour la construction, le chauffage et même à des fins médicinales. Toutefois, avant l’ère industrielle, il n’était rien de plus qu’une nuisance boueuse pour presque tout le monde. Aujourd’hui, chaque jour, il fournit la nourriture à des milliards de personnes, alimente le véhicule qui se rend à votre domicile pour emmener votre proche aux urgences quelques minutes après votre appel, permet à des milliards de personnes de se rendre à leur travail qui n’existerait pas si ces personnes ne pouvaient pas faire le trajet, et il tient ces personnes au chaud en hiver à leur lieu de travail et chez elles avec leur famille.

En outre, ce combustible fossile est bon marché (tant que la gauche n’est pas autorisée à gonfler son prix), il est moins cher que toutes les « alternatives vertes », des alternatives qui ne seront pas encore très longtemps compétitives avec les combustibles fossiles, en ce qui concerne le prix. De plus, les sources « alternatives » comme l’énergie éolienne et l’énergie solaire se sont avérées peu fiables, dépendantes des conditions météorologiques et insuffisantes pour répondre à la demande des pays européens – les pays qui ont opté pour ces sources en important en même temps des combustibles fossiles et en sacrifiant leur propre indépendance énergétique.

De sérieuses perturbations dans la disponibilité globale du pétrole – ce principal combustible fossile et le liquide le plus abondant sur la planète après l’eau – provoqueraient un effondrement économique. La récession, le chômage de masse, la famine, les émeutes, les bouleversements politiques et la vulnérabilité aux agressions étrangères sont les éléments à prévoir si des pénuries majeures rendent le prix du pétrole et de l’essence prohibitif.

Une fois que l’on a pris conscience de ces facteurs, verser du sang à cause du pétrole peut prendre un sens différent. Le président russe Vladimir Poutine ne bombarderait pas aujourd’hui des civils en Ukraine dans sa quête de restaurer le territoire de l’Union soviétique si l’Europe, en particulier l’Allemagne, ne s’était pas laissée devenir aussi dépendantes des sources d’énergie russes – particulièrement du gaz naturel, le combustible fossile frère du pétrole. Cette dépendance, à son tour, n’existerait pas si les nations du monde libre n’avaient pas, depuis des décennies, considéré le pétrole à travers un prisme idéologique le plus déformé. Le sang des Ukrainiens coule parce que les gouvernements européens détestent le pétrole.

Avec près de 10 millions de barils par jour, la Russie est le deuxième producteur de pétrole au monde. La dépendance de l’Allemagne des sources d’énergie russes, surtout du gaz, remonte à la guerre froide – ce qui a été salué à l’époque en tant que stratégie éclairée d’apaisement de l’Union soviétique. Lorsque le mur de Berlin est tombé en 1989, les Soviétiques fournissaient environ un tiers du gaz de l’Allemagne de l’Ouest, dont les importations étaient passées de 1,1 milliard de mètres cubes en 1973 à 25,7 milliards en 1993. Le gazoduc Nord Stream 1, dont l’exploitation a débuté en 2012, achemine toujours le gaz directement de la Russie vers l’Allemagne en passant par la mer Baltique.

Gerhard Schröder, le chancelier allemand à l’origine du projet Nord Stream, était si proche de Poutine qu’il continue encore aujourd’hui à récolter sa récompense financière personnelle. Après sa démission de la chancellerie en 2005, il a été engagé comme président du conseil de surveillance du Nord Stream par la société russe Gazprom – le bras droit du Kremlin qui domine le marché gazier mondial. Depuis 2017, Schröder est également à la tête du conseil d’administration de Rosneft, le géant pétrolier contrôlé par l’État russe. En outre, en février 2022, il a été nommé candidat au conseil d’administration de Gazprom.

Les Allemands vivent depuis longtemps dans un « Narrenparadies » – un paradis des fous. Comme l’a fait remarquer Felix Chang du Foreign Policy Research Institute, « même si les sources d’énergie renouvelables ont pris une part plus importante dans le mix énergétique du pays, l’Allemagne n’a pas été capable de se sevrer du charbon et du gaz naturel ».

La naïveté de l’extension des liens économiques bien dangereux a valu le prix Nobel de la paix 1971 au chancelier ouest-allemand Willy Brandt qui a été qualifié par le comité Nobel du « grand chancelier de la paix et de la réconciliation de l’Allemagne ». L’année précédente, Brandt avait signé à Moscou un accord dans lequel, comme l’a souligné le président du comité Nobel lors de la cérémonie de remise du prix, « les deux pays ont déclaré qu’ils n’avaient pas de revendications territoriales sur d’autres pays », qu’ils « respecteraient l’intégrité de tous les autres pays à l’intérieur de leurs frontières actuelles » et qu’ils ont exprimé leurs « souhaits mutuels de coopération économique, technique et culturelle accrue ». Bien sûr, à cette époque, l’Ukraine était encore derrière le rideau de fer. Il a fallu faire face à des crimes de guerre des troupes de Poutine, cet ancien officier du KGB, pour provoquer un réveil brutal bien trop tardif – l’Allemagne a récemment décidé de reporter indéfiniment l’utilisation du gazoduc Nord Stream 2.

L’installation du gazoduc Nord Stream 2 à Lubmin, dans le nord-est de l’Allemagne (ODD ANDERSEN/AFP via Getty Images)

Il y a longtemps que l’Allemagne est devenue fanatique de l’énergie verte avec sa politique « d’Energiewende » (transition énergétique), supprimant les énergies fossiles et nucléaires. Il y a 11 ans, Angela Merkel – qui a succédé à Schröder en tant que chancelière allemande, parlait couramment russe et maintenait des liens étroits avec Poutine – a entamé la suppression progressive de toutes les centrales nucléaires allemandes qui devait initialement s’achever en 2022.

Les politiques énergétiques des pays occidentaux ont été également basées sur la fausse croyance que l’épuisement des combustibles fossiles est proche. Cependant, rien qu’aux États-Unis, il reste pour près d’un siècle de réserves de gaz naturel déjà découvertes. En même temps, de 2016 à 2018 – en deux ans à peine – l’Institut d’études géologiques des États-Unis a augmenté de 20 à 46,3 milliards de barils son estimation du pétrole récupérable seulement dans la section Wolfcamp du bassin permien au Texas et au Nouveau-Mexique – et ce, en raison des améliorations technologiques apportées aux méthodes d’extraction.

Pourtant, depuis au moins les années 1950, les « prophètes de malheur » nous mettent en garde contre l’épuisement du pétrole au cours de la prochaine génération. Par exemple, le célèbre géophysicien Marion King Hubbert prévoyait, en 1956, que la production de pétrole en Amérique atteindrait son maximum aux alentours de 1970, avant de commencer à décroître. Toutefois, les nouvelles technologies d’extraction ont montré que sa théorie du pic pétrolier ne tenait pas debout. En 2017, la production américaine a dépassé la barre des 10 millions de barils par jour pour la première fois depuis 1970.

La guerre en Ukraine, qui a déjà tué des milliers de personnes et a poussé plus de 10 millions d’Ukrainiens à fuir leur foyer, est la conséquence du fait que l’on a laissé l’idéologie écologiste régir la politique énergétique européenne. Pendant des décennies, l’Europe a été piégée et fermait les yeux sur la nature malveillante de Poutine – et ce, malgré le fait qu’il ait envahi la Crimée en 2014, assassiné ses critiques politiques (organisé, par exemple, l’empoisonnement du journaliste Alexandre Litvinenko avec un isotope radioactif en 2006) et a déclaré, l’année précédente, que l’effondrement de l’Union soviétique était « la plus grande catastrophe géopolitique du siècle dernier ».

La guerre menée contre les combustibles fossiles a déjà fait couler beaucoup de sang, et davantage de sang coulera encore si les gouvernements laissent leur vision être brouillée par les idées douteuses des écologistes modernes.

Thomas McArdle a rédigé les discours de l’ex-président américain George W. Bush et il écrit actuellement pour IssuesInsights.com.

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Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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