Procès de deux avocats, soupçonnés d’avoir usé de faux pour blanchir un narcotrafiquant

Par Epoch Times avec AFP
23 janvier 2023 12:03 Mis à jour: 23 janvier 2023 14:55

Deux figures du barreau de Paris s’assoient lundi sur le banc des prévenus, soupçonnés d’avoir produit à l’audience des faux documents lors d’un procès en 2018, afin d’innocenter, en vain, un Britannique considéré comme l’un des plus gros narcotrafiquants d’Europe.

Me Joseph Cohen-Sabban et Me Xavier Nogueras, 69 ans et 42 ans, sont jugés jusqu’au 7 février par le tribunal correctionnel de la capitale pour complicité de tentative d’escroquerie au jugement et violation du secret professionnel, ils contestent les accusations.

Escroquerie et faux en écriture

Jugés avec eux : deux Britanniques, le trafiquant Robert Dawes, 50 ans, et un de ses proches, Evan Hughes, 68 ans, renvoyés pour tentative d’escroquerie au jugement et faux en écriture publique, ce dont ils se défendent.

L’affaire débute à la cour d’assises spéciale de Paris, en décembre 2018. Robert Dawes est jugé pour avoir importé 1,3 tonne de cocaïne en 2013 à bord d’un vol Air France reliant Caracas à Paris, une saisie d’un montant alors estimé à 50 millions d’euros.

À l’ouverture des débats, ses avocats produisent une supposée ordonnance espagnole présentant comme illégale une écoute téléphonique capitale pour l’accusation, dans laquelle Robert Dawes revendique la paternité de la drogue.

Ils versent aussi des retranscriptions d’écoutes téléphoniques et de sonorisations visant à disculper l’accusé.

Joseph Cohen-Sabban et Xavier Nogueras, qui le défendent avec Hugues Vigier, pilonnent la procédure, réclament le renvoi du procès ainsi qu’un supplément d’information afin d’acter l’authenticité de ces nouveaux documents.

La cour décide néanmoins de poursuivre le procès et, quelques jours plus tard, elle écarte ces écrits qu’elle qualifie de « faux ». Robert Dawes est condamné à vingt-deux ans de réclusion criminelle et à une amende douanière de 30 millions d’euros, une peine aujourd’hui définitive.

Quelques semaines après le procès, une information judiciaire est ouverte sur ces soupçons de falsifications : elle aboutira en février 2022 au renvoi des quatre hommes devant le tribunal.

Les investigations ont conclu que ces éléments avaient été transmis par Evan Hughes, soupçonné de les avoir fabriqués ou fait fabriquer, sur instruction de Robert Dawes, depuis sa cellule de prison.

Pour les juges d’instruction, s’il n’est pas établi que les avocats savaient que les documents étaient falsifiés, ces derniers « ne pouvaient que s’interroger quant à leur authenticité ». Ils ont « sciemment accepté de renoncer à leur indépendance » en « épousant les projets déloyaux et les stratagèmes » du Britannique, ont estimé les magistrats.

Les avocats ont au contraire affirmé leur bonne foi, assurant avoir été trompés.

Incompréhension et crispation

Habitué des assises, des dossiers de stupéfiants et de banditisme, Joseph Cohen-Sabban a plus de 45 ans de barre.

« Ce procès est le reflet de l’incompréhension et de la crispation actuelle de certains face au rôle pourtant essentiel de l’avocat dans le procès pénal », ont déclaré à l’AFP ses conseils, Mes Steeve Ruben, Christian Saint-Palais et Éric Najsztat. L’avocat, « qui a consacré sa vie à la défense pénale, aborde ce procès avec détermination », ont-ils ajouté.

Xavier Nogueras, spécialiste des affaires de terrorisme, est défendu par Mes Matthieu Chirez et Hervé Temime. « En aucun cas il n’a participé aux faits de complicité de tentative d’escroquerie au jugement et il n’a violé aucune règle déontologique », avaient-ils déclaré lors du renvoi en février 2022.

Evan Hughes « conteste sa participation » aux infractions, a souligné Me Antoine Beauquier. La défense de Robert Dawes n’a pas souhaité s’exprimer.

Cette affaire avait altéré les relations déjà tumultueuses entre avocats et magistrats.

Détenu à Fleury-Mérogis (Essonne), Robert Dawes s’efforce, depuis sa condamnation, d’attaquer la procédure à l’origine des poursuites : il a obtenu la désignation en juillet d’un juge de Nanterre pour enquêter sur des soupçons de faux procès-verbaux.

Dans son viseur, l’ancien patron des « stups » François Thierry. Les techniques d’enquête controversées de ce dernier lui ont valu plusieurs mises en examen.

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