Retombées de l’éditorial du Quotidien du Peuple contre Jiang Zemin

25 août 2015 18:55 Mis à jour: 17 octobre 2015 23:45

Le 10 août, le Quotidien du Peuple, porte-parole du Parti communiste chinois a publié un éditorial qui semblait viser directement l’ancien dirigeant du Parti, Jiang Zemin. Celui-ci n’a pas été nommé, mais il semblait que presque chaque personne suivant la politique chinoise en avait compris sa signification : Jiang Zemin devrait cesser de se mêler des affaires politiques actuelles.

Les jours suivant la parution de l’éditorial, de nombreuses interprétations et spéculations bruissaient, juste sur sa signification. Les éditoriaux du Quotidien du Peuple ont souvent servi d’outils importants pour les principaux dirigeants du Parti afin de véhiculer leurs pensées les uns sur les autres, souvent dans un contexte de lutte politique, et pour unifier la pensée des cadres du Parti et des masses derrière la dernière direction politique du moment.

Ci dessous, un florilège de manières dont l’apparent avertissement à Jiang Zemin a été interprété et les références codées faites dans la presse – à partir des parallèles avec des dirigeants étrangers comme George W. Bush et Tony Blair, sur les ‘combinaisons de mouvements de boxe’ du dirigeant chinois, Xi Jinping.

Les commentaires sur le Quotidien du Peuple
Le Quotidien du Peuple a fait suivre son éditorial de deux articles sur WeChat, un service populaire de messagerie texte et vocale de la compagnie Internet Tencent, sur la manière dont les cadres séniors du Parti et les dirigeants étrangers se retirent. Les deux affaires sont supposées être considérées comme didactiques.

Le premier billet a rappelé l’idée de l’ancien patron du Parti, Deng Xiaoping selon laquelle les cadres séniors du Parti devraient faire de leur « priorité numéro une » de « choisir soigneusement un bon successeur. »

Si cette « révolution » du remplacement des « personnes âgées et malades » par des jeunes devait cesser, cela pourrait mener à la « fin du Parti et de la nation » aurait déclaré Deng Xiaoping.

Le second billet a listé six dirigeants étrangers – les anciens présidents des États-Unis George W. Bush et Bill Clinton, l’ancien premier ministre britannique Tony Blair, l’ancien chancelier allemand, Gerhard Schröder, l’ancien président du Nigéria, Olusegun Obasanjo et l’ancien Premier ministre du Japon Naoto Kan – et leurs carrières post-politiques.

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Selon le Quotidien du Peuple, les dirigeants occidentaux se sont lancés dans les affaires, ont rejoint des organisations internationales ou écrit des livres. À l’inverse, Obansanjo et Kan sont revenus en politique, le premier de façon plus éclatante que le dernier – Obasanjo, autrefois dirigeant militaire, a été démocratiquement élu en 1999 alors que la campagne de Kan en 2014 lors des élections à la Chambre des Représentants du Japon, à l’extérieur de la gare de Kyoto, n’a attiré personne. En aucun cas, ces dirigeants identifiés n’ont tenté d’interférer avec la politique de leurs successeurs.

Les commentaires sur Beijing News
Beijing News, un tabloïd quotidien dirigé par les autorités municipales de Pékin a publié une information sur son compte WeChat au sujet des anciens dirigeants communistes qui prêchaient ou pratiquaient une bonne habitude de succession ; et l’influence des « gros tigres » – l’étiquette officielle de hauts fonctionnaires du Parti ciblés pour corruption – alors qu’ils étaient au pouvoir ou après leur retraite. L’enquête sur les responsables qu’ils ont choisi de mettre en lumière semblait lourde de sens.

Deng Xiaoping
Au cours d’un discours intitulé « Réforme du Parti et du système de gouvernance », lors de la réunion du Bureau Politique du Comité Central de la Commission du Parti Communiste du 8 août 1980, Deng a déclaré que les dirigeants du Parti ne devraient pas tenir de poste « indéfiniment ».

Plus tard, Deng Xiaoping a soulevé de façon répétée, la notion de « retrait complet » – un cadre abandonnant tous ses postes après avoir terminé son mandat – et déclaré qu’il « créerait personnellement un exemple pour le système de retrait. » (Bien qu’il se soit refusé de le faire).

Wan Li
Dans un entretien exclusif avec Beijing News, suite au décès récent de Wan Li, un ancien du Parti de l’ère révolutionnaire qui fut autrefois Premier ministre, Wan Boao, fils ainé de Wan Li a déclaré: « Lorsque mon père s’est retiré, il s’est retiré complètement, sans interférer avec les décisions des autorités centrales ». Une fois mon père m’a dit,  » Après t’être retiré, ‘tu peux soutenir de ton mieux les dirigeants du gouvernement central en ne posant pas de question, en n’étant impliqué dans rien et en ne causant aucun problème.’ Ainsi, il a créé trois règles pour lui-même – ne tenir aucune position honoraire, ne pas participer à des cérémonies d’inauguration et de ne pas inscrire ou écrire de préfaces de livres.  »

Zhu Rongji
Après s’être retiré du poste de Premier ministre en 2003, Zhu Rongji a déclaré qu’il ne parlerait pas de questions relatives au travail parce que « ceux qui n’occupent pas de poste politique ne devraient pas se préoccuper de politique » (不在其位,不謀其政).

Zhou Yongkang
L’ancien tsar de la sécurité chinoise, récemment destitué, a nommé des hommes de confiance à différents postes à Petro China, où il a travaillé pendant 32 ans, et dans la province méridionale du Sichuan, où il a occupé le poste de secrétaire provincial du Parti de 1999 à 2002.

Jiang Jiemin
Jiang, ancien haut dirigeant chinois du secteur pétrolier et un des protégés de Zhou Yongkang a aidé des personnes à s’enrichir illégalement alors qu’il travaillait à Petro China.

Li Chuncheng
Sous les ordres de Zhou Yongkang, Li a abusé de ses anciens postes de maire et de secrétaire municipal du Parti de Chengdu, capitale du Sichuan pour s’enrichir ainsi que ses proches.

Les commentaires sur Mingjing News
Zhang Lifan, commentateur politique vivant à Pékin a expliqué dans Mingjing News, publication étrangère en langue chinoise que la gérontocratie – la gouvernance par un groupe de vieillards – a constitué un problème depuis que Deng Xiaoping était au pouvoir.

L’article du Quotidien du Peuple est « clairement une forme de propagande » a déclaré Zhang Lifan. « Un tel article n’aurait pas été publié sans raison. Je pense qu’il s’agit de l’une des combinaisons de mouvements de boxe de Xi Jinping … un signe que la lutte politique, déclenchée par la campagne anti-corruption, n’est pas parvenue à son terme. »

« Quant à la façon dont cela se développera, ce qui m’inquiète le plus est la réaction de l’armée » a conclu Zhang.

Mingjing News publie régulièrement des nouvelles de scandales politiques et de rumeurs, y compris de fuites venant de l’intérieur de Chine. Il serait utilisé par des factions au sein du Parti pour publier des informations qu’il est dans leur intérêt de dévoiler.

Les commentaires de Radio Free Asia
Dans un commentaire pour Radio Free Asia, l’analyste des affaires politiques et économiques, Chen Pokong a écrit que l’éditorial du Quotidien du Peuple contre Jiang Zemin appartient, en fait, à un lot de trois articles sur le même thème, les deux premiers ayant été publiés par des organes de presse chinois affiliés avec la faction du dirigeant chinois Xi Jinping.

Selon Chen Pokong, le magazine chinois d’affaires Caixin, dans un article du 30 juillet, a mis en avant la chute de l’ancien général Guo Boxiong et fortement laissé entendre que Guo et Xu Caihou, un autre général destitué, étaient les « hommes du président Jiang Zemin ».

Le 5 août, le nouveau site d’information chinois, The Paper, a publié un long essai sur les dirigeants clé du Parti ayant honoré « les rives de la Beidaihe », où une réunion importante se tient annuellement pour discuter de questions politiques majeures. L’article s’est référé à Jiang Zemin, non par son nom, mais comme étant « le dirigeant de la troisième génération », un geste que Chen Pokong interprète comme une tentative d’inscrire l’ancien dirigeant chinois dans l’histoire du Parti et selon la littérature du Parti, marquer Jiang comme une cible à « faire tomber ».

Selon Chen Pokong, Caixin est connu pour être « subordonné » à Wang Qishen, patron de l’agence anti-corruption et homme de confiance de Xi Jinping. Il reflète souvent ses intentions, alors que The Paper a été créé par Xi Jinping et diffuse ses « décrets ».

Chen Pokong a aussi déclaré que la lutte actuelle au sein du Parti pourrait finalement ne bénéficier à aucune des factions.

« Une fois qu’il y a un changement dans la situation, les choses pourraient ne pas se passer comme prévu, même si les responsables n’y avaient pas pensé » a-t-il conclu.

Article original: Documenting the Fallout of the People’s Daily’s Editorial Against Jiang Zemin

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