Retraites, holdings, hauts revenus… Les grandes lignes du budget présenté par Sébastien Lecornu

Le Premier ministre Sébastien Lecornu prononce un discours politique général devant les membres du Parlement, à l'Assemblée, le 14 octobre 2025.
Photo: THOMAS SAMSON/AFP via Getty Images
Le gouvernement de Sébastien Lecornu a présenté mardi un projet de budget associant hausse de la fiscalité et limitation des dépenses, dans le but de redresser des comptes publics dégradés. Pour éviter une censure, le Premier ministre s’est engagé à « suspendre la réforme des retraites » et à laisser « le dernier mot » au Parlement sur l’adoption des textes budgétaires.
Adoptés en conseil des ministres, le projet de loi de finances (PLF) et le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) seront examinés au Parlement, avec pour objectif une adoption avant le 31 décembre. Lors de sa déclaration de politique générale à l’Assemblée nationale, Sébastien Lecornu a souligné : « Le Parlement aura le dernier mot », renonçant ainsi à recourir à l’article 49.3 de la Constitution, qui autorise l’adoption de textes sans vote.
Une suspension des retraites pour apaiser la gauche
La survie du Premier ministre dépendait principalement de sa décision de suspendre la réforme des retraites, réclamée par les socialistes, dont le soutien est déterminant et qui, pour l’instant, renoncent à voter la censure, contrairement au Rassemblement national et à La France insoumise. Selon Lecornu, la suspension de cette réforme, qui représenterait un coût de 400 millions d’euros en 2026 et 1,8 milliard en 2027, doit « être compensée par des économies ».
Un objectif de déficit revu à la baisse
Tout en refusant d’être « le Premier ministre d’un dérapage des comptes publics », Sébastien Lecornu assouplit toutefois l’objectif de réduction du déficit, optant pour « moins de 5 % » du PIB en 2026 (contre 4,7 % initialement prévu), alors que la prévision de croissance est abaissée à 1 % contre 0,7 % en 2025. Cette trajectoire rend plus difficile le retour au seuil de déficit de 3 % exigé par Bruxelles d’ici 2029.
30 milliards d’euros d’efforts budgétaires
L’État, qui doit composer avec une remontée des taux d’intérêt depuis la dissolution de juin 2024, prévoit un effort budgétaire d’environ 30 milliards d’euros : 17 milliards d’économies et près de 14 milliards de nouvelles recettes, selon le Haut Conseil des finances publiques.
Des coupes ciblées, des hausses sélectives
La plupart des budgets ministériels baisseront, à l’exception de la défense (+6,7 milliards d’euros), de l’intérieur (+600 millions) et de la justice (+200 millions). Les pensions de retraite et prestations sociales seront gelées ; l’abattement de 10 % sur les retraites est remplacé par un abattement forfaitaire de 2000 euros. Le gel du barème de l’impôt sur le revenu et de la CSG devrait rapporter 2,2 milliards d’euros, tandis que la suppression de 23 niches fiscales « obsolètes » ou « inefficaces » (sur 474) rapportera environ 5 milliards. Plus de 3100 postes de fonctionnaires seront supprimés.
Les plus aisés et les grandes entreprises ciblés
Le gel du barème de l’impôt sur le revenu entraînera l’entrée de 200.000 nouveaux foyers dans l’impôt. Les foyers les plus aisés sont directement ciblés : une contribution différentielle à 20 % sera prolongée d’un an (20.000 contribuables) et une taxe sur les holdings patrimoniales (10.000 structures) rapportera, avec la première mesure, 2,5 milliards d’euros.
« Quand, au sein d’une holding, vous avez des chalets, des biens privés, de l’immobilier, des actions, de la trésorerie qui ne sont pas des investissements productifs, (…) nous voulons mettre fin à ces pratiques », a expliqué la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, à l’Assemblée.
Plus de 400 grandes entreprises seront aussi mises à contribution via une surtaxe prolongée sur les bénéfices (pour 4 milliards), tout en bénéficiant d’une baisse progressive de la CVAE, jusqu’à sa suppression totale en 2028.
Des critiques sur les hypothèses du gouvernement
Du côté de l’opposition, le président de la commission des Finances, Éric Coquerel (LFI), dénonce un projet de budget « plus inégalitaire » que celui de 2025, craignant un effet « récessif » et une validation par ordonnance si le Parlement ne statue pas dans les 70 jours prévus.
Le Haut Conseil des finances publiques juge de son côté les hypothèses du gouvernement « optimistes » et sa cible de réduction des dépenses « très ambitieuse ».
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