Sans aide internationale, les Haïtiens s’en prennent eux-mêmes aux gangs, s’alarme l’ONU

Par Epoch Times avec AFP
7 juillet 2023 11:09 Mis à jour: 7 juillet 2023 11:10

Au moins 264 membres présumés de gangs tués depuis avril : des groupes d’auto-défense font désormais justice eux-mêmes en Haïti, s’est alarmée l’ONU jeudi, alors que l’appel à envoyer une force internationale pour épauler la police haïtienne reste lettre morte.

Le pays pauvre des Caraïbes fait face à une véritable crise humanitaire, politique et sécuritaire, avec des gangs qui contrôlent une majorité du territoire de la capitale, terrorisant la population en multipliant assassinats, enlèvements et viols.

Et « l’apparition de groupes de justiciers autoproclamés ajoute un nouveau niveau de complexité », s’est inquiétée jeudi la représentante de l’ONU pour Haïti, Maria Isabel Salvador, devant le Conseil de sécurité.

« Depuis avril, le Binuh (Bureau intégré des Nations unies en Haïti) a comptabilisé au moins 264 supposés membres de gangs tués par des groupes de justiciers autoproclamés », a-t-elle précisé.

Lors d’un des premiers épisodes marquants en avril, un groupe de civils s’était emparé de plusieurs membres de gangs détenus par la police, avant de les battre à mort et de brûler leur corps dans la rue.

État des violences liées à des gangs dans la capitale de Port-au-Prince, Haïti, le 24 avril 2023.(RICHARD PIERRIN/AFP via Getty Images)

Quelques semaines plus tard, le ministre haïtien de la Coopération extérieure Ricard Pierre avait mis en garde contre un risque élevé de « guerre civile » sans intervention étrangère.

S’exprimant jeudi par vidéo devant le Conseil de sécurité au nom de la communauté des pays des Caraïbes (Caricom), le Premier ministre de Jamaïque Andrew Holness a renchéri : « l’insécurité perpétuelle n’empêche pas seulement l’accès à la santé, à l’éducation et à d’autres biens et services de base. Mais elle entraîne aussi une hausse d’une justice populaire, qui menace d’aggraver le déferlement alarmant de violence ».

« Alors que nous exprimons tous notre solidarité, cela est vide de sens sans action urgente pour aider nos frères et nos soeurs en Haïti à parvenir à une paix, stabilité, et prospérité qu’ils méritent », a-t-il ajouté.

Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres avait relayé en octobre l’appel du gouvernement haïtien pour une force d’intervention internationale.

Au moins 1000 à 2000 hommes

« Je répète : nous n’appelons pas à une mission militaire ou politique des Nations unies. Nous appelons à une force de sécurité robuste déployée par des États membres pour travailler main dans la main avec la police nationale haïtienne pour vaincre et démanteler les gangs et restaurer la sécurité à travers le pays », a-t-il insisté jeudi, à son retour d’un déplacement en Haïti et à un sommet du Caricom.

Interrogé sur la composition de cette force, il a estimé que 1000 ou 2000 hommes ne seraient « pas une exagération ».

Mais son appel lancé il y a neuf mois est toujours sans réponse. Si quelques pays ont indiqué être prêts à participer, aucun ne s’est porté volontaire pour prendre la tête d’une telle opération dans un pays échaudé par de multiples interventions étrangères.

Des initiatives timides

Les États-Unis se sont dits jeudi « très activement engagés » dans la création d’une telle force internationale, le secrétaire d’État américain Antony Blinken évoquant « des pourparlers très actifs avec des pays de la région et d’ailleurs ». Mais la réunion du Conseil jeudi n’a pas permis de voir émerger des signes d’évolution.

Haïti « s’attache à sa demande renouvelée d’une assistance internationale robuste pour appuyer les efforts de la police », a répondu le ministre haïtien des Affaires étrangères Jean Victor Généus, se disant « flexible et ouvert à toutes les options » pouvant être envisagées par le Conseil.

« L’ONU, à travers le Conseil de sécurité, a la responsabilité morale d’empêcher le naufrage d’Haïti », a-t-il plaidé, réclamant une « action décisive » pour permettre à « la grande majorité souffrante et silencieuse d’espérer un lendemain meilleur ».

En plus de la violence, près de la moitié de la population, soit 5,2 millions de personnes a besoin d’assistance humanitaire, dont près de 3 millions d’enfants.

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