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Sur Parcoursup, ou pas, un essor des écoles privées qui appelle à la vigilance

janvier 14, 2023 16:30, Last Updated: janvier 14, 2023 17:35
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À l’heure où les lycéens doivent s’inscrire sur Parcoursup, une multitude d’écoles privées leur proposent des formations dans l’enseignement supérieur : le résultat d’un développement continu de ce secteur au bénéfice de groupes à but lucratif, qui appelle à la vigilance pour s’y retrouver.

« Il y a beaucoup d’écoles. C’est vaste », résume Iliana, 20 ans, qui s’est orientée dans une école de commerce à Paris en alternance pour étudier le marketing du luxe. « On avait été à des forums et une amie avait trouvé cette école », raconte-t-elle. « Au départ, on se disait peut-être qu’ils nous manipulent, on ne sait pas très bien ce qu’ils nous vendent ».

« Quand on va sur Parcoursup, c’est un maquis d’informations », explique la sociologue Annabelle Allouch, auteure de « La société du concours ». « Tout un tas d’acteurs privés gravitent autour de la plateforme, dont des formations qui vendent de la sérénité aux usagers ».

Pour la sociologue, ces écoles profitent du « marché de l’anxiété » créé par la plateforme d’orientation post-bac.

Art appliqués, cinéma, photo, informatique, communication, marketing ou écoles d’ingénieurs : les formations privées ne cessent de se développer, rendant plus complexe l’offre de formations post-bac.

Un essor des écoles privées

En 2021, le privé regroupait 736.800 étudiants, soit 24,8% des effectifs du supérieur, selon les chiffres du ministère. C’est plus du double qu’il y a vingt ans.

En dix ans, les inscriptions y ont augmenté de 60% (contre 16% dans le public), profitant de « la massification des effectifs étudiants » qui « n’a pas été accompagnée par un soutien des universités publiques », explique Aurélien Casta, économiste et sociologue à l’université de Lille.

Certaines de ces écoles sont sur Parcoursup, 40% des formations recensées en 2022 sont privées, selon un rapport parlementaire, d’autres non, mettant en avant cet argument pour vendre du rêve sans stress.

Cette croissance tous azimuts profite à des acteurs à but non lucratif (instituts catholiques et écoles d’ingénieurs ou de commerce), mais surtout à des groupes privés, parfois contrôlés par des fonds d’investissement.

Parmi ces géants à but lucratif : Galileo (cours Florent, Atelier de Sèvres, écoles de commerce ESG…), piloté par des fonds internationaux, Omnes Education (école de sciences politiques HEIP, d’ingénieurs ECE, de management ESCE etc.), contrôlé par le fonds Cinven, ou encore Ionis (école de commerce ISG, d’informatique Epitech etc.).

« On a des acteurs qui n’ont pas à proprement parler des objectifs éducatifs, qui réclament de la rentabilité. C’est une vraie rupture par rapport à un ensemble de politiques mises en place en France, avec un modèle très contrôlé par l’État au nom de l’égalité et de la cohésion nationale », souligne Aurélien Casta. « Cette partie du privé a concentré la plus grande partie de la hausse depuis 2000, dans une opacité assez importante ».

Car si certaines écoles donnent des diplômes reconnus par l’État, d’autres ne sont pas habilitées à les délivrer, ou mentionnent des critères d’employabilité que rien ne vient étayer.

« Il faut être très vigilant »

« Je pense qu’il faut être très vigilant », souligne Alice Guilhon, directrice générale de SKEMA Business School et présidente de la Conférence des directeurs des écoles françaises de management (CDEFM), qui regroupe 38 grandes écoles de commerce (HEC, Essec…).

« Des officines échappent complètement aux radars et sont dans une montée en puissance importante parce qu’elles promettent de l’international, des jobs. Mais à la fin, l’étudiant se retrouve sans diplôme ».

Dans une enquête récente, la Répression des fraudes a épinglé des pratiques commerciales « trompeuses » de l’enseignement privé supérieur, estimant qu’il devait « revoir sa copie » en matière de protection du consommateur. Selon elle, « plus de 30% des établissements contrôlés se sont avérés être en anomalie » en 2020.

Un sujet qui intéresse aussi le ministère de l’Enseignement supérieur : il a créé en décembre un groupe de travail pour mieux réguler et contrôler la qualité des établissements privés, leurs diplômes et leur enseignement à distance. Ses conclusions sont attendues au printemps.

Pour Aurélien Casta, « on a un privé qui mobilise les ressources symboliques du public, et un public qui commence à s’inspirer du privé. Tout cela appelle une clarification ».

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