Tour de France: la performance de Vingegaard en question

Par Epoch Times avec AFP
24 juillet 2023 18:45 Mis à jour: 25 juillet 2023 06:42

Entre records d’ascension, contre-la-montre supersonique et grand écart avec la concurrence, le vainqueur du Tour de France 2023 Jonas Vingegaard a fait naitre des interrogations voire de la suspicion face à sa performance, scrutée à la loupe.

Le Danois et son rival Tadej Pogacar ont fait tomber dans le Tourmalet lors de la 6e étape, un chronomètre datant de 30 ans, au coeur des années EPO, et détenu jusqu’alors par le Suisse Tony Rominger, patient du docteur Michele Ferrari.

Et dans le col de Joux Plane, le duo aurait pu effacer des tablettes le temps de référence de Marco Pantani en 1997, s’ils n’avaient pas passé le dernier kilomètre et demi à se marquer comme des pistards dans un vélodrome, permettant même le retour de Carlos Rodriguez, vainqueur de cette 14e étape à Morzine.

Rien de confondant dans ces comparaisons, selon le directeur de la performance de l’équipe Groupama-FDJ, Frédéric Grappe. « Tous ceux qui prétendent avoir trouvé la preuve par le radar sont intellectuellement malhonnêtes », balaie-t-il.

La longueur de l’étape – qui pouvait atteindre 230 km en montagne dans les années 1990 –, son positionnement dans le parcours ou encore le nombre de cols traversés faussent toute comparaison. Sans compter l’évolution du matériel. « Au temps d’Armstrong, les vélos n’étaient même pas en carbone », rappelle-t-il.

« À chaque coup de pédale, le vélo se déforme et donne une réponse. Le matériel joue énormément sur le rendement mécanique. Les roues ont aussi une inertie différente et rien que le rebond pneumatique permet de gagner entre 5 et 10 watts par rapport à quelques années en arrière ».

Même dans les cols où l’aérodynamisme des vélos –bien plus perfectionné désormais – joue moins, il est périlleux, selon lui, d’estimer ces watts mesurant la puissance développée par les cyclistes et donc d’objectiver leur performance. « L’erreur de mesure est de 5% », explique, étude à l’appui, Frédéric Grappe, par ailleurs docteur en biomécanique, voire de 10% « s’il y a du vent ».

« Je ne prends aucune drogue, je ne prends aucune substance illégale »

Les chiffres à prétendue scientifique circulant sur les réseaux sociaux sont donc à prendre avec des pincettes. « Je sais qu’il y a beaucoup de sites internet qui calculent mes watts, la plupart du temps, ils sont d’ailleurs assez précis mais là pas du tout », a assuré Jonas Vingegaard. « Je ne prends aucune drogue, je ne prends aucune substance illégale. »

Grappe leur préfère l’écart constaté entre adversaires le même jour, plus significatif : « Là, ils sont tous dans le même aquarium. Ce qui est intéressant est de voir le delta de performance entre les coureurs dans les mêmes conditions. »

À ce titre, le contre-la-montre entre Passy et Combloux frappe tant il a été écrabouillé par Jonas Vingegaard , auteur du « meilleur chrono de tous les temps » selon l’ex-spécialiste Tom Dumoulin. Avec 4,4 secondes par kilomètres prises à son dauphin Pogacar, le Danois a signé le plus large écart dans un chrono World Tour depuis au moins dix ans, selon le site de référence Pro Cycling Stats.

« Plus que l’écart entre Vingegaard et Pogacar, ce qui interpelle est le delta entre Vingegaard et le reste », estime Frédéric Grappe. Avec une vitesse moyenne de 41,3 km/h ce jour-là, le double vainqueur du Tour a été 3,4 km/h plus rapide que le troisième Wout van Aert.

« C’était la meilleure journée de sa vie »

« Si j’avais un athlète qui faisait ça, je ne serais pas à l’aise, commente Frédéric Grappe. Je me poserais de grosses questions. La performance va au-delà de l’erreur de mesure des modèles d’estimation de puissance développée. »

« J’ai plus que du respect pour le travail de Jumbo-Visma et aucun doute sur l’intégrité de Mathieu Heijboer (son homologue, NDLR) qui a une approche scientifique, assure-t-il. À eux de faire leur propre analyse. Ils connaissent les records de leur athlète. S’il les a battus de 10%, ils le savent. Et ce n’est pas possible de battre ses records de 10% dans un grand tour. »

Le Danois a en effet fait tomber ses records, indique Mathieu Heijboer, responsable de la performance de Jumbo-Visma. « C’était la meilleure journée de sa vie, il a développé plus de puissance que jamais auparavant mais n’a battu ses meilleures données que de 5 à 10 watts », assure-t-il, pour un effort estimé entre 450 et 500 watts.

Pour lever toute suspicion et faire du cyclisme un sport modèle, le patron de l’équipe dsm-firmenich, Iwan Spekenbrink plaide pour davantage de moyens et de mesures antidopage. « Nous devons vraiment investir pour pouvoir détecter le dopage génétique, milite le Néerlandais. Et pour décourager toute tentation de transfusion sanguine, il faudrait des tests tôt le matin, de nouveau juste avant le départ, à l’arrivée et plus tard dans la soirée à l’hôtel. »

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