SCIENCES

Un nouveau test pour détecter la pré-éclampsie chez les femmes enceintes

février 25, 2016 3:00, Last Updated: février 26, 2016 5:32
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La pré-éclampsie est une forme de complication de la grossesse qui peut avoir des conséquences fatales. Seul 5% des femmes enceintes la rencontreront, mais selon un article de l’Inserm, cela reste tout de même la deuxième cause de décès maternel en France.

C’est une pathologie qui n’est pas encore bien comprise de la recherche médicale, qui explorent plusieurs facteurs pouvant en être la cause. Les premiers symptômes peuvent paraître anodins s’ils ne sont pas correctement diagnostiqués : l’augmentation de la pression sanguine et l’élévation du taux de protéines dans l’urine. Cela peut se manifester sous forme de violents maux de tête, troubles visuels, oedèmes et brutale prise de poids, entre autres. Comme la grossesse est aussi une période propice à l’apparition de nombreux symptômes tels que les nausées, vomissements, envies, prise de poids, oedèmes, etc., l’apparition de la pré-éclampsie peut se fondre parmi ces symptômes que rencontrent couramment les femmes enceintes.

La pré-éclampsie provoque la constriction des vaisseaux, donc l’afflux sanguin se fait difficilement et avec une plus forte pression, compromettant le bon fonctionnement des organes clés tels que le cerveau, les reins et le foie. L’Inserm indique que « dans la plupart des cas, un suivi permet d’éviter les complications graves ». En revanche, la survenue d’une hypertension artérielle intracrânienne peut faire basculer la pré-éclampsie vers l’éclampsie, c’est-à-dire des crises de convulsions, voire vers l’hémorragie cérébrale. La pré-éclampsie évolue dans 10% des cas vers des complications graves, mettant en jeu « à court terme, le pronostic vital de la mère et de son fœtus ». En France, 20 femmes décèdent chaque année de ces complications graves de la pré-éclampsie.

La difficulté de diagnostiquer cette pathologie s’accompagne d’une autre difficulté, celle de traiter la pré-éclampsie. Actuellement, les patientes enceintes à qui on a diagnostiqué une pré-éclampsie sont hospitalisées et sous étroite surveillance médicale pour éviter toute complication. Elles y reçoivent un traitement pour faire baisser leur tension mais il n’y a pas de résultat toujours satisfaisant, tant cette maladie est mal connue. De ce fait, les médecins sont encore dans l’expectative et doivent surtout être attentifs au moindre signe d’évolution de la pré-éclampsie. L’Inserm indique à ce titre que l’équipe médical observe chez la patiente « sa tension artérielle : est-elle ou non contrôlable par des hypotenseurs ? » et « ses fonctions vitales (pouls, respiration, diurèse, conscience), si elles sont altérées ? »

Selon la capacité du traitement à contrôler ou non la maladie et en fonction de son évolution, il peut être envisagé une interruption de grossesse. Même si tout est mis en œuvre pour poursuivre la grossesse le plus longtemps possible et dégager le fœtus au stade le plus avancé de son développement, l’interruption de grossesse peut être fatale pour le fœtus.

Pour diagnostiquer la pré-éclampsie, les médecins surveillent la pression artérielle et la quantité de protéines dans les urines, mais selon le laboratoire pharmaceutique Roche « l’hypertension et la protéurinie sont des médiocres facteurs prédictifs de l’apparition clinique de la maladie et de sa progression. »

Une avancée récente aux États-Unis pourrait pourtant améliorer le diagnostic de la pré-éclampsie. Les chercheurs ont en effet annoncé ce mois-ci la réussite de l’essai clinique d’une forme de dépistage de la pré-éclampsie, qui plus est facile à réaliser, abordable et non-invasif. Ce test qui prend seulement quelques minutes a démontré des résultats plus précis que ce qui se fait actuellement. L’équipe de chercheurs physiciens du Centre médical Wexner, de l’université d’État de l’Ohio, et le Nationwide Children’s Hospital ont mis au point une méthode, appelée le test de dépistage du « Congo red dot » (CRD).

Des protéines anormalement repliées

L’un des signes de la pré-éclampsie est le taux élevé de protéines dans les urines. De là, l’idée est venue à la doctoresse Irina A. Buhimschi, travaillant au Centre de recherche périnatal au Nationwide Children’s, d’observer ces protéines. Elle a ainsi remarqué que ces protéines présentaient une forme étrange.

Buhimschi et son équipe se sont alors penchés sur les autres pathologies caractérisées par la présence de protéines anormalement repliées sur elles-même. Ils ont identifié la maladie d’Alzheimer, provoquée par l’accumulation de dépôts de protéines entre les neurones du cerveau. Parce qu’ouvrir le cerveau des patients encore vivants est délicat, les médecins ont l’habitude de diagnostiquer la maladie uniquement à partir de ses symptômes. Sinon, ce n’est seulement qu’au cours de l’autopsie que les spécialistes pourront examiner les tissus et confirmer leur diagnostic.

Une méthode consiste à appliquer la teinture de Congo red sur les tissus du cerveau, capable de révéler la présence d’amyloïdes. Le Congo red est une teinture qui a été synthétisée pour la première fois en 1883 par le laboratoire pharmaceutique allemand Bayer. Son nom n’a par ailleurs aucun lien avec l’État africain du Congo.

L’équipe de Buhimschi ont alors collecté les urines de femmes enceintes, certaines atteintes de pré-éclampsie, d’autres non, pour les passer au test de la teinture de Congo red (CRD). Les échantillons ainsi obtenus devaient révéler et donc venir confirmer la présence ou non de ces protéines difformes. L’essai clinique a ainsi obtenu 86% de résultat fiable, contre 60 à 83% de réussite des tests menés actuellement sur la population. Ces chercheurs travaillent maintenant à breveter leur test afin de le commercialiser.

Selon le Dr Kara Rood, spécialisé en médecine fœto-maternelle dans l’Ohio et chercheur au sein d’une équipe évaluant le test CRD, il faut un moyen pour diagnostiquer plus vite et de façon plus sûre la pré-éclampsie, car cette maladie confronte les médecins à prendre de dures décisions.

« C’est difficile parce que nous avons en fait deux patients », note Rood. « Nous avons une mère dont nous ne voulons évidemment pas qu’elle connaisse de complications (…) et d’un autre côté, (…) des enfants meurent des conséquences de la pré-éclampsie, la plupart parce que nous avons besoin de réaliser la délivrance le plus tôt, pour ne pas que la mère meure. »

Une maladie encore mal connue

L’éclampsie n’est pas un phénomène nouveau. Hippocrate en son temps (460 av. J-C – 370) avait observé la prise de poids, les maux de tête et les convulsions durant la grossesse. Il y voyait, selon les conceptions de l’époque, la conséquence d’un déséquilibre des humeurs. Aujourd’hui, les médecins s’interrogent encore sur la cause de cette pathologie de la grossesse.

« Qu’est-ce qui la provoque ? On ne le sait pas », affirme Rood. « C’est une maladie mystérieuse. Tout de même, on sait que son évolution est progressive et qu’elle peut être fatale aussi bien la mère que pour le bébé. »

L’état actuel de la recherche suggère que des gènes, un déséquilibre hormonal ou encore un mauvais fonctionnement du système immunitaire pourraient être des facteurs contribuant à l’apparition de la pré-éclampsie. Certains pensent à une combinaison de ces facteurs comme déclencheurs de la maladie. Le Dr Tom Brewer, obstétricien à la retraite, avait orienté sa recherche vers le facteur environnemental et est convaincu que la pré-éclampsie serait déclenchée par une alimentation déficiente en protéines, minéraux et vitamines.

Dans les années 1920 et 1930, des études évoquaient déjà cette déficience nutritionnelle comme cause de la pré-éclampsie. Cette théorie est désormais largement remise en doute par la médecine actuelle. Dans les années 1980, Brewer a suivi des patientes dont 40% étaient atteintes de pré-éclampsie. Ce qu’il avait remarqué est que ces patientes s’alimentaient mal : elles absorbaient beaucoup d’aliments préparés et très peu de protéines. Après avoir administré à ces futures mères un régime à base de légumes, carbohydrates complexes et de protéines adaptées, il a déclaré être venu à bout totalement de la pré-éclampsie. Les détails de son régime et de la controverse qui en est née sont disponibles sur son site : DrBrewerPregnancyDiet.com.

Quelle qu’en soit la cause, la pré-éclampsie a prouvé qu’elle pouvait mener à une issue fatale, d’autant plus si elle n’est pas diagnostiquée. Parce que le traitement peut être une délivrance avant terme, plus la pré-éclampsie se manifeste tôt dans une grossesse plus cela met en danger la mère et le bébé. Les chercheurs travaillent actuellement à pouvoir mieux diagnostiquer les cas les plus graves.

« Nous avons identifié plus de 400 protéines anormalement repliées, présentes dans les urines de femmes atteintes de pré-éclampsie. À l’heure actuelle, nous recherchons s’il y en a une parmi elles à l’origine du déclenchement des complications », rapporte Rood.

Article en anglais : A Better Test for Preeclampsia—a Potentially Dangerous Pregnancy Complication

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