Une exposition sur les rapports complexes entre « juifs et musulmans, de la France coloniale à nos jours »

Par Epoch Times avec AFP
3 avril 2022 06:00 Mis à jour: 4 avril 2022 11:39

« Juifs et musulmans, de la France coloniale à nos jours » : une exposition à Paris apporte un regard historique et nuancé sur un siècle et demi de relations complexes et sensibles entre deux communautés, avec pour objectif de « conserver des passerelles ».

Cela n’a « jamais été montré ». « C’est la première fois qu’on tente cette aventure intellectuelle difficile, celle de l’histoire des rapports entre juifs et musulmans », qui a « une très grande longévité », affirme à l’AFP l’historien Benjamin Stora, commissaire général.

Avec pour sous-titre « plus d’histoire, moins de clichés », cette exposition, qui ouvre mardi 29 mars et se tient jusqu’au 17 juillet au Musée de l’histoire de l’immigration, « met l’accent pas simplement sur les affrontements (…) mais sur les possibilités de transmission d’une mémoire commune, sans naïveté », souligne-t-il. Avec pour objectif « d’essayer de dresser et conserver des passerelles ». 

Ce projet, en outre, « prolonge » l’exposition « Juifs d’Orient, une histoire plurimillénaire » qui vient de se terminer à l’Institut du monde arabe (IMA), avec « une dimension complémentaire » liée à « l’histoire politique, culturelle, sociale de la France », ajoute Mathias Dreyfuss, historien, commissaire exécutif.

Trois grandes périodes de la colonisation

Proposant des tirages photos, affiches, archives vidéo de l’Institut national de l’audiovisuel (INA), extraits de films, quelques tableaux de peinture, le parcours mène le visiteur à travers trois grandes périodes.

D’abord, de 1830 à 1914, avec l’arrivée de la France en Algérie (1830), puis en Tunisie (1881) et au Maroc (1912). Puis la période de l’entre-deux-guerres, le régime de Vichy, la guerre d’Algérie et la décolonisation au Maroc et Tunisie. Et enfin, des années 1967 à nos jours, mais cette fois sur le territoire de la France métropolitaine, avec l’installation de grandes communautés juives et musulmanes qui sont aujourd’hui, en nombre, les deux plus importantes d’Europe.

Le décret Crémieux de 1870

Le visiteur rencontre des preuves de « séparation » ou « d’affrontements », selon les termes de M. Stora : ainsi du décret Crémieux pris par l’Etat français en 1870 – une copie officielle est exposée – qui octroie collectivement la citoyenneté française aux 35.000 juifs d’Algérie, mais pas aux 3 millions de musulmans. Ces derniers restent avec le statut d’« indigène » aux droits civiques et juridiques limités, provoquant chez eux un sentiment d’injustice.

Cela aura des répercussions jusqu’en 1962, avec l’indépendance : les juifs arrivés en métropole seront des rapatriés puisque citoyens français, alors que les musulmans migrants deviennent des immigrés.

Autre « grand traumatisme », selon M. Stora : les émeutes de Constantine en 1934, qui se soldent par 28 morts (25 juifs, 3 musulmans).

Le conflit israélo-palestinien

On voit aussi combien, à partir de 1967 et la Guerre des Six jours, le conflit israélo-palestinien devient « ce qui cristallise les relations entre juifs et musulmans en France », explique M. Dreyfuss, et ce jusqu’à aujourd’hui.

Mais l’exposition montre aussi les interactions entre juifs et musulmans sur la scène musicale et dans le domaine de la peinture à certaines époques (principalement dans l’entre-deux-guerres), ou encore le soutien (minoritaire) de familles juives engagées du côté algérien durant la guerre d’indépendance.

Le quartier oriental de Belleville

Elle plonge le visiteur dans l’ambiance orientale du quartier de Belleville à Paris dans les années 1970, qui inspira des réalisateurs de cinéma. Elle l’interroge sur le racisme anti-musulman et l’antisémitisme contemporain depuis la seconde Intifada. Et le laisse avec ces portraits d’adolescents – musulmans, juifs, chrétiens, athées – d’un même collège de Sarcelles (Val d’Oise), réalisés en 2021 par la vidéaste Valérie Mréjen.

Les prêts d’œuvres et objets émanent principalement d’institutions nationales (archives nationales, prêts du musée du Quai Branly, du Musée d’art et d’histoire du judaïsme, Centre Pompidou, Musée de l’immigration, images de l’INA). A la différence de « Juifs d’Orient », qui avait bénéficié de prêts d’institutions israéliennes, suscitant une polémique.

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