Dépôt de plainte: une vingtaine de femmes victimes de Jeffrey Epstein ont été payées via des comptes JPMorgan

Par Zachary Stieber
19 février 2023 22:48 Mis à jour: 20 février 2023 10:46

Au moins 20 femmes victimes de trafic et d’abus sexuels dans les propriétés de Jeffrey Epstein ont été payées par le biais de comptes bancaires de JPMorgan Chase, selon un nouveau document judiciaire.

Ces femmes auraient été victimes d’abus et de trafic dans des propriétés situées dans les îles Vierges américaines, à New York, entre autres lieux, de 2003 à 2019.

Les femmes ont reçu des paiements totalisant collectivement plus d’un million de dollars, selon le département de la Justice des îles Vierges américaines, qui a déposé le dossier le 15 février.

Epstein a également retiré plus de 775.000 dollars en espèces sur cette période sur des comptes JPMorgan, ce qui est particulièrement important, car il était connu pour payer des « massages », ou des rencontres sexuelles, « en espèces », indique la déposition. « Les informations financières font également état de paiements prélevés sur les comptes JPMorgan pour un montant de près de 1,5 million de dollars à des recruteurs connus, notamment à l’agence de mannequins MC2, et de 150.000 dollars supplémentaires à une société d’enquête privée. »

Epstein faisait face à des accusations de trafic sexuel lorsqu’il est mort en prison en 2019. Le médecin légiste de la ville de New York a conclu à un suicide. Epstein avait plaidé coupable de sollicitation de mineurs à des fins de prostitution en Floride, en 2008.

Denise George, alors procureure générale des îles Vierges américaines, a engagé une procédure contre JPMorgan Chase à la fin de 2022, alléguant que la société a aidé Epstein dans ses activités criminelles, dont le trafic sexuel. La procureure George a par la suite été licenciée, mais l’affaire suit son cours.

La nouvelle déposition est une version moins expurgée de la première plainte modifiée.

Un « client à très haut risque »

Les preuves montrent que les responsables de JPMorgan savaient qu’Epstein était un « client à très haut risque ». Ils ont cependant décidé de continuer à gérer ses comptes « en raison de sa grande richesse et de ses relations avec d’autres personnes très fortunées », selon la plainte.

La division mondiale de la sécurité d’entreprise de la banque a par exemple examiné des articles de presse détaillant les accusations portées contre Epstein en Floride. JPMorgan a décidé de continuer à faire des affaires avec Epstein, bien qu’elle l’ait qualifié de « risque élevé ».

Dans un courriel interne de 2010, la division a signalé « de nouvelles allégations dans une enquête liée au trafic d’enfants » et s’est demandé « si vous êtes toujours à l’aise avec ce client qui est maintenant un délinquant sexuel enregistré ».

En janvier 2011, le directeur de la conformité de l’entreprise a demandé la réapprobation de la relation en raison des nouvelles allégations de trafic d’êtres humains. « Je pensais que nous l’avions fait en approuvant une nouvelle ligne de crédit de 50 millions de dollars le mois dernier ? » a répondu un autre employé.

Un examen effectué ce mois‑là a permis de conclure qu’aucune « mise à jour importante » n’avait été identifiée. Il a également été noté que Jes Staley, un haut responsable de JPMorgan, avait parlé avec Epstein du trafic de personnes présumé. Epstein lui aurait déclaré que les allégations n’étaient pas fondées et qu’il n’y avait aucune preuve à l’appui.

Deux mois plus tard, la division de la sécurité a rapporté qu’Epstein avait réglé une dizaine de procès avec des victimes présumées et qu’il était lié à Jean-Luc Brunel, propriétaire de l’agence MC2 Model Management. L’agence a reçu 1 million de dollars d’Epstein en 2005, selon les documents, qui précisent : « On ne sait pas si l’argent a été donné comme un investissement secret ou un paiement pour des services en tant que proxénète. »

Une relation étroite

Jes Staley, chef du secteur privé de JPMorgan, a échangé environ 1200 courriels avec Epstein à partir du compte de messagerie de son entreprise. Les communications montrent une relation étroite et une amitié et « suggèrent même que Jes Staley a pu être impliqué dans l’opération de trafic sexuel d’Epstein », selon les autorités des îles Vierges, notant qu’il a visité l’île d’Epstein à plusieurs reprises.

Dans un échange, Jes Staley déclare être arrivé à Little St. James, l’île. Plusieurs mois plus tard, il écrit : « Dis bonjour à Blanche‑Neige. »

« Quel personnage veux‑tu ensuite ? » demande Epstein.

« La Belle et la Bête », répond Jes Staley.

« Eh bien, un côté est disponible », explique Epstein.

À un autre moment, il écrit : « Je réalise le danger d’envoyer ce courriel. Mais c’était génial d’être capable, aujourd’hui, de te donner, à New York, un long câlin sincère. »

Plusieurs virements ont également eu lieu peu après que Staley a rendu visite à Epstein en Floride ou peu après qu’il a demandé quelque chose pendant son séjour à Londres.

« Aucun des courriels entre Epstein et Staley n’a été signalé dans le cadre des examens de risque des comptes d’Epstein. De plus, JPMorgan a permis à Staley de rester un décideur sur les comptes d’Epstein. JPMorgan a même chargé Staley de discuter des allégations de trafic d’êtres humains avec Epstein », peut‑on lire dans le dépôt de plainte.

Rapport de 2013

En 2013, le rapport de la banque ne signalait « rien d’inhabituel » pour les transactions d’Epstein. Aucune « activité inhabituelle » ne se produisait, selon le rapport.

Selon les autorités des îles Vierges, la fréquence des paiements d’Epstein et le nombre de paiements effectués à des femmes auraient dû déclencher une action.

JPMorgan a fourni à Epstein des lignes de crédit allant jusqu’à 50 millions de dollars juste avant de mettre fin à sa relation avec lui en 2013.

La plainte a été déposée devant un tribunal fédéral à New York.

Les autorités demandent au tribunal d’ordonner à la banque de payer des amendes au gouvernement, et d’exhorter la banque à restituer « tous les gains mal acquis », en plus de sanctions civiles.

Le tribunal devrait également prononcer une injonction qui empêchera « toute nouvelle conduite illégale et toute dissimulation de conduite illégale », ont déclaré les autorités.

JPMorgan (JPMC) n’a pas répondu à une demande de commentaire.

La banque a déposé une requête en irrecevabilité, qualifiant l’action de « cours magistral de déviation qui cherche à tenir JPMC responsable de ne pas avoir enquêté sur les crimes d’Epstein il y a plus de dix ans », alors même que les autorités « avaient accès à l’époque aux mêmes informations, allégations et rumeurs concernant Epstein, sur lesquelles JPMC aurait dû agir ».

La requête indique également que l’action en justice « repose sur la théorie indéfendable selon laquelle JPMC a participé à l’entreprise de trafic sexuel d’Epstein et était, d’une manière ou d’une autre, dans une position unique pour y mettre un terme ».

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