Voici le scientifique qui essaie de voyager dans le temps

Par CNN
3 janvier 2020 16:43 Mis à jour: 3 janvier 2020 16:43

Il a été dit que le passé est une terre étrangère. Et, parfois, c’est un pays que nous aimerions visiter.

Bien sûr, nous ne le pouvons pas. Alors que les voyages réels ne sont limités que par la somme d’argent que nous pouvons épargner, les exigences en matière de visa et les annulations de vols, les voyages dans le temps sont limités par les lois dures et froides de la physique.

Ou peut-être que non.

Rejoignant les rangs d’inventeurs des films comme Doc Brown de Retour vers le futur, quelques scientifiques de la vie réelle tentent actuellement de réaliser le rêve de revenir en arrière pour voyager vers la destination ultime.

Parmi eux, Ron Mallett, un astrophysicien qui a consacré une grande partie de sa vie adulte à explorer l’idée que le voyage dans le temps est possible. Il a élaboré les équations et les principes scientifiques à partir desquels il pense qu’une machine à remonter le temps pourrait être créée.

Tout en reconnaissant qu’il est peu probable que ses théories et ses conceptions permettent un voyage dans le temps au cours de sa vie, il a parallèlement depuis des années une carrière universitaire respectée pour réaliser son rêve de s’aventurer dans le passé pour revoir son père bien-aimé.

Ron Mallett était âgé de 10 ans lorsque son père est subitement décédé d’une crise cardiaque, un événement qui, selon le scientifique, a changé à jamais le cours de sa vie.

« Pour moi, le soleil s’est levé et s’est couché sur lui, il était le centre de tout », raconte-t-il à CNN Travel. « Même aujourd’hui, après toutes ces années, c’est encore irréel pour moi. »

Le père de Ron, réparateur de téléviseurs, a inculqué à son fils l’amour de la lecture et a encouragé sa passion naissante pour la science. Environ un an après la mort de son père, Ron, en deuil, est tombé sur une version illustrée du roman de science-fiction classique The Time Machine.

« Le livre qui a changé ma vie », dit-il.

Grâce à l’imagination de l’auteur HG Wells, Ron sentit soudain sa tragédie familiale représenter non pas une fin, mais un début.

Plus de soixante ans plus tard, Ron Mallett, 74 ans, est professeur de physique à l’université du Connecticut. Il a passé sa carrière à enquêter sur les trous noirs et la relativité générale, les théories de l’espace, du temps et de la gravité explorées par Albert Einstein.

Ron a également théorisé sur le voyage dans le temps, au cours duquel il a entrepris son propre voyage personnel : une quête complexe et souvent controversée pour construire une machine capable de visiter le passé.

Il est encore loin de sa destination (certains diront qu’il n’y arrivera jamais), mais son histoire en fait un récit poignant qui s’attarde sur le pouvoir de l’amour, la puissance des rêves d’enfance et le désir humain de contrôler le destin dans un insondable univers.

Comment devenir un voyageur du temps

Ron a découvert le concept du voyage dans le temps dans les années 1950.

« Nous n’étions même pas allés dans l’espace », se souvient-il. « Et les gens ne savaient même pas si nous le pouvions. »

Ayant grandi dans le quartier du Bronx à New York, puis en Pennsylvanie, la famille de Ron a eu du mal à trouver de l’argent.

En tant « qu’accro du livre », il a toujours trouvé les moyens de se procurer du matériel de lecture, trouvant du réconfort après la mort de son père parmi les étagères de la librairie de l’Armée du Salut.

C’est ici que Ron a rencontré les écrits d’Einstein, sa prochaine inspiration clé.

Il a continué à se pencher sur les livres de science tout au long de son adolescence et, après avoir quitté le lycée, a visé l’université via le GI Bill qui soutient les vétérans militaires américains dans leur éducation post-service.

Il s’est enrôlé dans l’US Air Force, où il a servi pendant quatre ans, y compris dans le déploiement au Vietnam.

Finalement, Ron est arrivé dans le milieu universitaire. Il a obtenu un baccalauréat en physique, suivi d’une maîtrise et d’un doctorat, spécialisé dans la théorie d’Einstein.

Son premier travail consistait à travailler sur les lasers chez United Technologies, un constructeur aéronautique, à la recherche de la façon dont ils pourraient être utilisés pour percer des trous dans les aubes de turbine des moteurs à réaction.

Après quelques années d’application des théories mathématiques dans ce cadre pratique, Ron a rejoint l’université du Connecticut (UCONN) en tant que professeur adjoint de physique.

À travers tout cela, le Vietnam et même avant, Ron envisageait tranquillement la possibilité d’un voyage dans le temps.

Mais il n’a commencé à parler publiquement de ses ambitions qu’une fois que l’UCONN a fait de lui un professeur titulaire, un poste universitaire à durée indéterminée qui accorde aux titulaires la liberté de travailler en grande partie sans crainte de licenciement.

« Je voulais m’assurer d’atteindre ce sommet de professionnalisme », dit-il, « et même alors j’étais un peu réticent. »

Il connaissait le stéréotype du « professeur fou ». Il voulait s’assurer que ses ambitions ne seraient pas ridiculisées et son travail, pas menacé.

Mais lorsque Ron a commencé à parler ouvertement de ses idées, il a constaté qu’elles résonnaient avec beaucoup d’autres personnes, quelque chose qui, dit il, montre l’universalité du désir de revisiter le passé. Nous avons tous des regrets ou des décisions passées sur lesquelles nous nous interrogeons, ou des gens que nous avons perdus et que nous désirons revoir, ajoute-t-il.

« Les gens ont commencé à me contacter, littéralement de partout dans le monde, au sujet de la possibilité de remonter dans le temps », dit-il.

La science derrière tout cela

Aujourd’hui, des photos de Ron au travail le montrent entouré d’équipement dans un laboratoire encombré, démontrant ses principes au travail via des expériences à petite échelle ; ou debout, rayonnant, devant des tableaux noirs où il a gravé ses formules.

L’aspect personnel du travail de Ron est profondément émouvant, mais dans quelle mesure la science derrière ses idées est-elle plausible ?

Tout dépend, dit le Pr Mallett, de la théorie de la relativité restreinte et de la théorie de la relativité générale d’Einstein.

« Pour résumer, Einstein a déclaré que le temps peut être affecté par la vitesse », explique Ron.

Ron donne l’exemple des astronautes traversant l’espace dans une fusée qui se rapproche de la vitesse de la lumière. Le temps passerait différemment sur terre que pour les gens de la fusée.

« Ils pourraient en fait revenir pour découvrir qu’ils n’ont que quelques années de plus, mais que des décennies se sont écoulées ici sur Terre », dit-il.

Ron pointe le film de science-fiction classique de 1968 La planète des singes , à la fin duquel un astronaute se rend compte qu’il n’a pas voyagé sur une planète éloignée et dirigée par des singes, mais qu’il est simplement revenu sur Terre dans avenir un post-apocalyptique au sein duquel l’humanité a été subjuguée par les simiens.

« C’est une représentation exacte de la théorie de la relativité restreinte d’Einstein », explique Ron. « Donc, le résultat est que, selon la théorie de la relativité, si vous voyagez assez vite, vous voyagez respectivement dans le temps. Et en fait, ce serait une représentation du voyage dans le temps. »

Cependant, il s’agit d’avancer et non de reculer, alors comment cela pourrait-il aider la quête de M. Mallett à retrouver son père ?

La théorie de la relativité générale d’Einstein est basée sur le concept de gravité et considère la manière dont le temps est affecté par la gravité.

« Ce que voulait dire Einstein, c’est que plus la gravité est forte, plus le temps ralentira », explique-t-il.

La théorie de la relativité générale dit que ce que nous appelons la force de gravité n’est pas du tout une force, c’est en fait la flexion de l’espace par un objet massif.

« Si vous pouvez plier l’espace, il est possible que vous tordiez l’espace », explique Ron.

« Dans la théorie d’Einstein, ce que nous appelons l’espace implique également du temps, c’est pourquoi on l’appelle espace-temps, tout ce que vous faites à l’espace arrive aussi au temps. »

Ron émet le postulat qu’en tordant le temps en boucle, on pourrait voyager du futur vers le passé, puis revenir vers le futur. Et c’est l’idée d’un trou de ver, une sorte de tunnel à deux ouvertures.

Il suggère que la lumière pourrait également être utilisée pour affecter le temps via ce que l’on appelle un laser annulaire.

Il a créé un prototype illustrant comment les lasers pourraient être utilisés pour créer un faisceau de lumière circulant qui tord l’espace et le temps, inspiré de son premier travail d’expérimentation de l’effet des lasers sur les réacteurs d’avion.

« Il s’est avéré que ma compréhension des lasers m’a finalement aidé dans ma percée à comprendre comment je pourrais être en mesure de trouver une toute nouvelle façon de construire la base d’une machine à remonter le temps », explique Ron.

« En étudiant le type de champ gravitationnel produit par un laser annulaire, cela pourrait conduire à une nouvelle façon d’envisager la possibilité d’une machine à remonter le temps basée sur un faisceau de lumière en circulation. »

Le professeur a également obtenu une équation théorique qui, selon lui, prouve que cela fonctionnerait.

« Finalement, un faisceau de lumières laser en circulation pourrait agir comme une sorte de machine à voyager dans le temps et provoquer une torsion du temps qui vous permettrait de retourner dans le passé », dit-il.

Il y a cependant un hic, un assez gros.

« Vous pouvez renvoyer des informations, mais vous ne pouvez les renvoyer qu’au point où vous allumez la machine », explique Ron.

Bien que sa quête pour retourner dans les années 1950 ne soit pas plus proche d’une réalité, il reste optimiste et continue de réfléchir aux possibilités.

Réalités du voyage dans le temps

Pourrait-il y avoir un avenir pas trop éloigné dans lequel le voyage dans le temps fasse partie de notre réalité quotidienne ? Après tout, nous entrons dans une ère où des concepts autrefois fantaisistes comme le tourisme spatial et les trains hyperloop entrent dans les domaines du possible.

Peut-être bien, mais tout le monde ne le pense pas.

« Le voyage dans le temps dans le passé est autorisé, potentiellement, dans notre théorie de la relativité générale, selon comment nous comprenons la gravité », explique Paul Sutter, un astrophysicien qui anime un podcast intitulé « Demandez à un astronaute ! ».

« Mais chaque fois que nous essayons de concocter un dispositif de voyage dans le temps théorique, un autre morceau de physique s’ajoute pour venir annuler la faisabilité du projet. »

Paul dit qu’il est au courant du travail de Ron et pense que c’est intéressant, bien que pas nécessairement sur la bonne voie pour produire des résultats.

« Je ne pense pas que ça va nécessairement être fructueux, parce que je pense qu’il y a de profondes lacunes dans ses mathématiques et sa théorie, et donc un dispositif pratique semble inaccessible. »

Des critiques sérieuses de la théorie du Pr Mallett ont été exprimées en 2005 par Ken D. Olum et Allen Everett, de l’Institut de cosmologie, au département de physique et d’astronomie de l’Université Tufts. Ils ont dit qu’ils avaient trouvé des lacunes dans l’équation de Ron Mallett et dans le côté pratique de l’appareil proposé.

L’écrivain scientifique britannique Brian Clegg regarde plus favorablement les idées de Ron, il a également décrit le scientifique dans son livre Build Your Own Time Machine (littéralement, « Comment construire une machine à voyager dans le temps »).

« Bien que tout le monde ne soit pas d’accord pour dire que son appareil fonctionnerait, je pense que c’est une proposition suffisamment intéressante pour opter pour un essai expérimental », explique Brian Clegg.

« Si cela fonctionnait, il faut souligner que ce ne serait pas une machine à remonter le temps pratique, cela produirait simplement un effet minuscule mais mesurable, qui démontrerait le principe. »

Ron clarifie rapidement que ses idées sont théoriques.

Il dit qu’il essaie actuellement d’obtenir des fonds pour mener des expériences réelles.

« Ce n’est pas comme les films », explique Ron. « Cela ne se produira pas au bout de deux heures, au prix de ce que vous payez pour le billet de cinéma. Ça va coûter cher. »

Les comparaisons de films sont un thème qui est revenu fréquemment lors de la conversation avec Ron. Il prend plaisir à expliquer les concepts du voyage dans le temps à travers des exemples cinématographiques.

Interrogé sur les implications éthiques d’un retour dans le passé, il suggère qu’il y aurait un besoin de réglementation internationale et de maintien de l’ordre, et souligne l’exemple du film de 1994 Timecop, dans lequel Jean-Claude Van Damme incarne un officier travaillant pour une agence de régulation.

Un autre favori, dit-il, est le film de 2014 de Christopher Nolan Interstellar, qui traite de la façon dont le temps pourrait affecter différemment les gens dans l’espace que les gens sur Terre.

Les références scientifiques de ce film ont été renforcées par l’implication du physicien théoricien Kip Thorne, lauréat du prix Nobel.

Mais Ron apprécie également le cœur émotionnel du film, l’histoire père-fille qui anime l’intrigue : « C’est magnifique », dit-il.

La magie des films

Hollywood a appelé Ron Mallett à plusieurs reprises. Une adaptation proposée de The Time Traveller, une autobiographie qu’il a co-écrite en 2008, a échoué malgré l’implication du célèbre réalisateur Spike Lee.

Ron dit qu’une grande société de production a maintenant acheté les droits de son histoire et qu’il y a un autre projet cinématographique en préparation.

Même après une vie passée à enquêter sur les voyages dans le temps, il pourrait ne jamais revenir physiquement dans le New York des années 50.

Mais, grâce à la magie du cinéma, il aura peut-être encore un aperçu du passé, de cette « terre étrangère » et en quelque sorte, de son père, une dernière fois.

« L’idée de pouvoir réellement voir mon père sur grand écran, ce sera presque comme le ramener à la vie pour moi », explique Ron, d’une manière poignante.

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