92% des Français jugent que le niveau d’insécurité s’aggrave dans le pays

Par Etienne Fauchaire
2 avril 2024 20:57 Mis à jour: 15 avril 2024 14:05

Une spirale de violences qui empire, se ressent, mais surtout, se vit et… se voit. De l’adolescent frappé avec un marteau par des lycéens début mars à Paris, à l’homme poignardé par deux voyous à Lyon mercredi dernier, en passant par une fusillade deux jours plus tôt à Valence près d’une école élémentaire, le violeur en série circulant en trottinette dans les rues de Grenoble, et le garçon de 8 ans en CE2 menaçant de planter sa maîtresse au couteau… Pas un jour ne se passe en France sans son lot de tragiques « faits divers », rapportés ou non dans la presse.

Cette ultraviolence à la Orange mécanique qui ronge graduellement le pays, les Français, dans leur quasi-totalité, s’en inquiètent. C’est ce que vient révéler le dernier baromètre « sécurité des Français » Fiducial/Odoxa pour le Figaro : 92% d’entre eux estiment que l’insécurité dans l’Hexagone s’est aggravée au cours des dernières années, 55% jugeant même qu’elle a « beaucoup » augmenté.

82% de nos concitoyens s’accordent ainsi avec le diagnostic du ministre de l’Intérieur, qui, à la suite du meurtre de Thomas dans le village de Crépol (Drôme), avait dénoncé un « ensauvagement » dans une partie de la société. Selon l’étude, « les sympathisants de Renaissance, de LR et du RN le pensent tous (93 % à 95 %) ». En revanche, à gauche, « ces propos font davantage débat, même si une majorité des sympathisants de LFI (55 %), socialistes (63 %) et écologistes (65 %) sont d’accord ».

Moins de trois Français sur dix font confiance à l’État pour garantir leur sécurité

Si ce piteux constat recueille donc un large consensus, les Français désavouent dans leur écrasante majorité le gouvernement dans sa capacité à solutionner ce problème endémique. Le chiffre est lapidaire : plus de 7 sondés sur 10 pensent que l’État ne peut assurer leur sécurité face aux cambriolages et aux agressions. Au-delà de la question de la délinquance, ils sont 62% à se montrer sceptiques sur son aptitude à protéger la population face au risque terroriste. Et alors même que les Jeux olympiques sont prévus dans moins de quatre mois, seuls 29% pensent que l’exécutif sera en mesure d’en garantir la sécurité…

Pour ceux qui ressassent à l’envi que l’insécurité en France n’est qu’un sentiment, une illusion d’optique favorisée par les médias, cette étude risque de déplaire à leur vision du réel : les Français sont « concrètement exposés » à l’insécurité, affirment ses auteurs. Plus d’un Français sur deux (56%) déclarent en effet en avoir été victimes. Près de 39 % rapportent avoir été harcelés ou agressés dans la rue et dans les lieux publics, près d’un quart (23%) avoir été cambriolés, et près d’un sur dix à avoir été agressés sexuellement (8%).

Parmi les lieux qui « suscitent un très fort sentiment d’insécurité dans le pays », on retrouve les quartiers, où 83% des habitants déclarent vivre dans la crainte, malgré les promesses de « reconquête républicaine » faites par nos ministres de l’Intérieur successifs. Ensuite, les transports en commun : 65% des voyageurs disent craindre pour leur intégrité physique. Enfin, les rues des grandes villes (61%).

Résultat, en raison de l’inaction de l’État, nos compatriotes se sentent contraints de prendre les devants et d’adopter des mesures visant à assurer leur protection. D’abord par des moyens sécurisant leur domicile, par un digicode (33 %), une alarme (26 %), un système de vidéosurveillance (24 %), ou un chien de garde (21 %). Pour se défendre face à d’éventuelles agressions en pleine rue, 21% de la population se déplace munie d’une bombe lacrymogène. Par ailleurs, 13 % des sondés rapportent avoir fait l’acquisition d’une arme de défense et 12 % déclarent avoir déjà suivi des cours d’arts martiaux et de krav-maga, une technique israélienne de combat rapproché. Selon le sondage, c’est 30 % des Français qui ont déjà décidé d’organiser leur protection par eux-mêmes.

Pour pallier l’explosion de la délinquance, 51% de nos concitoyens se disent d’ailleurs prêt à intégrer des « collectifs citoyens » permettant d’organiser la sécurité des riverains au moyen, par exemple, de rondes citoyennes. 66% d’entre eux se disent toutefois préoccupés par la crainte que certaines situations ne s’enveniment et en poussent certains à se faire eux-mêmes justice.

C’est pourquoi le recours à la sécurité privée est désormais largement plébiscité. La vidéoprotection fait partie de l’arsenal sécuritaire faisant consensus, les sondés se disant à 90% favorables à son utilisation pour « surveiller l’extérieur des immeubles » mais aussi l’« intérieur même des bâtiments ». Ils sont même 81% à approuver le déploiement de drones en vue de surveiller les cités ou les immeubles dangereux, trois quarts de nos compatriotes voulant poster des agents privés dans les halls d’immeubles pour prévenir leur occupation. « Une seule option fait débat dans la société : l’armement des agents de sécurité privée », notent les auteurs du baromètre, puisque 51 % des Français y sont opposés. « Cette idée est surtout soutenue par les sympathisants RN (66 %) et Renaissance (61 %) », détaillent les analystes, qui précisent que « les sympathisants des autres grands partis y sont quant à eux opposés : LR (55 %), LFI (63 %), socialistes (68 %) et écologistes (74 %). »

Les Français pour renforcer l’usage de la force policière

Cela sera pour déplaire aux Insoumis : face à l’explosion de la délinquance, une nette majorité (68%) souhaiterait que police et gendarmerie soient autorisés à « un recours à la force plus large que ce qui est permis ». « Strictement encadré par la loi, le recours à la violence est, pour certains, trop restrictif et empêche les forces de l’ordre d’être efficaces dans leur mission », soulignent les analystes du baromètre. Une volonté en phase avec celle des agents sur le terrain, comme l’avait rapporté une étude du Défenseur des droits publiée en février dernier : « Six policiers et gendarmes sur dix (59,8 %) considèrent que, dans certains cas, l’utilisation de plus de force que ce qui est prévu dans les textes devrait être toléré », détaillait-elle. Sans surprise, ce désir d’un recours accru à la force se note plus fortement chez les sympathisants LR (87 %), RN (83 %), mais aussi par ceux de Renaissance (77 %).

Par ailleurs, après les émeutes de juin 2023, marquées par une forte proportion de mineurs délinquants, les Français partagent à pas moins de 94% le slogan du Premier ministre Gabriel Attal « tu casses, tu répares », lancé lorsque ce dernier avait fait part de sa volonté d’instaurer des travaux d’intérêt général pour les mineurs coupables d’actes de vandalisme. Signe de la « droitisation » de la société, 87 % veulent par ailleurs un « durcissement de l’autorité à l’école » et, pour 80% des sondés, la suppression des allocations familiales perçues par les parents dont les enfants ont décroché. « Même les sympathisants de gauche y sont majoritairement favorables (59 %), révèle le baromètre. De même, les amendes contre les parents de mineurs délinquants sont approuvées par 79 % des Français. »

Tous les indicateurs de la délinquance à la hausse en 2023

Les chiffres de cette étude reflètent, somme toute, le contenu du bilan du service statistique du ministère de l’Intérieur (SSMSI) publié à la fin du mois de janvier : la majorité des crimes et délits ont poursuivi en 2023 la tendance haussière enregistrée au fil des années.

Les homicides ont passé la barre symbolique des 1.000 victimes (1010, +5%) et les tentatives d’homicides grimpent (4.055, +13%), suivant une hausse continue depuis 2020. En outre, les coups et blessures ont bondi de 7 % par rapport à 2022, tandis que les viols et les tentatives de viol recensés sont en hausse de 10 %. Entre 2022 et 2023, les escroqueries ont progressé de 7 % en France, les vols de véhicules de 5 %, les cambriolages de 3 % et les vols avec armes de 2 %. Les destructions et dégradations ont aussi augmenté de 3 % en un an, mais elles ont connu une explosion de 140 % lors des émeutes urbaines successives à la mort de Nahel.

Dans le détail, les auteurs de crimes ou délits identifiés par la SSMSI étaient âgés en majorité de 15 à 24 ans. Comptant pour 8 % de la population française, les étrangers ont été représentés à hauteur de 17 % dans les délits recensés. Ces derniers ont néanmoins pris une part importante dans les cambriolages (38%) et vols dans les voitures (40%).

De premiers chiffres de la délinquance pour l’année 2023 avaient déjà été publiés début janvier et affichaient des indicateurs similaires. Le nombre de coups et blessures volontaires atteignait notamment un record : 362.000 faits l’année passée, soit près de 1.000 agressions par jour en moyenne. Une progression de 63 % depuis l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron en 2017. Il y a sept ans, quand Emmanuel Macron succédait à François Hollande, les autorités en comptabilisaient en effet 222.000 par an.

Malgré ces niveaux vertigineux, il convient de rappeler en plus qu’une part significative de la violence échappe aux statistiques et à la sanction pénale, puisque de nombreux actes ne sont pas signalés aux autorités de police, les victimes ne portant pas systématiquement plainte.

Maillon faible de la politique de l’exécutif, la lutte contre l’insécurité ne manquera donc pas d’alimenter les débats publics à l’approche des élections européennes, prévus dans presque neuf semaines.

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