Les BRICS : une «machine à laver» les dictateurs

Par Roberto Motta
22 août 2023 09:22 Mis à jour: 22 août 2023 15:30

BRICs est un acronyme créé en 2001 par l’économiste Jim O’Neill, de la banque d’investissement Goldman Sachs, dans le rapport Building Better Global Economic BRICs. O’Neill a joué sur les mots avec l’acronyme BRIC, qui a la même consonance que le mot anglais « brick », mais qui désigne le groupe de pays formé par le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine. En 2001, ces économies représentaient déjà 23 % du PIB mondial (selon le critère de la parité de pouvoir d’achat), tandis que les économies du G7, groupe formé par le Canada, la France, l’Allemagne, l’Italie, le Japon, le Royaume-Uni et les États-Unis, représentaient 49 % de l’économie mondiale.

Dans son rapport, Jim O’Neill prévoyait que les BRICS allaient se développer. Il avait raison : à la fin de 2022, le PIB combiné des BRICS (auxquels s’est ajoutée l’Afrique du Sud en 2010) avait déjà dépassé 31 % de l’économie mondiale, tandis que le PIB du G7 était tombé à 30,7 %.

L’acronyme créé par Jim O’Neill a frappé l’imagination des hommes politiques et les BRICS ont commencé à se réunir en 2009. La prochaine réunion aura lieu en Afrique du Sud les 22, 23 et 24 de ce mois, dans un monde qui a radicalement changé depuis l’époque où Jim O’Neill a rédigé son rapport. L’absence de Vladimir Poutine sera un signe de ces changements. Ce dernier ne sera pas en Afrique du Sud en raison d’un mandat d’arrêt émis par la Cour pénale internationale pour les activités de la Russie dans la guerre en Ukraine. Xi Jinping, le dirigeant chinois, promet d’être présent. L’année dernière, Xi Jinping a été « réélu » pour un troisième mandat en tant que secrétaire général du Parti communiste chinois. C’est la première fois que cela se produit depuis la mort de l’ancien dirigeant Mao Tsé-Tung.

Mais après tout, que sont les BRICS ? Il est plus facile de définir ce qu’ils ne sont pas : les BRICS ne sont pas un bloc aligné sur des intérêts communs ou une même vision géopolitique. Ils ne constituent pas une union créée par un traité. Ils ne forment pas un pacte d’autodéfense. La meilleure définition des BRICS est peut-être celle d’un outil de projection des dirigeants suprêmes et des groupes de pouvoir des pays membres. Les BRICS sont une plateforme, un mécanisme à utiliser de manière pragmatique, en fonction de la situation.

Les pays qui composent le G7 présentent d’importantes différences entre eux : certains sont membres du Conseil de sécurité des Nations unies (les États-Unis, le Royaume-Uni et la France), d’autres non (le Japon, l’Italie et le Canada) ; certains sont dotés d’armes nucléaires, d’autres non. Et la taille de leurs économies est très inégale (l’économie des États-Unis est 13 fois plus importante que celle du Canada). Le G7 ne repose pas non plus sur un traité et ne dispose pas d’un secrétariat permanent. Mais tous les pays du groupe sont des démocraties dans lesquelles l’État de droit est (généralement) considéré comme existant, et qui partagent le même alignement géopolitique consolidé après la Seconde Guerre mondiale et la fin de la guerre froide.

Malgré la fièvre autoritaire politiquement correcte qui a balayé l’Occident – la vague woke – et le radicalisme de gauche qui a principalement contaminé la politique américaine et canadienne, il est encore possible de voir dans le G7 une intention commune de défendre le modèle capitaliste démocratique occidental.

C’est beaucoup plus que ce que l’on peut dire des BRICS. Les régimes de deux de ses membres – la Chine et la Russie – ne sont pas considérés comme des démocraties. La Russie est passée du communisme à une autocratie dominée par des oligarques. La Chine est dominée par une structure de pouvoir dictatoriale, nominalement communiste, qui permet l’existence contrôlée d’une économie de marché entièrement soumise au contrôle de l’État.

Les trois autres pays BRICS – le Brésil, l’Inde et l’Afrique du Sud – sont des démocraties instables et sujettes aux turbulences. Le Brésil traverse une période difficile, marquée par l’utilisation des institutions de l’État pour réprimer la liberté d’expression et par des manifestations contre le retour au pouvoir d’un groupe politique considéré par beaucoup comme prédateur, rancunier et radicalement idéologique.

La Chine et la Russie sont membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies. L’Inde souhaite obtenir un siège au Conseil. La Chine s’y oppose, tandis que la Russie soutient l’Inde – bien que beaucoup disent que ce soutien n’est qu’un geste potentiellement rentable, car la Russie est sûre du veto de la Chine.

La seule chose que les pays BRICS semblent avoir en commun est le fait qu’ils sont des puissances qui ne se sentent pas représentées par les institutions internationales. Si le critère d’appartenance au G7, par exemple, n’était que la puissance économique, l’Inde et la Chine en feraient partie, au lieu du Canada et de l’Italie. Un autre exemple est la difficulté pour des pays comme la Chine ou le Brésil d’obtenir des ressources de la Banque mondiale, car ils ne sont plus des pays à faible revenu par habitant. La banque des BRICS serait une solution, bien qu’elle ne soit apparue que longtemps après la création du bloc.

La fonction réelle du bloc BRICS semble être, pour les pays membres et leurs dirigeants, de garantir une visibilité internationale et un canal de relations. C’est pourquoi les BRICS ont acquis une nouvelle importance pour la Russie après l’invasion de la Crimée et la guerre avec l’Ukraine. Les gauchistes qui forment l’actuel gouvernement brésilien – et qui s’efforcent de réécrire ses relations extérieures – semblent voir dans les BRICS une chance de recréer le groupe des pays non alignés des années 1960. C’est l’occasion pour eux de se débarrasser de la rhétorique « anti-impérialiste » du passé et de détourner l’attention des erreurs économiques et du désastre politique du gouvernement du Parti des travailleurs.

C’est là que se trouve l’explication de la suggestion d’admettre des pays comme l’Argentine et le Venezuela au sein des BRICS. Personne ne devrait être surpris si les prochaines suggestions portent sur l’adhésion de Cuba et du Nicaragua. Entre-temps, la présidence de la Banque des BRICS a été confiée à un personnage controversé : Dilma Rousseff – l’ancienne guérillera qui a été élue deux fois présidente du Brésil avant d’être destituée lors de son second mandat, après avoir conduit le pays dans la pire récession depuis le début du 20e siècle.

Aujourd’hui, les BRICS ne sont rien de plus qu’un club qui donne aux politiciens autoritaires l’occasion de se faire connaître dans les médias avec des agendas attrayants. Un club qui justifie le tourisme international luxueux des dictateurs et de leurs bureaucrates, et qui facilite des réunions qui n’auraient pas lieu autrement – et qui ne devraient jamais avoir lieu, dans un monde qui valorise réellement la liberté, la sécurité et la prospérité.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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